ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris



Le  sourd  bègue



Marc 7: 31-37




Ultimes réflexions







Le texte

Prologue

Regard analytique

Regard critique

Ultimes réflexions




   Résumons brièvement le récit. Il s’agit de la guérison par Jésus d’un malade, qu’on peut classer parmi les sourds-muets. Jésus l’examine afin de connaître ses maux, et le guérit par sa parole : « Ouvre-toi ». Le sourd muet entend et parle correctement, et tout le monde loue le Seigneur et exalte le pouvoir qu’il a donné à Jésus.
   Le récit paraît donc simple, comme tout récit de miracle de guérison. Mais l’analyse que nous venons d’en faire montre au contraire qu’il est tellement compliqué, pour ne pas dire complexe, qu’il nous serait impossible de trans­poser l’action du récit à la réalité sans le soumettre à de profondes modifications. En effet, aussitôt qu’on tente d’accomplir cette opération, la trame du récit se dissout, en ce que les unités qui le constituent se détachent d’entre elles et se dédoublent, nous renvoyant à deux récits.

   Le redoublement apparaît avant tout dans la personne du malade lui-même. En effet, ce n’est pas vraiment un sourd-muet, mais un homme qui entend mal et parle péni­blement, un sourd bègue donc. Mais en mettant les deux mots l’un à côté de l’autre et en les liant par un tiret, le correcteur de mon ordinateur considère que j’ai commis une erreur d’écriture. Pourquoi ? Parce que la langue n’a pas envisagé ce cas, ou parce qu’on n’a jamais trouvé qu’un homme aux oreilles dures soit aussi bègue, comme il peut bien être sourd-muet ? On peut sourire, mais la lan­gue est toujours sérieuse.
   Le jeu du couplé continue. Jésus ne soigne pas le sourd bègue et l’exhorte à se soigner par lui-même, mais aussitôt il le guérit par sa parole. Cette parole est un impératif : « Ouvre-toi ». Or le sens de cette parole est double, parce qu’elle s’adresse à deux destinataires : la personne du sourd bègue, et la maladie dont il est affecté et qui l’en­ferme.
   Il s’ensuit que Jésus lui aussi agit comme un sujet dou­ble : en homme et en Fils de Dieu ! Rappelons encore une fois ce que Jean affirme à la fin de son évangile : « J’écris ces choses pour qu’on croie que Jésus est le Christ, le fils de Dieu » (Jn 20:31). Pour qu’en lisant les évangiles, on croie que le Jésus qui en est l’objet est le Christ, il faut bien qu’ils le présentent comme tel. Dès lors, Jésus aussi est sujet double : il est un homme et il est Dieu. Il n’est pas étonnant que dans le récit, qui est une page de l’évangile, il puisse agir à la fois en homme et en Dieu.
   Mais en rapportant le problème d’un des chapitres de l’évangile à la totalité de leur récit, on comprend bien qu’on ne le résout pas mais qu’on le déplace seulement. Le doublement de Jésus prend en effet une puissance de contradiction telle qu’elle défie la raison. Ainsi, à la lecture du chapitre de sa naissance, nous trouvons un enfant con­çu dans le sein d’une vierge fécondée non par un homme mais par Dieu qui, par surcroît, s’incarne en lui. Dans sa mort, nous trouvons un homme condamné pour avoir cherché à abolir dans le temple l’autel du sacrifice expia­toire par le sang des animaux, mais qui offre sa mort en expiation des péchés des hommes. En vain ses disciples vont au tombeau pour son onction, car il n’est plus là, mais ils se réjouissent de son enlèvement parce qu’ils le croient ressuscité…



   Je pose une question à mes lecteurs : doit-on s’arrêter de penser pour croire, ou mettre entre parenthèses la foi pour continuer à penser ?






Le 18 août 2008




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