1- « Le récit exact de ce qui est arrivé (ta genomena) n’est pas l’affaire du poète ; mais lui appartient ce qui aurait pu arriver, le possible (ta dunata) selon le vraisemblable (to eikon) et la nécessité » (Aristote, Poétique, IX, 1).
2- À titre d’exemple, je rapporterai ce passage de Comanini : « Ma il pittore che imita solamente per rassomigliare e representare vero imitatore sera’ e fabricatore d’idoli ; per non dire che il pittore e il poeta insieme vanno cosi’ minutamente delineando e descrivendo le cose che essi nelle figure e racconti loro fanno idoli perfettisimi e ei reppresentano cosi’ perfettamente ciascuna parte del figurato e descritto che nulla rimane che da desiderare sia ». G. Comanini, Il Figino – Trattati d’arte del Cinquecento, Laterza, Bari, 1962, Vol. III, p. 253.
3- « Il vaut mieux faire choix de l’impossible vraisemblable (adunata eikota) que du possible incroyable (adunata apitana) », Aristote, Poétique, XXV, 7.
Aristote a voulu définir la relation du poétique au logique et au topique. L’œuvre d’art peut se rapporter à une représentation possible logiquement, mais tellement extraordinaire qu’elle demeure incroyable. Il est alors préférable de produire une œuvre impossible au niveau logique, mais croyable. À partir de ce passage, les rhétoriciens et les esthètes baroques ont développé une théorie esthétique qui pourrait s’appeler « du merveilleux », cherchant à conduire la poésie au-delà même de ces limites, jusqu’à l’impossible croyable.
Patrizi parle ainsi de l’activité du poète : « Il fingere cose impossibili e incredibili erano poetiche e per conséguente erano offici e mestiere del poeta » (Patrizi, Della poetica, Instituto del Rinascimento, Firenze, 1969, Vol III, Della poetica admirabile, p. 299).
4- J.-B. Vico, De ratione, Op. cit. p. 81.
5- « Vera a falsibus, verisimilia ab incredibilibus iudicare et distinguere », (Cicéron, Partitiones oratoriae, 139).
6- Voir Descartes, Discours, Edit. Gilson, Vrin, Paris, 1957, 10,5.
7- « In dicendo autem vitium vel maximum sit a vulgari genere orationis atque a consuetudine communis senus abhorere », (Cicéron, De oratore, I,III,12).
8- J.-B. Vico, De ratione, Op. cit. p. 92.
9- Cicéron, De oratore, I,XII,54 - XIII,57.
10- Ainsi Aristote a-t-il distingué trois syllogismes, ou formes d’argumentation : démonstratif, lorsqu’il est vrai ; dialectique, lorsqu’il part des prémisses probables ; heuristique, lorsque ses prémisses paraissent probables mais ne le sont pas en réalité, comme dans l’argumentation des sophistes. Voir Aristote, Topiques, Edit. Tricot, p. 8, 100 a 25 b 18-25.
11- Aristote, Topiques, 100 b 18.
12- Le problème de la culture est indirectement posé dans les Topiques, quand Aristote affirme que la dialectique est plus universelle que les sciences, parce qu’elle a pour objet les principes généraux que les sciences ne peuvent que présupposer (Aristote, Topiques, 101 a 35).
Il est cependant traité directement ailleurs, comme dans le texte suivant : « En tout genre de spéculation et de recherche, la plus banale comme la plus relevée, il semble qu’il y ait deux sortes d’attitudes : on nommerait bien la première science de la chose (epistemen tou pragmatos), et la seconde une certaine culture (paideiam tina)... Ainsi l’homme cultivé est capable de juger, à lui tout seul, pour ainsi dire toutes les choses, tandis que l’autre n’est compétent que sur une nature déterminée » (Aristote, De partibus animalium, I,1, 639 a 1-10).
Dans cette thèse, je suis l’interprétation donnée par Aubenque, Le problème de l’être chez Aristote, Op. cit. p. 282.
13- Thomas d’Aquin, De anima, Edit. Marietti, Turin, 1925, III, loc. 3.
14- Thomas d’Aquin, Summa theologica, I q. 78 a 4 c : « Et ideo quae in aliis animalibus dicitur aestimativa naturalis, in homine dicitur cogitativa, quia per collationem quandam huiusmodi intentiones adiuvenit, unde etiam dicitur ratio particularis... est enim collativa inventionum individualim sicut ratio intellectiva intentionum universalium ».
Voir aussi 1 q. 81, a 3.
15- J.-B. Vico, La scienza nuova prima, Opere III, Laterza, Bari, 1968, 46.
16- J.-B. Vico, De ratione, Op. cit. p. 92.
