e rapporteur au Synode d’Avignon (Actes, 1969, p.205) a mentionné le caractère « très rigoureusement christologique » de ce second Texte d'accord A.
2.1- Le « fondement »
du baptême A
Ce concept indique explicitement que la base du baptême est un donné notionnel, un postulat idéologique à partir duquel seront déduits les attitudes et les comportements. Ce donné notionnel est, d’ailleurs, implicitement relié au concept d’autorité de l’Écriture comme « Parole de Dieu » A.
Par ailleurs, ce concept de base du baptême sous-entend aussi la notion de transcendance, et présente un caractère sacré et religieux, défini par ceux de substitution et de médiation. Ce second Texte d’accord comporte ainsi les expressions significatives du sacré et du religieux. Le sacré est exprimé par les formules : « notre Seigneur Jésus-Christ » A, « le serviteur de l’Éternel » A, « l’obéissance à son Père » A, « l’élévation dans la gloire » A. Le religieux par les formules : « il prend... la place des hommes pécheurs » A, « les faire entrer... dans la communauté de ceux qui sont fils et serviteurs » A, « au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit » A, « l’achèvement de son œuvre rédemptrice » A, « l’Esprit qui était descendu sur lui » A... Une des caractéristiques du religieux est aussi l’amalgame de notions situées à des niveaux différents de référence.
Ce Texte d’accord pratique une « historisation » de notions distinctes : il parle d’« étapes d’un même événement » A, faisant ainsi l’amalgame entre la mort (fait historique) et la résurrection ainsi que l’effusion de l’Esprit (des mythes et des symboles). Il considère qu’il y a là trois faits objectifs indiquant les trois moments historiques successifs d’un même événement. Cette ambiguïté du concept d’histoire fait partie de la « croyance de base », du postulat fondamental et indiscutable.
Ces deux aspects de « sacralisation » et de « religieux » se complètent pour établir le fondement idéologique, ce que le rapporteur du Synode national d’Avignon a appelé le « caractère christologique » de ce Texte d’accord.
La sacralisation
La sacralisation porte, en effet, sur un personnage sacré, le « Christ » (« notre Seigneur Jésus-Christ » A) qui est une expression à la fois solennelle et rituelle qui institue le personnage. Celui-ci est revêtu d’un pouvoir distinctif qui le sacralise : il est « Seigneur », et même « notre Seigneur », ce qui destine l’homme à participer à ce sacré.
Mais ce personnage est aussi désigné sous le vocable de « serviteur de l’Éternel » A ce qui, dans le langage messianique, spécifie un rôle de délégation du pouvoir sacré et de médiation rédemptrice. De plus, « il est élevé dans la gloire » A, ce qui accentue le caractère royal et suprême de ce pouvoir. Nous sommes donc bien là en présence d’un personnage sacré historicisé, puisqu’il est revêtu d’un aspect humain dont l’existence s’accomplit dans un cadre historique.
Le caractère religieux
Le caractère religieux, d’autre part, du fondement idéologique réside dans le fait que la sacralisation du pouvoir de ce personnage a pour effet d’établir une substitution (à « la place des hommes pécheurs » A) et une « relation de médiation » (« afin de les faire entrer avec lui par une nouvelle naissance dans la communauté de ceux qui sont fils et serviteurs » A, de même « il nous unit indissolublement à lui pour que nous devenions de nouvelles créatures, que nous vivions notre condition d’enfants de Dieu » A).
Le postulat idéologique qui ouvre la démarche est une vision pessimiste du monde et de l’homme : les hommes sont pécheurs et le monde est soumis à la vanité, c’est-à-dire à l’absurde et au non-sens. Cette vision pessimiste du monde caractérise le sacré et le religieux. En effet, le péché n’est pas seulement une réalité éthique et morale, mais essentiellement une situation d’existence dans laquelle l’homme s’avère incapable d’accomplir son humanité véritable. Il l’a, en quelque sorte, perdue. Cette privation de l’humanité de l’homme est une donnée philosophique abstraite et idéaliste, se référant à la notion philosophique d’essence, à une sorte de « type parfait de l’homme » qui aurait été perdu.
Précisément, le caractère abstrait de cet homme, de cette « vie véritable » pose le cadre formel dans lequel s’insère le contenu idéologique de la confession de foi protestante. En effet, en antithèse de cette perte de l’humanité de l’homme et de cette vision pessimiste du monde, l’idéologie religieuse reconstruit le « type idéal », le sacralise en même temps qu’elle l’insère dans l’histoire, qui est elle-même une histoire sacralisée et religieuse. Cet « homme parfait », cet « homme-type » revêtu d’un pouvoir transcendant, est alors substitué à « l’homme pécheur », à « l’homme de la nature », à « l’homme de l’immanent », au fond à l’homme réel.
Il y a là un processus de mystification, puisqu’on a d’abord posé comme postulat indiscutable et indémontrable que « l’homme naturel » est pécheur, que le « monde naturel » est vanité. Puis, on a reconstruit un personnage dont les coordonnées se réfèrent à la fois à l’historique (la vie humaine et la mort), au mythique (la résurrection) ou au symbolique (l’effusion de l’Esprit sur les hommes). Ce personnage reconstruit est alors substitué à l’homme naturel avec l’intention de reconstituer par cette médiation un « homme nouveau ». Dans une première instance, ont été affirmées l’impuissance et l’incapacité des hommes à accomplir leur destinée : on a dépossédé l’homme de son humanité naturelle ; et ensuite, a été substitué et reconstruit un personnage revêtu d’un pouvoir suprême dont on a présenté l’obéissance inconditionnelle comme le trait pertinent. Enfin, a été institué ce « personnage sacré » comme le type d’une humanité fidèle et servante, dont le baptême devient le signe et le symbole.