Jérusalem
ucune détermination, sinon de rappeler qu’elle est lieu de départ et de fuite. C’est bien suffisant pour orienter le lecteur vers le prophète, le tragique de sa mort, et ses paroles sur le salut et le sens de leur existence. Dans la situation du récit, Jérusalem pourrait être symbolisée par le tombeau vide, qui poussait les disciples à rechercher Jésus et à se retrouver eux-mêmes. C’est pourquoi deux disciples vont de Jérusalem à Emmaüs.
Emmaüs
mmaüs était probablement un village qui existait, et c’est ainsi que le récit le considère, mais il désigne ici moins un lieu géographique qu’un univers existentiel. La distance de soixante stades correspond davantage aux soixante années estimées de la vie de l’homme qu’à celle du village d’Emmaüs à Jérusalem. C’est le chemin qui conduit chaque homme au sens de son existence, selon sa foi au Christ. Chaque homme, toujours unique dans son individualité, doit parvenir à devenir le prochain d’autrui, en le considérant comme un frère. Or le point d’aboutissement de ce chemin, c’est « Emmaüs ».
Selon les origines hébraïque et grecque des composantes de ce mot : « Emma-ous », il acquiert le sens de l’union des individus dans un vécu de conscience : « Emma-ous » = « Avec eux », avec les autres ! Il se trouve aussi en corrélation avec « Emma-nu-el », « Dieu avec nous », le Christ. En effet, le Christ appelle les hommes à devenir des frères, parce qu’il les met en présence de Dieu, le Père. Dès lors, chaque individu est à l’autre le prochain, lorsqu’il est parvenu à « Emma-ous », au terme du chemin qui le conduit de Jésus au Christ, l’Emmanuel.
Cléopas
ous venons de parler d’Emmaüs, mais qui sont « les deux disciples » qui se rendent à Emmaüs ? Ils n’apparaissent nulle part ailleurs que dans le récit de Luc ; et des deux, on ne connaît que le nom de « Cléopas ».
S’il est vrai que ce cheminement vers Emmaüs est symbolique, lié non à une ville mais à une signification existentielle, il est vain de considérer Cléopas comme une personne réelle. Il est un personnage de l’événement raconté qui n’existe que dans le récit : un sujet non pas historique, mais allégorique. En grec, le mot
signifie « bruit », « nouvelle » qui se répand. Souvent employé en liaison avec un autre mot pour constituer un nom (par exemple, uni à
, père ; à
, victoire ; à
, peuple) il forme les noms de Cléopâtre, Cleonike, Cleodème.
Ici, il est adjoint à
(chacun) :
: personnification de la « nouvelle » sur la mort et la résurrection de Jésus ; en bref, de son être « Christ ». La « nouvelle » est le sens du nom de Jésus-Christ. Pour le découvrir, il est donc nécessaire de s’introduire dans le récit afin de parvenir à comprendre ce que Jésus dit de lui-même à Cléopas, en lui révélant les Écritures. Celui-ci est comme le messager, auquel est confiée la tâche de garder et d’annoncer ce qu’est Jésus, selon les Écritures.
L’inconnu
ésus sort de la ville qui lui a donné la mort comme il est sorti du tombeau, sans que personne s’en aperçoive. Il la quitte pour une raison opposée à celle qui a animé Cléopas, qui avait été déçu parce que Jésus (lui-même déçu par le peuple juif qui n’avait pas cru en lui) n’avait pas conduit le peuple à sa libération. Jésus, né d’une vierge enceinte par Dieu, a été considéré comme un enfant bâtard. Il a annoncé le royaume de Dieu, mais il a été condamné parce qu’il avait voulu être proclamé roi. Il a été condamné injustement, et personne n’a pris sa défense.
À présent, il quitte la ville pour aller à la rencontre de ceux qu’il a déçus, afin de retrouver leur confiance ! Mais les hommes l’ont ignoré, de sa naissance à sa mort et à sa résurrection, et son être véritable leur demeure inconnu. Il sort de la ville pour présenter ses lettres de créance au nom du Dieu des Écritures. Il naît, meurt et ressuscite parce que, étant le Christ, il doit naître, mourir, ressusciter. Or Jésus et Cléopas se rencontrent sur le chemin d’Emma-ous.