17- « Omnis enim demonstrationis principium est quod quid est. Quare secundum quasqua definitiones non contingit accidentis cognoscere, sed neque conjecturari de ipsis facile, manifestum est quo dialecticae dictae sunt vane omnes » (Aristote, De anima, I 402 b 20).
Dans ce texte, la dialectique apparaît en suspens entre la connaissance scientifique et la connaissance empirique, car elle relève précisément des principes généraux, qui ne concevaient ni la substance ou l’essence de la chose, ni leur individualité.
18- J.-B. Vico, De ratione, Op. cit. p. 81.
19- « Quod toties successit, ut tandem animatverterim me non amplius ut caeteri solent per vagas et caecas disquititiones fortunas auxilio potius quam artis ad rerum veritatem pervenire, sed certas regulas ; longa experientia percepisse... Atque ita hanc totam methodum diligenter excolui... » (R. Descartes, Regulae, Op. cit. pp. 79, 24, 80, 1-5).
20- « Atque ut adhuc evidentius appareat illam disserendi ertem nihil omnino conferre ad cognitionem veritatis, advertendum est nullum posse dialecticos syllogismos arte formare qui verum concludat, nisi prius eiusdem materiam habuerint, id est nisi eamdem vertitatem, quae in illo deducitur jam antea cognoverint. Unde patet... vulgarem dialecticam omnino esse inutilem rerum veritatem investigare cupientibus... ac proinde illam ex philosophia ad rhetoricam esse transferandam » (R. Descartes, Regulae, Op. cit. pp. 82,20 - 83,1-6).
21- Gouhier, La pensée métaphysique de Descartes, Vrin, Paris, 1968, p. 95.
22- Stefanini précise ainsi la notion de « dialectique » chez Platon : « Mentre la retorica forma la credenza (pistis) senza scienza (episteme), la dialectica de la persuasion scientifica » Stefanini, Platone, Vol. 1, p. 93).
23- R. Descartes, Discours, I, Edit. Gilson, Op. cit. p. 8, 25-29.
24- R. Descartes, Discours, I, Edit. Gilson, Op. cit. p. 6, 8.
25- R. Descartes, Discours, I, Edit. Gilson, Op. cit. p. 9, 19-23.
26- R. Descartes, Discours, IV, Edit. Gilson, Op. cit. p. 31, 26-30.
27- Il convient de rappeler que le processus du doute avait abouti à la négation de l’existence du monde : « Sed mihi persuasi nihil plane esse in mundo, nullum coelum, nullam terram, nullas mentes, nulla corpora » (R. Descartes, Méditations, A.T. VII, p. 11,18).
28- J.-B. Vico, De ratione, Op. cit. p. 91.
29- R. Descartes, Principia philosophiae, A.T., VIII, 1,5.
30- « At nostri critici, cum quid dubit iis oblatum est, illud respondent : ista de re sine cogitem – Ad haec, tota eloquentiae res nobis cum auditoribus est et pro eorum opinionibus nos nostrae orationi moderari debemus et natura ita comparatum est, ut saepe qui pollentissimis rationibus non moventur, iidem alique levi argumento de sententia diiciantur » (J.-B. Vico, De ratione, Op. cit. p. 82).
31- J.-B. Vico, Carteggio, XLXIX, a S. Estevan, Opera V, Laterza, Bari, pp. 215-216.
32- « Ma quell’enilisi veramente divina dei pensieri umani, la quale... ci guida sottilmente fil per filo entre i ciechi labirinti del cuore dell’uomo, che ne puo’ dare non già gl’indivinelli degli algebristi, ma la cerrezza, quanto é lecite unanamente, del cuore dell’uomo, senna la quale né la politica puo maneggiarlo, né l’éloquenza puo’ trionfare... » (J.-B. Vico, Carteggio, Op. cit. pp. 214-215).
« Nous connaissons la vérité, non seulement par la raison, mais encore par le cœur ; c’est de cette dernière sorte que nous connaissons les premiers principes, et c’est en vain que le raisonnement, qui n’y a point de part, essaye de le combattre » (B. Pascal, Pensées, 58).
33- J.-B. Vico, La polemiche, Opere I, Laterza, Bari, 1968, p. 275.
34- R. Descartes, Méditations, A.T. VII, 17.
35- R. Descartes, Méditations, A.T. VII, 18.
Rappelons que Descartes fonde le doute sur le fait que les connaissances vraisemblables sont « douteuses », « c’est pourquoi, je pense que j’en userai plus prudemment et, prenant un parti contraire, j’emploie tous mes soins à me tromper moi-même, feignant que toutes ces pensées sont fausses et imaginaires » (Méditations premières, A.T. IX,17).
« Je suppose donc que toutes les choses que je vois sont fausses ; je me persuade que rien n’a jamais été de tout ce que ma mémoire remplie de mensonges me représente... » (Méditations secondes, A.T. IX,19).