ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris



La résurrection de Jésus



Fiction dramatique en huit actes






ACTE  HUITIÈME :

Jésus, fils du Dieu incarné,
ou prophète de l’humanité de Dieu ?


Dans le jardin rocailleux du tombeau.





Ils ont vu... et ils ont cru

Avant-propos

Le tombeau vide

Signes et apparitions

Pilate enquête sur le vol du corps de Jésus

L’apparition du ressuscité aux disciples

Du tombeau vide à l’holocauste

Les Écritures et le Christ

Jésus

Le Fils de Dieu incarné ?
- Scène 1
- Scène 2
- Scène 3
- Scène 4
- Scène 5
- Scène 6
- Scène 7
- Scène 8


SCÈNE QUATRE


(Les mêmes et Salomé)




(Salomé entre dans le jardin, méfiante, regardant alentour... En l’apercevant, Thomas se lève prend une verge et va à sa rencontre).


JACQUES

(Ironique).

– Qui dois-tu frapper avec cette verge ?


THOMAS

– J’ai peur que Salomé tombe sur un des serpen­teaux qui se glissent entre les rochers. Les femmes en ont très peur.


JACQUES

(Ricanant).

– Tu le crois ?


THOMAS

(Ayant rejoint Salomé, il l’embrasse et s’approche du groupe en arpentant la rampe. À mi-voix à Salomé).

– Maria viendra-t-elle ?


SALOMÉ

– Sans doute. J’irai la chercher en temps opportun

(S’adressant aux frères).

Bonsoir, frères, je crois que vous avez bien travail­lé...


PIERRE

– Oui, mais avec peine. Tu peux rester ici, mais si tu t’ennuies, tu peux aussi bien nous quitter ! On le comprendra.


SALOMÉ

(S’asseyant à côté de Thomas).

– Oh, non ! Tu sais, je suis habituée à vos discus­sions. Et tout ce qui concerne Jésus me touche pro­fondément. Peut-être parce que je suis une femme !


NICODÈME

– Poursuivons, donc...


PIERRE

(Se tournant vers Thomas).

– Dans tout ce que tu nous as raconté, il y a beau­coup de choses étranges, mais ne coupons pas les cheveux en quatre. Je suis disposé à reconnaître que, matériellement, le signe avait pour objet le Temple, et non le corps de Jésus. Cependant, selon toute probabilité, sa signification prend forme dans son corps, en sorte qu’on peut dire que, à travers ce signe, Jésus désignait sa mort et sa résurrection. En effet, l’action significative de Jésus dans le Temple l’a conduit à passer de son rôle prophétique à celui de victime : sa mort avait été déjà virtuellement dé­cidée. Précisément, il est évident qu’il ne se consa­cre plus à annoncer son évangile, mais qu’il attend sa mort et sa résurrection.


THOMAS

– Pourtant, parvenu à Jérusalem, Jésus ne se prépa­re pas à la mort et à l’attente de sa résurrection, mais il se dispose à poursuivre ailleurs son action prophétique.


PIERRE

– Comment peux-tu affirmer cela, puisqu’il est devenu un transfuge qui ne se déplace plus à travers le pays pour annoncer son évangile, et qui ne se rend à Jérusalem que pour être arrêté et condam­né ?


THOMAS

– Ignores-tu ce qui s’est passé entre la Dédicace et la Pâque ? À ce moment-là, il a connu un tournant dans sa vie : interdit d’évangile auprès des Juifs, il a décidé de l’apporter aux Gentils. Dans ce but, il chargea Judas de prendre contact avec des Juifs de la Diaspora et avec des Grecs, pour qu’ils lui fas­sent quitter la Palestine, lorsqu’ils seraient venus à Jérusalem pour la Pâque.


PIERRE

– Que dis-tu là ? Quitter le pays, alors qu’il n’atten­dait que la mort ?


THOMAS

– Non, Pierre ! J’insiste : il n’attendait pas la mort, il la fuyait. Une expérience prophétique nouvelle avait traversé son esprit ! Jusqu’alors, il avait suivi les traces du prophète Osée. Dans le mandat d’arrêt lancé contre lui, il vit le signe que Dieu le plaçait sous l’égide du prophète Jonas, afin de partir an­noncer l’évangile aux Gentils...


JACQUES

– Ce que tu affirmes est incroyable !


THOMAS

– Cependant, tu le savais ! Rappelle-toi le jour où il affirma que si les habitants de Ninive avaient enten­du ce qu’il avait déclaré aux Galiléens, ils vivraient tous aujourd’hui dans la repentance ! Mais dans son pays, il n’y avait que des gens qui souhaitaient sa mort. Alors, Jésus a tout tenté pour fuir son pays, pour gagner, sans doute, Rome, la nouvelle Ninive.


