ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris



La  création  de  l’homme



Genèse 1: 26-28




Analyse du récit :



2- Le projet de la création de l’homme



Magnum Dictionarium latinum et gallicum, de P. Danet, MDCXCI





Sommaire

Les textes

Analyse du récit
Le contexte
Le projet
L’événement

Reconstitution du     mythe originel
Indices de censure
Le texte mythique

Regard critique d’ensemble


ieu dit : faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance ».

   « Faisons ». Élohim s’adresse à lui-même par un « nous » de majesté, où il se pose en créateur souve­rain. Le « nous » était employé dans le cérémonial royal des Cours. Mais puisque le mot « Élohim » est un pluriel, il est tentant de considérer ce « nous » comme issu d’une narration mythique, où le divin est un couple, qui ne peut produire de l’être que par géné­ration. Ce récit primitif a été donc repris et en partie démythifié, puisqu’« Élohim » est ici un Dieu qui n’en­gendre pas mais qui crée l’homme.

   Il importe donc de savoir comment l’homme, à l’image de Dieu et selon sa ressemblance, n’a pas été engendré par lui.


Mais avant d’aborder directement cette question, il convient de se demander si « être fait à l’image de... », et « être fait selon la ressemblance de... » n’ont pas eu la même signification.

   Le texte hébreu les distingue par des mots différents, « selem » pour « image » et « demout » pour « res­semblance ». Ainsi « être à l’image de Dieu » et « être selon sa ressemblance » ne signifient pas la même chose. Pour en comprendre la différence, inutile d’aller bien loin, il suffit de considérer notre propre lan­gage. En effet, nous reconnaissons qu’un portrait est à l’image d’une personne, sans être ressemblant pour autant. Aussi, nous arrive-t-il de dire qu’un enfant qui ne ressemble pas à son père ou à sa mère, est à leur image. L’image se rapporterait à une commune struc­ture, alors que la ressemblance toucherait à l’indivi­dualité ; en sorte qu’on peut reconnaître, sinon voir, l’un dans l’autre, dans un reflet.

   Utiles pour la compréhension du texte, ces remar­ques restent insuffisantes, parce que la relation entre Dieu et l’homme ne s’inscrit ni dans une genèse à la manière du fils avec son père, ni dans l’art, comme une œuvre ou un modèle. Mythique dans sa représentation, le texte affirme cependant que Dieu crée. Mais puisque la création serait une production du néant, il semblerait que ce néant même séparerait l’objet créé de son créateur. Pourtant, il n’en est rien, car la création dé­passe ce néant et replace l’objet dans la dimension de l’être. Il existe donc une distance entre le créateur et la créature et non une rupture par le vide.

   On peut affirmer que cette question, de caractère métaphysique, n’est pas pertinente pour cette recher­che, qui se veut exégétique. Mais le texte, s’il est mythique dans sa représentation, est métaphysique dans l’affirmation d’un Dieu créateur. La question de­meure donc entière.

   En questionnant ceux qui ont réfléchi à ce problème, surtout à l’instant du passage culturel de la représenta­tion mythique de Dieu à sa compréhension comme cré­ateur, on peut affirmer avec Thomas d’Aquin que la relation entre Dieu et l’homme s’inscrit dans l’analogie de l’être. L’homme est à son existence ce que Dieu est à la sienne : il est un sujet. Mais alors que Dieu est sujet comme raison de son être, l’homme l’est en ayant son être comme raison. Dès lors, Dieu existe parce qu’il est, l’homme est parce qu’il existe. En Dieu le « je suis » recouvre l’être Ex 6: 3 ) ; en l’homme, l’être recouvre le « je suis ».


Revenons au texte. Dieu veut créer l’homme à son image et selon sa ressemblance, parce qu’il le destine à assujettir et gouverner ce monde qu’il a créé. Mais pour cela l’homme doit revêtir une nature, par laquelle l’être devient norme universelle de sa connaissance. Cet être qui est en Dieu l’a priori de sa connaissance, resplendit dans l’homme par l’a posteriori de son intuition et de sa raison.

   Mais si sa nature est telle, l’homme existe comme un Dieu dans le monde, parce qu’il l’ordonne en ayant pour norme l’être, dont Dieu l’a doté.

   Cette spécificité de l’homme nous aide à compren­dre pourquoi le récit de la Genèse ouvre une pause dans l’œuvre de création du monde, pour que Dieu entre en lui-même, et puise dans sa subjectivité les rai­sons d’un être à son image et à sa ressemblance.




Le 10 février 2002




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