ANALYSE RÉFÉRENTIELLE
ET ARCHÉOLOGIQUE
Ennio Floris
Le message d’Adam
Gn 2:
23-24
Aperçu sur le statut du mariage
Sommaire
Introduction
L’intrigue
du récit
Le sens
du message
Le statut du mariage
-
Le
Deutéronome
-
Les tentatives de réforme
Le sens
du codicille
. . . . . . . . - o
0
o - . . . . . . . .
La réforme prophétique
Dans cette période de réforme, un
prophète, appelé dans son message
Malachie, critiqua ces mariages, moins parce que les
juifs se liaient avec des femmes étrangères que parce
qu’ils étaient infidèles aux femmes dont ils s’étaient séparés
(1)
.
«
Vous couvrez de larmes l’autel de
l’Éternel, en sorte
qu’il n’a plus d’égards pour vos offrandes, et vous dites : pourquoi ? Parce que
Dieu a été témoin entre toi et la femme de ta jeunesse, à laquelle tu es infidèle bien qu’elle soit la compagne et la femme de ton alliance… Ne sois pas infidèle à la femme de ta jeunesse, car je hais la répudiation, dit
l’Éternel
» (
Ml 2:
13-16
).
Les paroles de
Malachie n’étaient pas nouvelles, mais elles mettaient en évidence une conception du mariage qui allait au-delà des limites de sa pratique traditionnelle. Moraliste et prophète,
Malachie puisait l’essence du mariage dans les pères, mais moins dans leur pratique que dans la vision de la foi qui les avait inspirés.
Rapportons-nous à la troisième manifestation divine à
Abraham, celle sous les chênes de
Mamré.
Dieu promet à
Abraham que
sa génération sera aussi nombreuse que les
étoiles du
ciel, et cette fois
il vient en personne, accompagné de
deux personnages. Après
qu’ils aient reçu
d’Abraham l’accueil dû aux hôtes, «
ils
lui dirent : Où est
Sara, ta femme ?...
L’un d’entre eux
(Dieu)
dit : je reviendrai chez toi à cette même époque : et voici,
Sara ta femme aura un fils ».
Sara, qui se trouvait derrière le seuil de la tente, rit en se disant « Maintenant que je suis vieille, j’aurais encore des désirs ? »… Mais
Dieu dit à
Abraham « Pourquoi donc
Sara a-t-elle rit ? Y a-t-il quelque chose qui soit étonnant de la part de
Dieu ? Au temps fixé je reviendrai vers
toi à cette même époque, et
Sara aura un fils
» (
Gn 18:
1-15
).
Dieu était témoin du mariage
d’Abraham,
il l’investit de ses promesses et
il reste présent jusqu’à ce qu’elles soient accomplies. Ce mariage ne doit pas rester une simple cohabitation, mais s’accomplir par le « désir d’amour » et l’union sexuelle.
Les époux sont vieux, mais
Dieu les rend féconds comme des jeunes. Ainsi
Sara devient la femme de sa jeunesse, sa compagne d’amour et d’étreinte, et mère féconde. Mais puisqu’en
elle s’accomplit par miracle la promesse de
Dieu et le mariage,
Sara devient témoin de l’alliance que
Dieu a établie avec
Abraham et toute
sa descendance.
Abraham reste lié à
elle, la femme de sa jeunesse témoin de son alliance, autant que dure l’alliance de
Dieu.
Ainsi le mariage que
Dieu a établi par sa parole n’est pas celui du code mosaïque, mais celui
d’Abraham et
Sara, mariage qui ne pourrait être brisé par le divorce sans rompre en même temps l’alliance dont il est l’image. Les paroles que
Dieu met dans la bouche de
son dernier prophète sont un bouleversement pour les
juifs de retour à
Jérusalem : «
Je hais la répudiation
» (
Ml 2:
16
).
Si, comme pédagogue,
Malachie dialogue avec ses contemporains, comme
prophète
il est tranchant dans son discours, n’acceptant aucune discussion car
il a conscience d’énoncer une parole de
Dieu ;
il a le ton, la véhémence et la radicalité
d’Osée. Son affirmation est un coup d’épée contre l’éthique du mariage juif, épée qui coupe la tête au « maître » de ce mariage, le mâle qui, par son bon plaisir, a le pouvoir d’attirer la femme, de la faire sienne, de la soumettre à son service et de la renvoyer sans qu’elle puisse réagir.
Mais un mariage où l’homme n’est plus le « maître » ne peut être que l’écho de celui qu’avait annoncé
Osée, le premier des
prophètes, dont voici un résumé du message.
Dieu avait établi avec la «
fille d’Israël » une alliance, sur la base du mariage traditionnel :
il était « le marié », qui agissait en « maître » (
bahal
). Mais comme
sa femme s’est prostituée,
il a cherché à l’attirer par l’amour et non par le pouvoir du maître.
Il l’appelle donc, comme un amant, au
désert pour
qu’elle l’aime, et
il l’assure
qu’il renonce à être « maître » pour n’être en relation avec
elle que comme « fiancé ». Dès lors son alliance change, car
il effacera de la terre le mot de « Bahal », et donc la haine et la guerre (Os 2).
Osée parlait du mariage allégorique de
Dieu avec
Israël, mais si ce mariage fait à l’image du mariage juif changeait dans son essence, l’essence du mariage juif elle aussi en était changée.
Dieu ayant effacé le mot « maître » du langage, l’homme n’est plus le maître du mariage, la responsabilité sera partagée entre l’homme et la femme.
Malachie se situait bien dans le sillage du message
d’Osée.
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(1) Voir l’étude d’Ennio Floris
Jésus rejette la loi sur le divorce
(2001).
c 1975
t855320 : 09/03/2019