ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris


La crise galiléenne




La mise entre parenthèses du contexte et l’analyse du miracle :

Du miracle du Christ au miracle de Jésus



Sommaire
Avertissement au lecteur

Mise entre parenthèses du contexte
- Introduction
- Le symposium du récit
- Les miracles du Christ
- Miracle de la croissance
- Miracle de la constitution
- Miracle du rassasiement
- Miracle de prédication
- Du miracle du Christ au
   miracle de Jésus

   - Confession de foi
   - Jésus-Christ a priori
   - Prédication apostolique
   - Conscience populaire et
     Christ
   - Recherche de Jésus
   - Imagination fabulatrice et
     récit

- Jésus accomplit un miracle
   du Christ

Mise entre parenthèses du miracle

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L’imagination fabulatrice de la base de l’Église
et le récit


   Dans ce dernier volet, je jetterai sur le récit un regard global, à partir des analyses menées dans les premiers chapitres et des dernières remarques concernant la double activité de l’Église.

   Je soulignerai d’abord que le fond référentiel du récit correspond à la conscience que l’Église prenait d’elle-même par sa relation avec le Christ. L’Église se concevait comme une communauté de frères, vivant dans une communion de partage sous la bénédiction du Christ. La fraction du pain constituait à la fois la source profonde et la représentation de cette vie. Si l’on suit les différents axes référentiels, on notera aussi des expériences concrètes et déterminées de cette même vie, comme le phénomène extraordinaire de sa croissance, l’efficacité du partage des biens dans la résolution du problème de la faim, la puissance de la prédication de la parole, enfin l’organisation hiérarchique des communautés. Ces aspects de vie et de communauté s’offraient au regard des croyants comme un miracle du Christ, dont la fraction du pain était le miroir. Ce tableau se donne cependant à voir, dans le récit, comme une matière amorphe qui trouve une organisation formelle à un autre niveau et par un schéma qui lui reste étranger.
   Ce schéma s’articule par le croisement de deux lignes, dont l’une relève de la fraction eucharistique du pain, l’autre d’une bénédiction thaumaturgique de multiplication. Ce croisement s’opère sur la base d’une double fonction, puisque la ligne qui relève de la fraction du pain est statique, alors que l’autre, propre au prodige de multiplication, est dynamique. L’action est donc une au niveau de la représentation, mais double et ambivalente dans sa référence.

   Ses moments sont les suivants :
1 – Rassemblement d’une foule nombreuse ;
2 – Faim de la foule, et impossibilité d’être rassasiée puisqu’elle ne dispose que de cinq pains ;
3 – Intervention de « Jésus », qui leur ordonne de s’asseoir pour leur donner à manger ;
4 – Bénédiction, fraction et distribution des pains ;
5 – Rassasiement de la multitude par les pains bénis et rompus ;
6 – Ramassage des restes.

   Ces moments correspondent au processus d’une action miraculeuse de multiplication, mais si l’on passe du niveau sémantique au niveau référentiel on découvre l’autre ligne, propre à l’action liturgique, qui lui demeure parallèle en constituant une alternance de sens :
1 – Rassemblement de la foule – Assemblée de l’Église
2 – Faim – Besoin du salut
4 – Bénédiction des pains – Bénédiction du pain
5 – Rassasiement – Salut
6 – Ramassage des restes – Collecte du pain porté aux absents.

   Il est évident que la première ligne du schéma est apte à donner forme au contenu tiré de l’expérience de la vie de Jésus, dans la mesure où elle est jumelée avec le schéma de l’action liturgique qui, au niveau référentiel, est le symbole de cette vie.

   Il faut maintenant porter notre attention sur l’actant, qui est appelé « Jésus ». Sans doute doit-on comprendre par ce nom « Jésus de Nazareth », mais la présence de Jésus apparaît gratuite, car rien dans le récit ne nous autorise à nous rapporter à lui : puisque toutes ses déterminations ont un caractère structural et ne relèvent pas d’un contexte biographique, ce prodige aurait pu être accompli par une autre personne. D’autre part, au niveau référentiel, l’opérateur de ce miracle est le Christ. D’où vient donc Jésus ? L’hypothèse formulée dans ce chapitre donne à cette interrogation une réponse adéquate.
   L’Église a élaboré ce conte à partir d’un schéma biblique, qu’elle considérait concerner le Christ selon la chair, et en se référant à l’expérience de sa propre vie. Les Écritures ont ainsi offert la forme, cependant que l’expérience de la vie de l’Église – le miracle du Christ – en a constitué la matière. Le miracle est donc passé du Christ à Jésus en raison de la référence à Jésus du passage biblique qui a été à l’origine du processus d’interprétation.
   À nos yeux, il y a eu transposition par anticipation mais, pour l’Église, il s’agissait d’une interprétation par fabulation, appuyée sur les Écritures, unique lieu de connaissance du Christ. L’attribution du miracle à Jésus est donc a priori. Il reste à rechercher, pour vérifier cette hypothèse, si le schéma qui a servi de structure à ce nouveau discours est vraiment tiré des Écritures. Ce sera l’objet de la recherche du chapitre suivant.



1984




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ti17600 : 17/05/2017