PIERRE

– J’admire ta familiarité avec Jésus ! Pourtant, je suis en désaccord avec ton interprétation. À mon sens, Jésus a bien vu dans le signe la figure de Jo­nas, mais le prophète prisonnier du ventre de la baleine lui fit prendre conscience de l’imminence de sa propre mort, et le prophète sauvé des eaux lui fit entrevoir sa propre résurrection.


THOMAS

– Selon le texte, être englouti par le poisson ne signifiait pas la mort du prophète, mais son châti­ment pour son incrédulité face à la conversion pos­sible des Ninivites. En effet, il constata cette con­version comme allant de soi quand, rejeté hors du ventre du poisson, il fut porté par les flots jusque dans la ville. Jésus ressentit aussi comme un châti­ment pas tant l’échec du signe, que d’avoir mécon­nu la perversion des fils d’Israël. Il espérait que le signe les amènerait à se convertir. L’échec le con­vainquit, au contraire, de la perversion des Juifs, comme la prostitution de Gomer avait convaincu Osée de la perversion du peuple. Et il comprit qu’il aurait dû dénoncer à Dieu son peuple, comme Osée l’avait fait pour la « fille d’Israël », puis partir évan­géliser les Gentils, à la manière de Jonas. Voilà la raison pour laquelle il chargea Judas d’entreprendre des démarches pour quitter le pays !


PIERRE

– Son comportement le jour de la Pâque ne cor­respond pas à ce que tu nous dis. Jésus demeurait à Béthanie, chez Maria, et sa présence à Jérusalem ne pouvait pas passer inaperçue, ce qui laisse entendre que Jésus lui-même l’avait voulu, pour précipiter sa comparution en justice. En outre, le fait que, lors de la cène de Pâque avec ses disciples, on n’a pas mangé l’agneau, donne à penser qu’il se considérait lui-même comme l’agneau qu’il offrait sous les ap­parences de la fraction du pain. C’est pourquoi, le repas terminé, il n’a pas fui, mais s’est réfugié à Gethsémani pour attendre d’être arrêté. La Pâque devint le symbole rituel du sacrifice de sa mort !


THOMAS

– Tu n’as pas tout dit des faits et gestes de Jésus lors de son séjour à Jérusalem. Ton interprétation en demeure biaisée. Qu’a-t-il fait lors de son séjour chez Maria ? Tu n’en dis mot ! Le repas de Pâque n’a comporté que du pain, non pas parce que Jésus était l’agneau, mais parce qu’il s’agissait de la Pâque traditionnelle des Juifs qui rappelle le « pas­sage » à travers la mer ! On mangeait le pain azyme pour se hâter de quitter la terre d’esclavage. Et, à la fin du repas pascal, Jésus s’est rendu à Gethsémani, qui était le lieu fixé pour rencontrer les Grecs qui devaient le conduire hors du pays. D’ailleurs, la tension et l’angoisse éprouvées par tous, cette nuit-là, dans l’attente de l’arrivée des Grecs, le montrent à l’évidence. Jésus avait soupçonné leur trahison au cours du repas quand il chargea Judas d’aller aux informations dans la maison du grand prêtre.


JACQUES

– L’erreur de mon frère, le Seigneur, fut de faire confiance au traître Judas.


THOMAS

– Tu te trompes ! Judas n’a pas été le traître, mais le sauveur de Jésus, celui qui s’est exposé lui-même pour préparer sa sortie du territoire. Les informa­tions qu’il avait glanées chez le grand prêtre l’a­vaient convaincu que les Grecs l’avaient trahi et que des gens avaient été envoyés à Gethsémani pour s’emparer de lui. Judas revint en hâte auprès de Jésus pour l’en avertir, mais il arriva en même temps que les policiers. Alors, il se donna la mort, comme il en était du gardien du héros qui n’était pas parvenu à faire échec à la trahison.


JACQUES

– Tu fais de Jésus, notre Seigneur, un fugitif, et, de son parjure, son sauveur ! Tu n’es qu’un traître, Thomas !


THOMAS

(Sans s’occuper de ces paroles et continuant à s’adresser à Pierre).

– Il y a encore autre chose que tu négliges de consi­dérer, Pierre. Quand Jésus s’est rendu à Jérusalem pour la Pâque, il a trouvé refuge à Béthanie, dans la maison de Maria. Et là, il a célébré leur mariage pour exprimer, comme Osée, dans une métaphore vive, l’union de Dieu et des hommes dans l’Alliance nouvelle. Son union avec Maria est le miroir pro­phétique de l’alliance de Dieu avec les hommes.


PIERRE

(Agacé).

– La nouvelle Alliance est l’extension à tous les hommes de l’ancienne, établie par Dieu avec la génération d’Abraham. Puisque les Gentils sont des « enfants de prostitution », Jésus fut contraint, comme Osée dans une situation analogue, de s’unir à une prostituée, pour signifier l’accord entre purs et impurs dans le Royaume de l’Alliance.




Écrit en 2005




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