ANALYSE RÉFÉRENTIELLE |
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Ennio FlorisProméthée et Jésus : |
Deuxième partie : |
Sommaire Introduction Dieu, le Sauveur et la mort Le mythe d’Io et l’évangile de Marie - Dieu et la vierge - La fortunée et la graciée - Le souffle et l’esprit - Les persécutions - Les naissances - Les vierges - Épaphos et Jésus - Prométhée et Siméon . Le temps présent . Le temps du salut Conclusion théologique . . . . . . . - o 0 o - . . . . . . . |
Le temps présentProméthée, en même temps Les hommes bénéficient du feu que le dieu leur a apporté et du bonheur de la civilisation, sans pour autant entrer directement dans le jeu de la rédemption. Celle-ci se développe entre les dieux, dans un temps et une dimension qui sont divins. Prométhée est l’expression de ce temps et de cette dimension. Il est cloué au rocher depuis des centaines et des centaines d’années, dans un temps qui possède un passé et se projette dans le futur, mais qui ne s’insère pas dans le présent. La lutte des Titans, la condamnation des hommes et leur vie d’êtres sauvages, l’apparition du feu, le cheminement des mortels vers la civilisation de l’art et de la culture, tout cela constitue le passé dont Prométhée seul connaît la signification, et dont il est en même temps l’image. Mais le dieu possède aussi la connaissance du futur, la connaissance de la délivrance de ses chaînes, de la conversion de Zeus à l’amour et à la justice, de l’établissement pour les mortels d’une vie durable dans la paix et la justice, leur cheminement vers l’immortalité. Ce que Prométhée ne connaît pas, c’est le présent. Cloué entre le ciel et la terre, il est en-dehors de la communauté des dieux et des humains, dans une dimension spéciale exprimée précisément par sa personne. En tant que Titan, faisant partie d’une race divine déchue de son trône royal, il n’est plus à proprement parler un dieu, cependant il n’est pas pour autant un homme, et le temps où les événements qui le concernent se sont déroulés est conforme à cette dimension : ni divin ni humain, mesure immanente à sa personne, synthèse du passé et du futur qui s’opère dans la foi en une parole qu’il a reçue de sa mère, mais non dans l’événement du présent historique. C’est le temps mythique propre à la divination, où le passé est rendu compréhensible et connaissable par le futur, tandis que le futur est seulement soutenu par l’attente du passé. C’est pour cela que Prométhée rappelle aux Danaïdes ses exploits passés en faveur des hommes, et qu’il jette un regard divinatoire sur le futur, mais qu’il reste muet sur le présent, sur ce qui se réalise chez les dieux ou chez les mortels en rapport avec ce passé et ce futur. Io, de son côté, apparaît sur la scène comme une folle, saisie et bouleversée par l’événement du présent et aveugle par rapport au passé et au futur. Elle ne connaît pas Prométhée, ni ses exploits pour les hommes. De plus, elle ne sait pas pourquoi Zeus l’a violée, ni quand elle enfantera, ni quel rôle son enfant jouera dans le monde. Cachée sous l’enveloppe d’une génisse, elle ne connaît que son présent, l’événement qui est en elle, l’enfant encore invisible au monde. Elle est l’expression du fait historique en tant que phénomène du temps, mais dépourvu de signification. C’est le présent qui n’a pas conscience de lui-même, car il ne sait pas d’où il vient ni où il va. De même que, par la figure de Prométhée, Eschyle exprime le temps du mythe qui est dimension des valeurs, de même par la figure d’Io il veut représenter le temps de l’histoire, la dimension des faits. En Prométhée, c’est la réalité du divin qui s’exprime, source de vérité pour les hommes, raison universelle qui justifie l’origine et le but de la vie humaine. Mais cet ordre est, lui aussi, représenté par un devenir où le passé cède la place au futur sans s’arrêter jamais, sans être jamais un présent. Il est par conséquent une mort continuelle, l’angoisse de l’existence. Tel est Prométhée crucifié. Io est l’image de l’humanité saisie jusqu’à la folie par la découverte propre au présent. Par Io, Eschyle exprime la fureur de son siècle, bouleversé par la science de la nature, ouvert au progrès ; siècle d’hommes qui vivent du présent, qui ne se préoccupent ni du passé ni de connaître les conséquences futures du moment historique qui est le leur. Cette humanité est comme une femme folle, parce qu’elle ne connaît pas l’origine de son présent, qui la fait vivre, ni la divinité de tout ce qui la rend féconde, à savoir la science et la technique, la culture et la philosophie, la justice et le bonheur. Deux dimensions, deux temps, celui des dieux et celui des hommes, l’ordre des valeurs et la succession des faits, comme deux lignes qui ne semblent pas destinées à se rencontrer. La rencontre entre Io et Prométhée est la convergence de ces deux lignes, l’insertion du présent dans le passé et le futur, la conjonction du passé et du futur dans le présent. L’œuvre de rédemption entre dans la dimension de l’histoire, en même temps que celle-ci est entraînée dans le plan du salut. Par la présence d’Io, Prométhée reçoit la connaissance du présent, car la grossesse de la jeune-fille est signe qu’une race nouvelle est en train de naître, celle qui aboutira à la délivrance, et par laquelle la toute-puissance de Zeus se changera en une manifestation de justice et d’amour. Par Io, le mythe s’inscrit dans l’histoire, les valeurs éternelles s’incarnent dans la réalité des hommes, un nouveau temps naît, le temps de l’histoire du salut. La personnification du temps ne sera plus Prométhée, mais l’enfant d’Io, qui est signe de naissance, de résurrection par rapport à la mort du dieu souffrant. Celui-ci peut maintenant mourir et disparaître dans l’abîme de l’Adès, car les valeurs du passé et du futur, dont il était chargé, sont transférées à la personne d’Épaphos. C’est la raison pour laquelle le fils de Zeus naîtra au moment où Prométhée sera jeté dans les ténèbres de la terre. Héritier du passé, maître du futur, l’enfant d’Io viendra réaliser le plan d’amour, non plus par la souffrance et la mort, mais par l’action et la vie. De même les hommes, appelés souvent « éphémérides » précisément parce qu’ils vivaient uniquement du présent, reçoivent de l’enfant né d’Io la signification de leur existence. Ce présent, pour lequel ils étaient fous, c’est l’aboutissement d’un passé d’attente et de souffrance, de même que le commencement d’un futur de délivrance, vers la justice et l’amour. |
![]() ![]() ![]() ![]() t920810 : 08/02/2021 |