ANALYSE RÉFÉRENTIELLE
ET ARCHÉOLOGIQUE
Ennio Floris
Jésus le charpentier
Du fils naturel au fils de Dieu :
du fils de Dieu au fils d’une adultère
Sommaire
Du fils naturel au fils de Dieu
Fils d’une adultère
-
Fils de Dieu et de David
.
La double filiation
.
Solutions
catéchétiques
-
Sans père
et sans mère
-
Fils
adultère
-
Fils
de Marie
-
Conclusion
La famille
de Jésus
Délire
ou extase ?
La solitude
de Jésus
Qui est
ma mère ?
La
Métanoïa
Le défi
et la crise
La bonne
nouvelle
. . . . . . . . - o
0
o - . . . . . . . .
Le
fils de
Dieu et le
fils de
David :
le problème posé par la double filiation
En disant que
Jésus était le
Christ, l’Église primitive a voulu affirmer deux choses :
qu’il était
fils de
David
et
qu’il était
fils de
Dieu. Les deux affirmations peuvent être considérées comme étant des prérogatives essentielles du
Christ, si la seconde est prise dans son sens figuré.
Le mot «
Christ » signifiait « oint de
Dieu », c’est-à-dire homme consacré dans le cadre de la transmission du pouvoir royal. Mais, concrètement, il se rapportait à la royauté davidique à laquelle, selon les Écritures,
Dieu avait confié à jamais l’exercice de sa propre royauté de paix et de justice dans le monde.
Le
Christ était donc ce roi, de descendance davidique, en qui
Dieu aurait accompli ses promesses. C’est ainsi qu’on le disait «
fils de
David
». Mais, dans la mesure où toute transmission du pouvoir royal se réalisait au moyen de la filiation légitime,
le Christ était aussi appelé «
fils de
Dieu
», dans un sens métaphorique évident.
Or l’Église a affirmé que
Jésus était
fils de
Dieu au sens propre du mot. C’est un indice qu’elle a été conditionnée par des éléments étrangers à la culture juive. Quels furent les facteurs qui déterminèrent ce conditionnement ? Nous chercherons à répondre à cette question au cours de l’étude ; pour l’heure, il nous intéresse seulement de cerner le problème posé par cette double filiation.
Ce problème peut être exprimé ainsi : si
le Christ est vraiment, au sens propre du mot,
fils de
Dieu, comment se fait-il que, dans les Écritures,
il soit appelé «
fils de
David
» ? Le
fils de
Dieu ne serait-il pas aussi
Dieu, dans la mesure où tout fils participe de la nature du père ? Et si
le Christ est
Dieu, comment peut-il être un homme ?
Il convient de préciser que ces interrogations ne sont pas seulement formulées à travers la lecture des textes, mais qu’elles sont explicitement posées par les
évangélistes. Je me rapporte particulièrement à un passage de
Marc
où
Jésus est censé interroger ainsi les
juifs au sujet du
Christ : «
David
lui-même, animé par
l’Esprit Saint, a dit :
Le Seigneur a dit à mon Seigneur assieds-toi à ma droite (
Ps 110 (109):
1
).
David lui-même l’appelle
Seigneur, comment donc est-il son fils ?
» (
Mc 12:
36-37
). Ce passage, repris avec des variantes par
Matthieu
et
Luc
(
Mt 22:
41-45
;
Lc 20:
41-44
) montre bien l’intention de l’Église de justifier par les Écritures sa définition du
Christ par la filiation divine. À ses yeux, le
Christ n’aurait pas pu être appelé
Seigneur de
David
s’il n’était placé au-dessus de lui par une filiation divine. Mais ne serait-il pas alors plus logique de croire que la filiation divine rendait inutile, sans valeur, la filiation davidique ?
Une affirmation de
Paul
dans l’
épître aux
Romains
peut nous éclairer sur la façon dont l’Église avait résolu ce problème : «
son fils, né de la
postérité de
David
selon la chair, et déclaré
fils de
Dieu, avec puissance, selon
l’esprit de Sainteté, par sa résurrection d’entre les morts
» (
Rm 1:
3-4
). Cette diade chair et esprit, d’origine gnostique, offrait à
Paul la possibilité de résoudre l’antinomie, dans la mesure où la génération du
Christ et celle du
fils de
Dieu pouvaient être placées à des niveaux différents, l’une au niveau de la chair, l’autre à celui de l’esprit. L’événement qui constituait la frontière entre ces deux niveaux était la résurrection d’entre les morts.
c 1976
tk111100 : 15/06/2020