ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Pierre Curie



Parole  et  Sacrements


Normes doctrinales de la Confession de foi






2- Le Baptême A



2.3- Le ministère baptismal
de l’Église A



Magnum Dictionarium, de P. Danet, 1691





Présentation

Parole de Dieu et Écriture sainte

Le Baptême
Le "fondement" du
  baptême
La grâce du baptême
Le ministère baptismal de
  l'Église


La Cène du Seigneur



Les textes d'accord :
Parole de Dieu et Écriture
  sainte
Baptème au nom du Père,
  du Fils et du Saint-Esprit
La Cène du Seigneur


eux aspects de ce paragraphe ont, à nos yeux, valeur sociologique : la valeur transcendantale de l’acte ecclésiastique et la fonction disciplinaire de l’Église.



La valeur transcendantale de l’acte de contrat d’alliance dans la « confession de foi »

   L’Église est détentrice du sacré et du symbole. C’est parce qu’il a été attribué une « valeur transcen­dantale sacrée » à ce « contrat d’alliance » A que celui-ci est appelé à revêtir une autorité incontestable et incontestée. Cette notion de « non-contestation » est psycho-sociologiquement nécessaire pour consti­tuer et maintenir la cohésion du groupe socio-reli­gieux, en particulier s’il est minoritaire et s’il tente de réunir des tendances particulières (réformées et luthériennes, en l’occurrence).
   La fonction idéologique de la confession de foi (c’est-à-dire la réponse donnée et la « responsabilité engagée » A dans une « libre acceptation » A, tendra à faciliter l’adhésion à l’autorité incontestable du postulat fondamental signifié dans le « contrat d’al­lian­ce » A.
   Le baptême est bien ainsi le symbole de l’adhésion de l'homme, dépossédé de ses capacités personnelles et inséré dans ce personnage religieux et sacralisé. Le Texte d’accord ajoute cette précision explicite que s’y « soustraire » correspond à un « rejet » A.

   Le baptême, avec l’adhésion de foi, institue donc la limite, la frontière sociologique, distinguant les fidèles des incroyants, mais aussi les orthodoxes des hérétiques qui ne reconnaîtraient pas les normes fondamentales, constitutives de l’idéologie religieuse du groupe. Cette distinction « fidèles-incroyants » ou « fidèles-hérétiques » est l’analogie de celle de « sacré-profane ».
   En définitive, la question revient toujours à celle-ci : quelle est la relation entre le contenu objectif de la confession de foi et le contenu subjectif de celle-ci ? Autrement dit, quelle est la relation (ou la cor­ré­lation) entre le contenu objectif de la confession de foi et ses connotations dans les circonstances et les situations où celle-ci est reconnue par le groupe socio-religieux et par chacun des membres de ce groupe ?

   Il nous semble, toutefois, possible de dire que la valeur transcendantale du « contrat d'alliance » A re­vêt une forme de pression psycho-sociologique et de pression idéologique à cause du caractère de puis­sance du religieux qui, parce qu’il est incontestable, impressionne l’homme dans le sens d’une adhésion ou d’un refus. À ce moment-là, la ligne de partage est tracée. Le « contrat d’alliance » revêt ainsi l’as­pect d’un tabou : le remettre en question, c’est se désigner (à cause de la « libre acceptation » A re­qui­se) hors du groupe, « excommunié ».


La fonction disciplinaire de l’Église A

   Remarquons que le Texte d’accord établit une dis­tinction entre ceux qui forment « la communauté de ceux qui sont fils et serviteurs » A ou qu’il désigne par « nous » A et « l’Église » A, ou même « l’of­fi­ciant » A.
   Ce concept « d’Église » A est ici particulièrement ambigu : il désigne à la fois « le corps du Christ » A (expression mystique et sociologique) et implicite­ment les autorités instituées dans ce corps (l’of­ficiant, ceux qui exercent la « pastorale vigilante » A à l’égard des individus et des familles, c’est-à-dire les pasteurs). Néanmoins, cette ambiguïté est si­gni­ficative d’une dichotomie de fait dans les Églises protestantes françaises d’aujourd’hui et qui, par ana­logie, correspond à une « Église enseignante » et à une « Église enseignée ».
   En fait, c’est bien à cette « Église » A, distincte de la « communauté des fils et serviteurs » A, qu’est confié le soin d’établir les « dispositions discipli­naires » A, c’est-à-dire les règles formelles définis­sant la structure des relations institutionnelles, ap­pe­lées à maintenir la cohésion du groupe dans la rec­titude du fondement idéologique (éviter les « erreurs humaines » A, « promouvoir et organiser la célé­bra­tion » A, « exercer droitement son ministère » A, « une droite administration du baptême » A.

   Par ailleurs, il convient de relever la contradiction dans ce Texte d’accord entre le fait que le « contrat d’alliance » A est fondé sur la libre acceptation A de la confession de foi et la pratique du baptême des petits enfants A incapables d’engager leur responsa­bi­lité dans une « libre acceptation ». La pratique du « pédo-baptisme » dans l’Église (même dans les Égli­ses minoritaires) démontre le caractère de con­ser­vation sociologique de celles-ci. On n’hésite pas, en l’occurrence, à pratiquer des entorses avec le fondement doctrinal, et la référence biblique subit, à cette occasion, une interprétation particulière...

   La fonction disciplinaire de l’Église constitue ainsi l’armature institutionnelle, permettant à la fonction idéologique de s’exercer avec efficacité.

   En bref, quelles implications sociologiques ce con­cept de « transcendance du sacré » a-t-il sur les com­portements ? Au départ, les concepts de péché, de vanité, d’incapacité foncière, dénient à l’homme de réaliser sa destinée personnelle. La vision pessimiste du monde est une entrave à toute autonomie de l’hom­me et interdit toute possibilité d’affirmer d’au­tres valeurs et normes que celles contenues dans l’idéologie religieuse protestante.
   Par ailleurs, le concept de « fils et serviteurs » A implique une attitude et un comportement, sinon ser­viles, du moins obéissants. Pour l’homme, il s’agit bien d’aliéner librement sa capacité d’autonomie pour se soumettre dans une fidélité obéissante A au système de valeurs et de normes établies par le « corps » A (Église), dont le « Christ » A (person­na­ge sacré et religieux) est le « chef » A. Le corps dé­tient le dépôt sacré des normes et des valeurs droites (orthodoxes) que l’homme obéissant doit accepter li­bre­ment par la confession de foi et le sacrifice vivant, c’est-à-dire les conduites conformes à ces normes et à ces valeurs.
   En bref, il s’agit d’un double transfert : d’une part, l’homme « véritable et sacré » est substitué à l’hom­me « naturel et pécheur » ; d’autre part, « l’homme sacré » transfère son pouvoir à son corps (l’Église) qui gère ce pouvoir par délégation. Ses moyens de pouvoir de délégation sont la « prédication fidè­le » A et la « pastorale vigilante » A, capables de ca­na­liser, d’enserrer dans les frontières de l’orthodoxie les capacités d’action de l’homme : ce sera la fonc­tion intégratrice et de cohésion de l’acte baptismal dans le groupe socio-religieux.




Mémoire présenté en juin 1970




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tc182300 09/09/2018