Sommaire
Introduction
Situation actuelle de l’herméneutique biblique
Herméneutique et critique du langage
Structure anadygmatique du discours
- Introduction
- Synthèse conceptuelle
- Synthèse symbolique
- Synthèse historique
- Dialectique du pensant
- Symbole et être
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Le symbole et le problème de l’être
La découverte du symbole comme langage m’a ouvert aussi des perspectives pour la compréhension du problème de l’être, qui reste au fond de mes méditations. Y-a-t-il de l’être dans le symbole ? Et, puisque le symbole est à la source de l’intentionnalité, quelle est son étendue ? Prétend-t-il atteindre, comme de biais, au moyen du « je suis », l’étant, le « To on » ? Le symbole est-il révélant, ou bien rien d’autre que projection, miroir du sujet ?
Si le symbole est langage, il est tout d’abord une langue. À ce niveau, nous devons nous interroger au sujet des structures fondamentales qui régissent l’articulation de son signifiant ainsi que celle de son signifié. Or, si nous jetons un coup d’œil sur ses formes, nous trouvons qu’elles se structurent sur la base d’une relation oppositionnelle sur l’axe « arke – eskaton ». L’image du soleil qui monte et se couche, de la semence qui meurt et renaît, le cycle des saisons, l’arbre, l’eau source jaillissante, la course des étoiles, etc. toutes ces images deviennent symboliques en ce qu’elles sont placées sur l’axe de l’opposition commencement et fin. Mais ces mêmes relata correspondent au dualisme qui envahit le champ du vécu ainsi que l’acte d’exhausser, qui se place entre le « ex » et le « ad ».
À la différence des autres langages, où signifiant, signifié et personne sont dans des structures différentes, le symbole s’unifie dans tous ses niveaux dans un seul rapport structural.
Si nous poussons notre réflexion dans d’autres champs de recherche, nous constaterons aussi que la même relation oppositionnelle préside aux discours sur l’être et sur Dieu. Quel est l’objet ultime de toute recherche sur l’étant, sinon celle concernant l’arké et le télos de tout ce qui est ? Et la théologie ne s’occupe-t-elle pas de Dieu en tant que commencement et fin de l’univers, Alpha et Oméga ? Ces deux termes marquent donc les limites du pensable ainsi que du croyable, en même temps que de l’existant et de l’imaginatif.
Les découvrir maintenant comme termes d’une opposition – relation transcendantale met tout d’abord en cause toute tentative métaphysique qui veut les interpréter comme aspect de l’absolu au niveau ontologique. La même considération met en question l’explication de la relation du « ex » aux étants par le principe de causalité. Placés comme rapport structure d’une langue, l’Alpha et l’Oméga ne peuvent être pensés que comme valeurs transcendantales oppositionnelles. Le « ex » n’est pas un absolu mais un « en soi », une opposition relationnelle saisissable par le « ad », et vice-versa.
Le symbole n’est pas seulement une langue, mais une langue en situation de parole. En raison de l’unicité de structure entre signifiant, signifié et sujet qui parle, on doit dire que l’opposition relationnelle du signifiant n’est pas une valeur formelle pure et vide, mais une valeur chargée de signification. Il ne s’agit pas d’un rapport comme entre « a » et « c », valeurs pures qui doivent être insérées dans un processus de signification, mais d’une valeur dense, chargée de sens, sémiologique en même temps que sémantique.
De plus, puisque ce sens est aussi structure du sujet qui parle, l’homme, il devient parole. Parole dans la mesure où il est une relation oppositionnelle dans l’existence du sujet, où il est non seulement instance du signifié abstrait, mais première instance syntagmatique qui rend possibles tous les syntagmes du sujet. En d’autres termes, je dirai qu’il s’agit d’un signifié qui est en dynamique, en processus de signification.
Le témoin de ce passage de la langue à la parole est l’homme lui-même, car son surgissement du « ex » témoigne que le rapport signifiant entre « ex » et « ad » n’est pas statique. En effet, l’être-là de l’homme semble montrer du doigt que le « ex » n’est pas un tombeau rempli de morts, mais un tombeau vide qui s’ouvre pour faire sortir le vivant, les significations des faits et des formes passés qui se réalisent en sens. « Ex » donc au sens de venir de, de source, de nuit d’où point l’aube.
Peut-on saisir cette parole ? Peut-on la voir avec les yeux de la raison, la définir par le concept ? Peut-on dire d’elle, comme le Dieu de la Bible de lui-même, qu’on n’en peut voir que l’ombre ? Malheur quand l’homme est tenté de la définir par des concepts ! Cette parole devient alors une chose, et une chose tellement vaste qu’elle remplit tout l’espace du pensable et de l’imaginable, un Kronos qui dévore tous les éons du temps !
Son être est son apparaître, on s’aperçoit d’elle par son témoin. On peut chanter, exprimer son apparition par tout ce qui meurt et ressuscite, par le jaillissement d’eau ou de lumière, par la poésie et la praxis.
L’interprétation du symbole ne pourra amener qu’à l’existence. Il s’offre comme une signification prête au sens, et il n’y a de sens que dans l’exister de l’homme. Toute métaphysique, toute mystique – même cette métaphysique ou cette mystique qui se déguisent en existence – ne font que nous aliéner de la signification du symbole. Lorsqu’on le parle, on est comme une femme enceinte : on ne doit rien faire d’autre qu’accoucher cet enfant, cette signification dans le sens.
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