ANALYSE RÉFÉRENTIELLE |
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Ennio FlorisJudas |
Notes sur une méthode de lecture des fragments évangéliques sur Judas |
PROLOGUE INTRODUCTION REGARD CRITIQUE SUR LES ÉVANGILES DU JUDAS DE L’HISTOIRE AU JUDAS DES RÉCITS ÉPILOGUE ANNEXES - Méthode de lecture - Le Christ et Jésus - Évangiles et Jésus-Christ - Le Jésus-Christ de la foi - L’interprétation - Bibliographie . . . . . . . - o 0 o - . . . . . . . |
Si nous ne sommes pas avertis des problèmes critiques des textes et du discours des évangiles dont ces passages sont tirés, nous serons portés à les lire en suivant l’articulation de leur sens, sans aucun soupçon, convaincus qu’ils se rapportent à un événement qui s’est vraiment passé : la trahison de Judas. Ce que nous lisons peut être résumé dans cette histoire. Judas trahit son maître auprès des grands-prêtres avant le repas pascal. Le sachant, Jésus dévoile sa trahison à ses disciples, mais d’une façon si équivoque qu’ils ne réalisent pas la portée et la gravité du fait. Et lorsque Judas sort de la salle pour aller chez les grands-prêtres pour leur communiquer le lieu et l’heure où ils pourront le capturer, ils pensent qu’il les quitte pour préparer la célébration de la Pâque. En réalité, ils le reverront dans la même nuit venir à Gethsémani précédant les envoyés du Sanhédrin et trahir son maître par un baiser. Mais, ayant entendu que Jésus avait été jugé passible de mort par le grand Concile, Judas va à nouveau chez les grands prêtres leur restituer l’argent qu’il avait reçu comme prix de la trahison. Repoussé avec mépris, il jette l’argent sur le pavé du temple, et il va se pendre. Cette mort marque sa figure d’homme d’un sceau qui ne le fera connaître que comme traître : « celui qui l’a livré ». Ce récit semble posséder toutes les conditions d’une histoire vraie. Quant au fait, c’est une trahison semblable à celles qui se sont passées fréquemment jadis, et qui se passent encore aujourd’hui. Quant aux évangiles, dont l’information est tirée, ils traduisent en récit une tradition orale qui remonte, au dire de Luc, un des écrivains, à des « témoins oculaires » (Lc 1:2). L’exégèse confirme, pour l’essentiel, cette affirmation. Cependant celle-ci demeure équivoque, car pour connaître la vérité historique des faits, il est nécessaire de savoir si les témoignages rapportent des faits, ou la signification dictée par un regard dans la foi au Christ que ceux-ci ont reçue. En effet, il y a une grande différence entre connaître et croire. On connaît une chose quand on la perçoit ou quand on peut la percevoir par l’expérience, on la croit quand on ne peut pas la percevoir et qu’on ne la connaît que si Dieu la révèle par la parole ou par le langage des signes. Par exemple, dans l’Église catholique, on croit que par le rite eucharistique le pain devient réellement le corps du Christ, et le vin son sang, par « transsubstantiation ». On croit donc, sans voir, car ce qu’on voit c’est du pain et du vin. On ne voit que des choses devenues signes d’une autre chose, dans le cadre d’un langage rituel. Un autre exemple, pris dans le quatrième évangile. Lorsque Jean entre, après Pierre, dans le tombeau de Jésus, il constate qu’il est vide mais il voit, comme lui, « les bandes qui étaient à terre et le linge qu’on avait mis sur la tête de Jésus, non pas avec les bandes mais plié dans un lieu à part ». À ce point, l’évangéliste s’exclame « Il vit et il crut » (Jn 20:6-8). Or, qu’a vu Jean ? Rien d’autre que les bandelettes et le suaire. Et à quoi croit-il ? Qu’il y a dans le tombeau les bandelettes et le suaire plié ? Non, mais que Jésus est ressuscité. Il croit donc ce qu’il n’a pas vu, mais qu’il a trouvé indiqué par des signes, selon un code propre à son système de croyance. Ces exemples suffisent pour nous rendre attentifs à ne pas lire un témoignage de foi comme un texte d’histoire. Car si celui-ci rapporte un phénomène tel qu’il a été perçu et en relation à son essence, le témoignage de foi le présente comme signe d’une chose qui n’est pas son essence, et se trouve lié à lui par un code de signification. Si donc nous voulons parvenir à savoir si Judas a ou non trahi son maître, il convient de réfléchir sur le problème concernant la structure du discours des évangiles dont les fragments qui le concernent ont été tirés. Les évangélistes ont une approche de Jésus qui synthétise les conceptions de Paul et de Pierre car, si le Christ s’incarne, il reste d’une part caché sous les manifestations de la chair, et d’autre part est toujours trahi, pour ne pas dire manifesté par elle qui, en portant ces traces, en devient le signe. |
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t640000 : 13/12/2017