LIMITES DES MÉTHODES EXÉGÉTIQUES ?
Manque de repères
Dans la deuxième partie (
Procès), on entend les fragments entremêlés de trois thèses pour expliquer la crucifixion de
Jésus : motif politique et responsabilité essentiellement romaine (selon
Schwarz,
Maccoby et
Theissen), motif religieux et responsabilité fondamentalement juive (selon
Boismard et
Grelot)
(1) motifs à la fois religieux et politique, et double responsabilité (selon
Lemonon,
Freyne et
Trocmé). D’autres intervenants comme
Perrot ou
Grappe admettent qu’il y a un problème ; je n’ai pas réussi à déterminer s’ils le résolvent, et si oui comment.
La confrontation est évitée, diluée, par le découpage du sujet en six sous-thèmes. Pour les cinq premiers
(2), comme aucun consensus ne peut se dégager, le téléspectateur risque d’avoir cinq fois l’impression que tout et n’importe quoi peut être soutenu, et qu’il est donc inutile d’y réfléchir davantage. C'est sans doute pour cette raison qu’un commentateur a évoqué une «
obsédante musique du doute », un «
grand air du "on ne sait rien" ».
J’emprunte à l’historien
Jean Bauberot ces questions générales qui s’appliquent en particulier ici : «
Est-il réellement possible de construire son propre itinéraire sans avoir quelques indications claires et fiables sur les différentes directions possibles ? Le choix personnel ne requiert-il pas des repères un peu stables ? » (
La morale laïque contre l’ordre moral, Seuil, 1997, p. 329). Grâce au «
dispositif » choisi par les réalisateurs, les conditions sont-elles réunies dans cette partie pour que le spectateur puisse «
faire sa propre analyse » comme l’a affirmé
Mordillat ? (
Le Monde, 24/3/97)
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(1) Puech aussi (qui n’intervient pas dans Procès) a soutenu cette thèse dans la première partie (Crucifixion).
(2) « Y a-t-il eu procès devant le Sanhédrin ? » « De quoi Jésus a-t-il été accusé au regard de la Loi juive ? » « Pourquoi a-t-il été déféré devant Pilate ? » « De quoi a-t-il été accusé au regard du Droit romain ? » « Quel genre d’homme était Pilate ? ».