Sommaire
Le texte d’Exode 17:8-16
Introduction
Analyse référentielle
Le témoignage égyptien
L’hymne de Moïse
- Moïse et Miriam
- Bataille et refoulement
- La guerre pour Yahvé
. L’échec
. Paroles de motivation
Entre mythe et histoire
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Le récit s’achève (Ex 17:13-15) par une série de « paroles » que Dieu adresse à Moïse et celui-ci aux autres, afin de les relever de leur dépression et de les engager à une guerre totale pour Yahvé contre Amaleq. Mon intention est d’analyser une à une ces paroles, mais auparavant j’aimerais jeter un regard sur les causes de cet échec et sur les dangers auxquels rebrousser chemin exposait le peuple.
Les Israélites ont quitté l’Égypte pour aller habiter le pays de leurs pères, mais aussitôt entrés ils en ont été repoussés par leurs propres frères, qui les ont obligés à retourner dans la terre de misère dont ils venaient de partir ! Tel était le sentiment des Israélites contraints de rebrousser chemin. Ils auraient pu rentrer en Égypte sans crainte, s’ils avaient quitté ce pays ouvertement et en accord avec les lois, mais ils s’en étaient enfuis. Cela peut surprendre le lecteur qui sait, par le témoignage explicite des textes, qu’ils sont partis avec la permission de Pharaon (Ex 14:17). Mais ces textes ont été écrits dans l’intention d’aliéner le lecteur du déroulement réel des faits plutôt que de l’informer, leur but étant de donner l’interprétation exigée par la foi. À ce niveau, les écrits ont envers l’histoire une fonction de censure plutôt que de vérité.
Rappelons à ce sujet l’autorisation de quitter le pays donnée par Pharaon. Moïse avait assoupli ses exigences, en demandant seulement la permission d’aller au désert pour célébrer un sacrifice à Yahvé, Dieu des Juifs. Bien que doutant de la véritable intention de Moïse, Pharaon ne s’y était pas opposé, à condition que Moïse, pendant son absence, laissât en Égypte les femmes et les enfants, condition que Moïse n’accepta pas. À la fin Pharaon, peut-être pour l’éprouver, se montra plus ouvert et lui permit de partir pour ce culte, en ne laissant que les moutons et les bœufs. Mais comment, répondit Moïse, le peuple aurait-il pu offrir les sacrifices sans moutons et sans taureaux ?
C’est après ce jeu de paroles et de ruses qu’on avait pris la décision de s’enfuir au moment opportun. Volonté de Moïse, ou décision imposée par des anciens à lui opposés ? Toujours est-il que le peuple se mit en route furtivement, profitant probablement de l’absence de Pharaon retenu par ses guerres de pacification de la Palestine.
Ajoutons que cette fuite se fit dans une certaine inconscience des risques de guerres, de luttes et de refus auxquels elle les exposerait, risques qui exigeaient, entre autres, une préparation au combat motivée et agressive. Certes, les Israélites étaient armés (Ex 14:18), mais l’échec devant les Amalécites montre qu’ils ne l’étaient pas suffisamment. D’ailleurs leurs armes ne pouvaient que susciter des craintes et pousser les peuples rencontrés à s’opposer à eux.
Il y avait peut-être chez les Israélites de l’euphorie et une grande confiance en Abraham, le père de beaucoup de peuples de Canaan, comme les Moabites, les Amalécites, les Madianites et les Arabes. Mais si Abraham était accueillant dans leur cœur, il ne l’était certainement pas dans celui de ses autres fils ! Moïse avait pu recevoir un bon accueil chez Jéthro, prêtre des Madianites, mais il était seul et Jéthro avait des filles à marier. Pouvait-il espérer être accueilli accompagné d’un peuple nombreux, dont le but était de s’emparer par titre divin de leurs terres pour y habiter ? Naïveté de la foi face aux réalités politiques, ou but politique de la foi ?
On comprend que Moïse n’ait pas eu la force de tenir longtemps ses mains ouvertes et tendues vers le ciel. Sa conscience l’accusait d’un péché très grave, celui d’avoir tenté Dieu par cette fuite qui exposait le peuple à de grands risques et à l’échec du retour à la terre des pères. Or Dieu faisait payer très cher toute tentative de défi ! Repoussé, Moïse devait reconduire son peuple en Égypte, pour l’en faire ressortir par un autre chemin alors que celui-ci ne voulait sans doute que se rendre à Pharaon, pour échapper à la mort et assurer son existence, même au prix des corvées. Il fallait donc remonter leur moral, les faire sortir de leur dépression, les attirer par des motivations profondes de haine et d’amour, les assurer enfin de la réussite de l’entreprise par la victoire contre tous ceux qui se seraient opposés à leur passage : Yahvé le voulait !
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