ANALYSE RÉFÉRENTIELLE
ET ARCHÉOLOGIQUE
Ennio Floris
La référence aux Écritures et les controverses entre juifs et chrétiens
au sujet du Christ
L’action des apôtres
Sommaire
Avertissement
au lecteur
Introduction
Le Christ
et les Écritures
La foi
en Jésus-Christ
Le Christ
selon les apôtres
L’action des apôtres
-
Introduction
-
L’attitude
conciliatrice de
Pierre
-
La rupture
d’Étienne
-
Les discours de Pierre et
Étienne
-
De la trêve
à la persécu-
tion
-
Le silence
sur Judas
. . . . . . . . - o
0
o - . . . . . . . .
Regards sur les discours de Pierre et d’Étienne
La différence entre le discours de
Pierre et celui
d’Étienne tient à leur christologie.
Pierre se représente
Jésus-Christ à travers des catégories juives :
Jésus est un homme, auquel
Dieu a rendu témoignage par des miracles, et élevé à la dignité de
Christ en
le ressuscitant d’entre les morts. Son être christique ne
lui est pas acquis au terme d’un processus d’incarnation du
fils de
Dieu, comme chez
Paul
et
Jean
, mais par l’élévation de son être humain à la dignité de
fils de
Dieu. Il est
fils de
Dieu par élection et non par génération.
En conséquence,
Pierre croit en
Jésus-Christ tout en pratiquant au
temple le culte et le rite juifs.
Il sait que le
peuple juif doit transmettre au
Christ son héritage, mais avec l’humiliation dont les enfants de
Jacob ont été l’exemple en se reconnaissant coupables de trahison et en se prosternant devant
Joseph, leur frère, livré au
pharaon qui
l’avait élevé à la dignité de seigneur
(1)
.
Le
Jésus-Christ du discours
d’Étienne est celui qu’on retrouvera chez
Paul
, le
fils de
Dieu
incognito
dans la chair d’un homme, qui révèle sa nature divine par sa mort et sa résurrection. Mais sa mort exige aussi celle de ses frères selon la chair, qui l’ont persécuté et tué comme leurs pères avaient persécuté et tué
les prophètes qui
l’avaient annoncé. C’est pourquoi la foi en
Jésus-Christ impliquait pour
lui une rupture avec le judaïsme qui n’avait pas compris que les bénédictions données par
Dieu à
Abraham
, à
Isaac
et à
Jacob étaient les prophéties de l’exaltation du
Christ et non de celle du
peuple sur les nations du monde.
Le judaïsme a méconnu la parole des
prophètes, même s’il est parvenu à l’accomplir par le meurtre du
Christ… son péché prend racine dans son opposition à
l’esprit de
Dieu, le
Christ ne pouvait venir que pour le juger. À cet égard, le discours
d’Étienne peut être considéré comme une christologie de l’histoire du
peuple juif vue sous l’angle du jugement de
Dieu, histoire jalonnée par une suite de meurtres de frères, culminant dans le meurtre du
fils de
Dieu en sacrifice pour les péchés du monde.
Les juifs auditeurs
d’Étienne ne pouvaient pas ne pas reconnaître dans ses paroles l’écho de la prédication de
Jésus, qui tendait à la dissolution du judaïsme. Ainsi la trêve concédée par
Gamaliel était rompue : la parole annoncée par
les disciples de
Jésus ne pouvait pas venir de
Dieu, puisqu’elle n’avait d’autre intention que de faire retomber le sang de
leur maître sur le
peuple juif.
Par son discours,
Étienne avait donné la juste réponse au
souverain sacrificateur, en faisant échouer la tentative de conciliation de
Gamaliel. La réaction des
juifs fut violente : «
En entendant ces paroles,
ils étaient furieux dans leur cœur et
ils grinçaient des dents contre lui…
Ils poussèrent alors de grands cris et, se bouchant les oreilles,
ils se précipitèrent tous ensemble sur
lui,
le traînèrent hors de la ville et
le lapidèrent
» (
Ac 7:
54
;
57-58
).
Étienne avait dévoilé le véritable dessein de la nouvelle secte : détruire le judaïsme ce qui, pour les
juifs, était d’autant plus absurde et criminel
qu’il s’appuyait sur l’interprétation des Écritures. Mais, pour
les chrétiens, la lapidation
d’Étienne fut le témoignage et la preuve que les
juifs étaient les meurtriers du
Christ !
Par leur rôle dans la société les
juifs étaient, pour les premiers
chrétiens, ceux qui avaient persécuté et tué
les prophètes, et qui maintenant faisaient mourir le
Christ ! Étrange force de persuasion que celle
d’Étienne : il contraint ses auditeurs à reconnaître leur culpabilité dans le meurtre du
Christ par le meurtre de leur accusateur !
______________
(1) Sur
Joseph,
voir
.
10/02/1999
tj40430 : 23/08/2020