ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris


Les apparitions dans les évangiles





Les apparitions de Jésus aux Onze


Sommaire

La foi au Christ ressuscité

Le Christ est ressuscité

Les apparitions d’anges aux femmes

Les apparitions «privées» de Jésus

Les apparitions de Jésus aux Onze
- Le Christ ressuscité
- Selon Marc
- Selon Matthieu
- Selon Luc
- Selon les Actes
- Selon Jean

La structure des textes évangéliques




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Le Christ ressuscité


   Nous traiterons dans ce chapitre des apparitions de Jésus-Christ aux Onze. Bien que les évangiles n’emploient pas, pour les désigner, un terme particulier qui les distinguerait des visions « pri­vées » (1), ces apparitions ont une importance toute spéciale. En effet, elles sont relatées à la fin des évangiles de la résurrection afin de bien souligner qu’il y a, dans le processus de la foi au Christ ressuscité, un crescendo du doute à la certitude, des femmes aux Onze, des visites « privées » aux apparitions collectives.

   Cette différence, l’évangile de Marc, dans son appendice, nous la fait mieux sentir que les autres évangiles, et cela est d’autant plus significatif que cette dernière page est une adjonction ultérieure, qui traduit moins la pensée d’un auteur qu’elle n’exprime une situation.
   Selon cet évangile, Jésus se serait tout d’abord manifesté (fainei) à Marie de Magdala et ensuite, sous d’autres traits (morfé) à « deux d’entre eux qui étaient en chemin et s’en allaient à la campagne » (Mc 15:10-13). Le même évangile souligne que, lorsque les deux disciples « revinrent l’annoncer aux autres (aux Onze), on ne les crut pas non plus », pas plus qu’on n’avait cru les femmes.
   Nous pouvons trouver dans l’évangile lui-même la raison de cette incrédulité : elle tient à la nature des apparitions. En effet, dans le premier cas, il s’agit de femmes sujettes, par la psychologie qui leur est propre, à transformer leurs rêves en visions, et, dans le second, l’apparition est discutable car Jésus se serait manifesté sous une autre « forme » que la sienne propre, ce qui peut donner à penser qu’il ne s’agit pas d’une apparition mais également d’une vision.

   On s’explique alors que Luc cherche à confirmer la vision des disciples d’Emmaüs par le témoignage de Pierre, car son autorité pourrait donner aux apparitions privées la marque d’authenticité qui leur manque. L’évangile de Marc, même dans son appendice, semble se faire l’écho d’une situation antérieure à la narration de Luc, qui contient, elle, des traces du processus réel selon lequel la foi des disciples s’est développée.

   Comme les autres évangélistes, Marc veut accentuer l’incrédulité des apôtres pour pouvoir, par la suite, faire de leur témoignage le pilier central de la foi au Christ ressuscité. La foi ne se fonde pas sur des confessions privées, mais sur les apôtres, sur ces Onze que Jésus lui-même a choisis pour annoncer aux nations la rémission des péchés et l’approche du Royaume. Les visions « privées » nécessitent, par conséquent, les apparitions collectives.
   Mais, la valeur du témoignage collectif mise à part, quel élément nouveau ces apparitions apportent-elles par rapport aux visions privées ? Comme nous le montrera l’analyse des textes, il s’agit là d’apparitions par lesquelles Jésus se manifeste directement, sans autre forme que la sienne propre. Dans tous les évangiles, nous verrons que c’est Jésus lui-même qui reproche aux Onze de ne pas avoir cru aux témoignages personnels, et qui fait comprendre qu’il leur apparaît pour effacer toute trace de doute, pour les convaincre par sa propre présence et par sa propre voix qu’il est vraiment ressuscité.

   Étant donné l’importance capitale de ces apparitions, on pourrait s’attendre à un parfait accord entre les évangiles sur tout ce qui les concerne : le déroulement des faits, le lieu et les circonstances dans lesquels le Christ apparaît.
   Or les narrations sont toutes différentes, surtout en ce qui concerne le lieu : Marc et Matthieu font apparaître le Seigneur en Galilée, Luc et Jean à Jérusalem. Il ne s’agit pas d’une erreur imputable à l’oubli – ce serait d’ailleurs un oubli impardonnable et fatal pour la foi ! – mais d’une différence voulue qui marque le caractère particulier de chaque récit. En effet, selon Marc et Matthieu, Jésus apparaît en Galilée parce que c’est là, et non ailleurs, qu’il tient à se manifester : c’est lui-même, ou des anges, qui chargent les femmes de dire aux Onze de se rendre en Galilée pour le voir. Chez Luc et Jean, au contraire, personne ne demande aux femmes d’an­noncer un quelconque rendez-vous : le Christ se manifestera dans la ville même où il a été crucifié et enterré, Jérusalem.

   Avant même d’approfondir les textes, nous pouvons affirmer qu’il s’agit ici des diverses traditions d’Églises ou de groupes d’Églises, qui veulent se considérer chacune comme le berceau de la résurrection. Nous pouvons dire que les évangiles trahissent déjà une rivalité entre les Églises quant à leur primauté et, par conséquent, à l’authenticité de leur tradition. Cette primauté et cette authenticité, elles veulent les établir en ne se fondant pas seulement sur l’origine apostolique, mais directe­ment sur l’évangile de la résurrection.
   Ainsi, au lieu d’avoir un récit qui explique l’Église, nous avons des narrations qui sont déjà marquées par la tradition des Églises. Il faut donc se demander dans quelle mesure ces textes sont empreints de tradition ecclésiastique, et jusqu’à quel point cette Église, qui devrait naître de l’événement de la résurrection, en précède le récit et l’ac­commode selon sa propre tradition. C’est à cette question que le présent chapitre voudrait répondre.

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(1) Pour les visions « privées », voir le chapitre précédent.   Retour au texte




c 1981




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t265000 : 13/04/2020