La crise galiléenne

   Après avoir mis entre parenthèses le contexte pour mieux cerner le miracle, il convient maintenant de mettre hors circuit celui-ci afin d’analyser le contexte. De deux choses l’une : ou le contexte a été conçu dès l’origine en fonction du miracle, ou il lui était étranger et lui a été uni après avoir subi des modifications. Les anomalies que j’ai trouvées dans le récit au point de jonction des deux péricopes m’ont obligé à mettre l’écrit à l’épreuve pour sortir de cette alternative, la mise hors circuit du miracle est imposée par cette perspective.
   Nous nous trouvons donc face à un récit qui se rapporterait à la vie de Jésus, mais qui se trouve amputé du fait principal qui le détermine. De celui-ci ne nous restent que des informations dépourvues de sens car elles sont altérées, modifiées, renversées même dans l’ordre de leur succession réelle. Est-il possible de retrouver ce fait ? Nous n’avons d’autre possibilité que de déstructurer le récit et de chercher à réorganiser les faits par voie d’hypothèses.

   J’analyserai donc le texte de Marc en suivant le fil de sa narration, que je soumettrai toutefois au doute hypothétique afin de rompre son ordre apparent. Par ce viol, j’entends provoquer le texte afin qu’il réagisse et trahisse par-là les lois qui le déterminent comme récit.
   Les hypothèses que je formulerai tout au long de cette démarche n’auront pour but que d’offrir des schémas des faits possibles, susceptibles de répondre aux réactions du texte. Elles ne seront valables que dans la mesure où elles donneront aux faits cette cohérence qui leur fait défaut. Elles auront cependant besoin d’être vérifiées, en vérifiant la cohérence acquise par le récit et leur correspondance éventuelle avec les variantes de la tradition scripturaire des évangiles.
   Si cette vérification s’avère positive, il sera alors nécessaire de rechercher dans la structure des écrits néotestamentaires les conditions concrètes et objectives de leur possibilité.