Sommaire
GENÈSE ET MÉTHODE D’APPROCHE DES RÉCITS
LECTURE DU RÉCIT DE MATTHIEU
La généalogie de Jésus
Marie trouvée enceinte
Les mages
- Une venue allant de soi
- Le schéma biblique
- Les mages
- L’étoile
- L’offrande
- Éviter Hérode
La fuite en Égypte
LECTURE DU RÉCIT DE LUC
CONCLUSION
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Les mages évitent Hérode
Selon la trame du récit, les mages auraient dû se rendre auprès d’Hérode pour le renseigner sur l’enfant. Mais l’ange de Dieu leur apparaît en songe pour les avertir que le roi a l’intention de tuer l’enfant, aussi regagnent-ils leur pays en empruntant un autre chemin.
Les gentils sont les seuls qui reconnaissent le messianisme de l’enfant. Quant aux juifs ils n’ont pas cru, puisqu’ils n’ont cherché qu’à tuer l’enfant. Non seulement ils l’ont tué sur la croix, mais ils ont cherché à le tuer dès le début, puisqu’ils n’ont vu dans le mode de sa naissance que la première pièce du dossier d’accusation permettant de le condamner à mort. Pour eux, il n’était qu’un bâtard, Dieu les a donc punis en les laissant en dehors de l’événement messianique.
Cette punition apparaît beaucoup plus complexe si on passe du rêve des mages à celui que l’écrivain lui-même a manifesté par le jeu et la substitution des images. N’a-t-il pas assimilé Hérode à Balak et les juifs aux Moabites ? Mais qui étaient ces Moabites sinon les peuples descendant de l’inceste de Lot avec sa fille aînée (Gn 19:35) ? Dès lors on peut penser que, par cette assimilation, Matthieu a voulu retourner aux juifs l’accusation qu’ils portaient contre Jésus qu’ils appelaient « bâtard », « fils de Marie », « fils d’une femme ». En ne croyant pas en lui les juifs se coupaient des promesses et de l’héritage. Ils s’étaient comportés envers lui comme les Moabites face à Israël naissant. S’ils appelaient Jésus « fils d’une mère », ils restaient tels que leur nom les avait à jamais marqués, « fils du père », c’est-à-dire d’un inceste.
Certes, cette rétorsion polémique n’est pas avouée dans le texte, mais il serait difficile de ne pas la présupposer au niveau de la fonction des images, et donc dans l’inconscient de l’auteur et de l’Église. Ce qui apparaît au niveau de l’intention du texte, c’est une justification de la rupture de l’Église d’avec les juifs, qui se sont éloignés de l’événement du salut. D’ailleurs ces nouveaux récits de la naissance montrent bien – comme nous le verrons mieux ultérieurement – que les gentils cherchaient, par leurs catégories mythiques, à rendre « gentil », « païen », ce Jésus qui s’était offert de premier abord comme un juif en le façonnant à l’image de leurs héros.
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