Sommaire
Avertissement au lecteur
Introduction
Le Christ et les Écritures
La foi en Jésus-Christ
Le Christ selon les apôtres
- L’annonce du Christ
- Trahison et meurtre
L’action des apôtres
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L’annonce du Christ
Les apôtres ont cru que Jésus était le Christ parce qu’ils en avaient trouvé en lui les signes, à la lecture des oracles du « Serviteur de l’Éternel » d’Isaïe. Rappelons le message de ces oracles.
Le « Serviteur de l’Éternel » est décrit comme l’homme que tout le monde considère comme coupable de fautes pour lesquelles il mérite le mépris et la mort. Il meurt dans les souffrances les plus atroces et est enseveli parmi les méchants. Or il est innocent, s’étant livré lui-même à la mort pour racheter par son sacrifice les péchés de plusieurs, c’est pourquoi Dieu le rappelle à la vie pour le rendre puissant parmi les puissants du monde.
Qui est ce « Serviteur de Dieu » ? Sans doute le peuple, que Dieu a élu et béni afin que « les nations de la terre soient bénies dans sa postérité » (Gn 22:18), et que le prophète voit maintenant en exil, humilié, esclave, blessé à mort. Mais pourquoi en célèbre-t-il les peines ? Est-ce pour donner au peuple déporté une bonne nouvelle de consolation et d’espérance, ou pour lui révéler l’événement attendu, l’accomplissement par ses souffrances et sa mort des bénédictions que Dieu lui avait données à sa naissance ?
La plupart interprétaient le message comme ne concernant que le peuple. Dieu voulait l’assurer qu’il ne subissait pas ces maux en punition de ses propres péchés, mais en sacrifice pour les péchés des injustes qui lui étaient imputés, afin que tout le monde puisse parvenir à l’accomplissement des promesses. En effet l’oracle précise que, « après avoir livré sa vie en sacrifice pour le péché, il verra une postérité et prolongera ses jours » (Is 53:10) et solennellement, Dieu ajoute : « C’est pourquoi je lui donnerai sa part avec les grands, il partagera le butin avec les puissants, parce qu’il s’est livré lui-même à la mort et qu’il a été mis au nombre des malfaiteurs » (Is 53:12).
Pour d’autres, le prophète annonce par le biais des souffrances du peuple, le dernier né de la génération d’Abraham, le Christ, en qui Dieu accomplira les bénédictions données au commencement. C’est lui qui, par le sacrifice de sa mort, libèrera les hommes du péché. Mais qui peut expier les péchés des autres, sinon celui qui est sans péché ? Puisque tout homme est pécheur, seul Dieu ou le fils de Dieu peut racheter les hommes du péché. Ainsi la « postérité » qui, selon l’oracle, doit conduire le peuple à l’accomplissement des promesses est le fils de Dieu.
On trouve l’annonce de ce Christ, d’un façon voilée, dans l’énoncé de la bénédiction de Dieu, dès lors qu’on la met en parallèle avec la malédiction qu’il jeta à Adam : « tu es poussière et tu retourneras dans la poussière » (Gn 3:19). Dieu bénit Abraham, père de la nouvelle génération, afin de la ramener à la condition d’existence des origines perdue par le péché. Ainsi, par le partage du « butin » avec les grandes puissances du monde, le « Serviteur de l’Éternel » reçoit un pouvoir de royauté divine sur la terre.
Pierre et les apôtres crurent que leur maître, Jésus, était le Christ, parce qu’ils reconnurent en lui la personne du « Serviteur de l’Éternel ». Ils ne le crurent pas de son vivant, en vertu de son charisme prophétique ou de ces « signes, prodiges et miracles » qu’il avait ouvertement accomplis selon les évangiles, mais de sa mort sur la croix. Ils étaient persuadés que sa vie ne présentait aucun délit qui eut pu la justifier, il était donc innocent. S’il avait souffert ces souffrances et cette condamnation, c’était pour les péchés des autres.
Cette conviction les conduisait à regretter qu’à la fin de leur vie en commun avec lui, non seulement ils n’avaient pas cru à son prophétisme, mais s’étaient scandalisés de lui et l’avaient renié. Ils furent surpris de trouver dans les Écritures l’annonce de leur reconnaissance et de leur reniement : « et nous l’avons considéré comme puni, frappé de Dieu et humilié, mais il était brisé pour nos péchés, brisé pour nos iniquités » (Is 53:3-4). Ainsi leur péché à l’égard de leur maître devenait une preuve que Jésus était ce Serviteur annoncé par le prophète.
Et les juifs ? Puisqu’ils avaient jugé Jésus passible de mort et l’avaient livré au procurateur romain, ils étaient devenus meurtriers du Christ. Ainsi cette génération d’Abraham que Dieu avait bénie en vue du Christ, au lieu de croire en lui l’avait tué ! Paradoxe de l’histoire, ou de la parole de Dieu ? Ou ultime révolte de l’homme pécheur contre Dieu, accomplisse son œuvre de salut ? Et dans celle-ci, dernier combat du judaïsme pour empêcher que l’héritage des pères tombe aux mains des non-juifs, des impies, des païens ?
Les premiers croyants se posèrent ces questions, mais comment pouvaient-ils y répondre si l’oracle du prophète leur assurait que tout ce qu’on avait dit du Serviteur et donc du Christ était faux, puisqu’on l’avait considéré comme pécheur alors qu’il était innocent ? En se rappelant leur propre expérience de Jésus, ils ne pouvaient dire de lui rien d’autre qu’il était un pécheur, un bâtard et un possédé des démons, un transgresseur de la Loi et un blasphémateur, un faux prophète et un séducteur du peuple, un samaritain et un violeur du temple et du sacrifice. Quant aux juifs qui l’avaient condamné, ils ne pouvaient que témoigner de leur sincérité et de leur honnêteté.
L’Écriture qui le révélait Christ obligeait donc à renier l’expérience qu’on avait eue de lui, ainsi que les jugements des juifs qui l’avaient condamné. Mais comment résoudre l’énigme de cette expérience ? Quel Jésus fallait-il opposer au pécheur condamné par la loi ? Il ne restait qu’à nier les faits pour les rétablir par les Écritures elles-mêmes. Le Christ n’était pas un phénomène d’expérience, mais un événement révélé par la parole de Dieu, et puisque les oracles du « Serviteur de l’Éternel » ne disaient rien de ceux qui l’avaient tué, il fallait parcourir tout le récit des Écritures pour trouver ceux qui avaient des analogies avec les faits.
Les mêmes recherches s’imposaient également pour répondre aux questions qu’ils s’étaient posées sur Judas. Pourquoi le Christ avait-il dû être trahi par un de ses disciples ? Et puisque tout ce qui le concernait avait été prédit par les Écritures, où les apôtres ont-ils trouvé l’annonce de cette trahison ainsi que les faits permettant de la reconstituer dans leur témoignage ?
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