ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris


Jésus le charpentier





La métanoia, ou révolution culturelle :
la haine du père et de la mère


Sommaire

Du fils naturel au fils de Dieu

La Métanoïa
L’épée de la division
La haine du père
- Le logion
- Le scandale
- Matthieu et Luc
La mort du père
La main à la charrue

Le défi et la crise

La bonne nouvelle




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Les divergences entre Matthieu et Luc



Mt 10:37

Celui qui aime son père et sa mère plus que moi n’est pas digne de moi, et celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi.


Lc 14:26

Si quelqu’un vient à moi et s’il ne hait pas son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et ses sœurs et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple.



   La différence d’attitude entre Matthieu et Luc face au même logion s’explique par la diversité de leur contexte historique et de leur perspective caté­chétique.

   Matthieu écrivait dans des milieux judaïsants, pour lesquels il n’y avait aucune rupture entre le judaïsme et le christianisme. Le Christ n’était pas venu pour abolir la loi, mais pour l’accomplir, c’est l’affirmation qui soutient l’interprétation de la personne et de la doctrine de Jésus chez Matthieu (Mt 5:17).
   Il est évident que, dans cette optique, le logion de Jésus ne pouvait pas être relaté dans sa formulation originelle, qui comportait un divorce avec le modèle génétique des valeurs. Ainsi l’amour des siens ne fut-il pas renié mais seulement subordonné à celui envers le Christ. Autrement dit, il ne s’agissait pas de dissoudre la famille mais de l’accomplir.

   Luc, au contraire, se trouvait au sein d’une Église constituée de façon prédominante par des croyants issus du paganisme ou des juifs nés dans la diaspora. De plus, il écrivait dans un moment marqué par un tournant historique, où l’Église rompait avec le judaïsme en ayant conscience d’en être l’authenti­que héritière, en même temps qu’elle visait à l’hégé­monie culturelle et religieuse dans tout l’empire.
   Dans ce cadre, le logion de Jésus ne pouvait être interprété que comme une rupture. Pour qu’une nouvelle société puisse être constituée, il était nécessaire de rompre avec l’ancienne, sous peine de déchirures pénibles et angoissantes. On sait que, par le « privilège paulinien », le chrétien était autorisé à abandonner son conjoint païen, si celui-ci refusait de vivre avec lui, sans porter atteinte à sa foi. Dans un moment de transmutation des valeurs, il fallait bien haïr cette mère et ce père, ces frères et ces sœurs, ces belles-mères et belles-filles, qui auraient empê­ché de s’inscrire dans la nouvelle famille sociale.

   Toutefois, même chez Luc, le logion avait perdu le sens originel qu’il possédait dans la perspective évangélique de Jésus, car il ne s’agissait pas, comme chez celui-ci, d’une remise en question du modèle génétique des valeurs, mais seulement d’une substi­tution de modèles dans le cadre des mêmes valeurs.




c 1976




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tk223000 : 22/06/2020