ANALYSE RÉFÉRENTIELLE |
Ennio FlorisIntroduction au séminaire théologique |
n séminaire théologique au sein du corps pastoral de l’Église n’est pas une innovation, car souvent les pasteurs se rassemblent au niveau consistorial ou régional afin de réfléchir ensemble à des problèmes théologiques qui intéressent la vie de l’Église. Le séminaire théologique n’a d’autre prétention que celle de donner à cette réflexion un caractère permanent, et à tous les pasteurs le moyen de s’y engager en raison de leur ministère pastoral. Car le pasteur est avant tout un théologien. On a coutume de considérer la théologie comme du ressort des professeurs de Faculté. On ne pense pas que la théologie universitaire est une réflexion théologique partielle, ne répondant pas à toute problématique de la foi. La théologie des facultés a pour objet la parole de Dieu en elle-même, en cherchant à connaître le contenu des Écritures dans leur objectivité universelle. Elle est une science, à savoir une connaissance absolue, universelle, abstraite de la Parole de Dieu. Mais la réflexion théologique ne s’arrête pas à cette synthèse scientifique. À côté d’une considération absolue et universelle de l’objet de la foi, il y a aussi la possibilité d’une considération particulière, relative à l’Église. Il ne s’agit pas de connaître ce que l’Écriture dit sur l’Église, car cette connaissance aussi serait universelle et scientifique, mais ce que les Écritures peuvent répondre aux besoins et aux interrogations de l’Église. Il s’agit, en d’autres termes, de saisir l’actualité de la parole de Dieu par rapport à l’actualité de l’Église. En effet, en dehors de son sens objectif universel, la Parole de Dieu possède une signification actuelle, selon l’actualité du temps, car elle est avant tout le langage de Dieu à l’homme dans l’histoire. Les théologiens, dès l’âge patristique, se sont beaucoup intéressés au problème des multiples sens de l’Écriture. On a cherché à distinguer le sens réel historique du sens caché allégorique, sans faire attention au fait que même le sens caché est profondément historique. Il en est de même de la Parole de Dieu. De même que Dieu accomplit sa révélation dans le présent successif, de même Sa Parole possède une signification qui dépasse la limite historique de l’instant qui s’écoule pour s’accomplir dans le présent qui vient. L’interprétation qu’on a donnée dans un moment historique déterminé n’a pas épuisé la signification totale des Écritures. Il reste dans celles-ci un sens caché qui sera manifesté dans le présent futur par Dieu lui-même. Ce que nous disons pour la Parole de Dieu aux prophètes est aussi valable pour la parole de Dieu en Christ. Le Seigneur n’a pas confié aux Douze un livre à mémoriser et à gloser, mais une parole à connaître par le Saint Esprit. C’est celui-ci qui traduit la parole du Seigneur selon la compréhension de notre cœur, qui l’interprète pour nous, qui la relève de son sens caché. Sans le Saint Esprit, les Écritures seraient un recueil de sentences aptes à nourrir une Synagogue, mais non à susciter le langage d’une Église vivante. La théologie scientifique cherche à saisir la signification universelle de la Parole en accordant les divers sens historiques reçus dans le passé, mais elle ne peut pas, précisément par son universalité et son abstraction, connaître la Parole en tant que réponse de Dieu à la souffrance et à l’interrogation du présent. Pour parvenir à cette connaissance, il faut dépasser l’analyse scientifique pour atteindre l’inspiration de Dieu. Les yeux ouverts sur les Écritures, l’âme dans l’attente du Saint Esprit, notre réflexion aboutira à une théologie, qui sera marquée par un caractère prophétique. Théologie scientifique et théologie prophétique, les voilà les deux connaissances où la réflexion théologique doit s’accomplir et s’intégrer. Il existe dans l’Église une crise, quelquefois très aiguë, entre les deux théologies. Ces accusations réciproques amènent souvent à une rupture entre les Facultés et le corps pastoral : alors il en résulte que les pasteurs cessent d’étudier une théologie qu’ils ont mal faite, et que les professeurs s’éloignent de plus en plus de la vie concrète de l’Église. Heureusement, tous les professeurs ne se ressemblent pas, de même que tous les pasteurs n’ont pas fermé les portes de leur presbytère à la théologie. Il faut cependant confesser que les pasteurs et les professeurs commettent une erreur fondamentale dans leurs accusations réciproques. Ce charisme demande cependant que les pasteurs soient unis dans la communion fraternelle. Le Saint Esprit est un souffle communautaire, qui saisit l’individu dans l’Ecclesia, à savoir dans la communion fraternelle. Étant unis par le même ministère et par la même situation d’existence, il faut que nous soyons unis dans la recherche biblique et dans l’attente du Saint Esprit pour l’Église d’aujourd’hui. L’effort des isolés, bien que toujours louable et souvent remarquable, aboutit à la solitude et à l’individualisme le plus stérile. Ensemble, nous pouvons partager nos expériences et celles de nos Églises, nous pouvons situer notre recherche dans le présent de notre siècle et dans la présence de Celui qui vient. Le séminaire théologique doit avoir pour tâche de nous unir dans cette recherche et dans l’attente du Saint Esprit. Il ne s’agit pas de constituer une association, ni un centre d’étude, mais seulement de nous unir pour l’interprétation des Écritures, afin de trouver dans celles-ci leur sens pour l’Église d’aujourd’hui. Il s’agit de situer l’Église dans la Parole de Dieu. L’Église souffre d’un manque de théologie, et plus encore d’un manque d’actualité dans sa parole et dans ses structures. L’Église catholique romaine envisage de résoudre le problème en constituant des Commissions permanentes, qui ont la tâche de fixer aux théologiens, aux exégètes et aux historiens la limite de tolérance dans l’interprétation de leur foi. Nous ne pouvons pas accepter des Commissions, car nous estimons que leur tâche nous appartient. S’il y a un jugement à prononcer, le Séminaire théologique représente ce jugement continuel de l’Église sur elle-même, par rapport à la parole de Dieu. Notre réflexion doit intervenir toutes les fois qu’il y a une crise dans l’Église entre sa tradition et son présent, ce qu’elle est et ce qu’elle est appelée à être, son langage et son existence, son message et ses institutions, sa foi et ses hommes. Le Séminaire théologique nous réunit pour nous juger et pour nous renouveler dans la Parole. En nous jugeant, il représente aussi la continuation de cette Réforme dont notre Église porte le nom. Le temps amène l’Église à devenir institutionnelle, résidentielle, synagogale. Même la Réforme, si on la considère comme déjà acquise, n’est plus une réforme mais une institution. La Réforme est un processus spirituel et historique qui ne s’accomplit jamais, parce que jamais Dieu ne cesse de se rendre présent dans l’histoire. Le Séminaire théologique tend à réformer l’Église dans l’actualité de la Parole. Le Dieu qui vient, Yahvé, veut une Église qui vient et qui se renouvelle dans sa Parole. Un dernier mot sur la méthode du Séminaire. Sans doute nous chercherons une technique, la plus convenable, pour nos recherches de même que pour nos séances. Toute méthode doit cependant être subordonnée à la prière communautaire. Ce que nous cherchons, la Parole de Dieu comme réponse à l’Église d’aujourd’hui, ne peut pas être l’effet d’un raisonnement, mais le fruit du Saint Esprit. Notre recherche doit ressortir de la Communion fraternelle. Le parfait amour nous pousse à partager nos expériences et nos recherches, de même que nos sentiments et notre service. C’est par ce partage que nous parviendrons à l’unité de la pensée, car nous serons un dès le commencement. |
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t538000 : 07/12/2017