Gennésar et Génésareth :
Gennésar dans la Bible
La
Bible ne fait allusion à
Gennésar que dans le premier
livre des Maccabées (
1 M 11:67). Bien que ce passage constitue un
apax, il est trop important pour ne pas être pris en considération.
Il s’agit d’un épisode de la guerre menée par
Démétrius II contre
Jonathan. L’affrontement entre les deux armées eut lieu sur la plaine qui va du petit
lac de Houé au
lac de Galilée en longeant le
Jourdain.
Démétrius avait établi son quartier général à
Kédesch, au nord-est du
petit lac, tandis que
Jonathan avait fait camper son armée sur « l’eau de
Gennésar ». Ce lieu devait sans doute se situer au nord du
lac de Galilée, à l’embouchure du
Jourdain, puisque lorsque l’armée sortit de son camp, elle marcha sur la plaine pour rencontrer l’ennemi qui descendait de
Kédesch.
Ainsi, quel que soit l’endroit précis, territoire ou ville, il convient de le situer non entre
Capharnaüm et
Tibériade, mais au nord-ouest de
Capharnaüm, entre cette ville et le
Jourdain. Mais s’agissait-il des bords du
lac, ou du terrain marécageux qui devait séparer
le lac de la plaine ? S’il est vrai que l’expression «
sur l’eau » peut avoir le sens de « au bord de l’eau », et donc
du lac, il me semble que la préposition «

» correspond mieux à l’étendue d’un terrain qui devait être occupé par une armée, et si nous pensons aux nécessités stratégiques de défense, puisqu’on devait à la fois cacher l’armée et protéger ses réserves en hommes et en armes des attaques de l’adversaire, l’expression trouve son véritable sens si on l’interprète comme un campement érigé sur le marais.
Selon le récit, l’armée de Jonathan, avant d’atteindre l’armée ennemie qui s’avançait sur la même plaine, fut victime d’une embuscade : des milices cachées dans les collines à l’est de la plaine lui coupèrent le chemin et l’anéantirent. Cependant
Jonathan – au dire du texte – eut le temps et la possibilité d’organiser une contre-attaque et de vaincre.
Aurait-il pu y réussir sans l’appui d’un camp bien protégé et encore riche en réserves ?
L’existence d’un vaste marais au nord du
lac est confirmée indirectement par
Luc. Tandis que
Marc et
Matthieu ont métamorphosé le lac, l’appelant «
mer de Galilée » - microcosme d’eau –
Luc semble le regarder avec dédain, ne le reconnaissant que comme étang (
Lc 8:22-23 ;
8:33). Peut-être que l’exaltation
des premiers dépend de la nature galiléenne de leurs sources, et donc de l’intention de faire de la tradition galiléenne le fondement de la nouvelle culture, tandis que le mépris
du second reflète sa visée jérosolimitaine et royaliste de sa compréhension de l’Évangile. Mais ce mépris revêt pour nous une valeur géographique, dans la mesure où il ramène
le lac à sa véritable dimension.
Luc ne le considère qu’à partir de son origine, là où précisément il n’est que «
l’étang de Génésareth » (
Lc 5:1).
C’est en cet endroit précis que
Jésus rencontra ses premiers
disciples, mais la manifestation de la seigneurie du
Christ ne se réalise pas, pour
Luc, dans la
mer de Galilée, mais dans la mer de l’oicumène romaine, par la prédication de
Pierre et
Paul.
Une dernière confirmation de la nature et de l’ubication de
Gennésar est donnée aussi par le nom lui-même, pour autant qu’on cherche à le comprendre dans la signification de l’étymologie populaire.
Selon la lecture forte de
Gennésar, il peut être compris par l’union de « Gann :

» (jardin) avec « Azar :

» (ceindre, fortifier, armer). Le sens serait donc « jardin ceint – fortifié – par les eaux ».
Selon la lecture faible,
Gennésar résulte de l’association de « Gann » avec « Azar » : «

» (interdire, défendre). Le sens serait ainsi « jardin défendu, interdit », à cause précisément du marais.
Lieu protégé par une défense naturelle en même temps qu’interdit à cause du danger,
Gennésar ou Génnesar se laisse imaginer comme une campagne entrecoupée de cours d’eau, riche en pâturages, en jardins potagers et en poissons, lieu aussi d’intérêt stratégique en temps de guerre.