Stratégies de Corpus Christi
- Introduction
- Limites des métho- des exégétiques
. Manque de repères
. Paradoxe, prudence
. Frustration ?
. Limites de l'exégèse
. Méthode d’analyse référentielle
- Critique de l’anti- judaïsme chrétien
- Historique ?
- Archéologie de l'écriture
- De la modernité
- Le sens et les faits
- Conclusions
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LIMITES DES MÉTHODES EXÉGÉTIQUES ?
Problème insoluble, ou limites de l’exégèse historico-critique ?
Dans le livret correspondant à la deuxième partie, Mordillat et Prieur sont plus explicites : « Le procès... est un carrefour inextricable de contradictions, de digressions, d’impasses. Aucun effort harmonisant ne peut rendre au texte une cohérence acceptable. Aussi faut-il recevoir le texte comme il est : irréductible à une explication générale » ( Procès, p. 28).
Prieur l’a même présenté à L’Humanité comme une option de base dans la construction du documentaire : « Nous nous sommes vite rendus compte qu’il n’y avait pas de solution globale au problème que nous posions, mais une série de micro-réponses. Il fallait prendre chaque mot du texte de différents points de vue, avec une approche du judaïsme, du christianisme primitif, de l’archéologie, de l’épigraphie, de la paléographie, pour échapper à la synthèse et donc au catéchisme » (25/3/97).
Pourtant, selon Ennio Floris, cette conclusion exprime seulement le constat d’échec de la méthode dite « historico-critique » d’analyse des évangiles. Pour lui, « l’impasse dans laquelle se trouve la tradition de l’exégèse sur la question historique de Jésus... relève moins de l’impossibilité de trouver une solution, que des limites des méthodes employées ». Et par conséquent « poursuivre la recherche devient non seulement légitime, mais nécessaire » ( Sous le Christ, Jésus, p. 35).
Son raisonnement mérite d’être un peu détaillé :
« Dans leur discours, les Évangiles recèlent une antinomie qu’il faudra étudier... [Car elle] surgit de l’union entre une personne historique – Jésus – et un personnage de caractère mythique : le Christ... Quel est le mécanisme qui permet de jumeler une référence historique et une signification mythique ?... "Jésus-Christ" est l’expression dans laquelle mythe et histoire, référence à la chose et performance, narration et persuasion semblent unis dans un langage cohérent. Son analyse... comme jugement de la pensée constituera donc le point de départ de mon étude. » ( ibid. pp. 35-37).
« Ce phénomène est linguistique avant d’être historique... à la jonction de la signification et de la référence (1), mettant ainsi en jeu une structure spéciale de langage... Ainsi, il faut rechercher la structure du langage des Évangiles. Des exégètes, certes, ont cherché à atteindre cette structure en la faisant reposer sur le mythe, sur la légende, sur la catéchèse [la liturgie] , mais ce sont là des expressions partielles, et non la structure fondamentale du langage évangélique. » ( ibid. pp. 34-36).
« Pour désigner la caractéristique de cette méthode, on dira qu’elle est référentielle, par opposition à l’exégèse qui est sémantique... Une fois connu ce que le texte dit, elle cherche à quoi se réfère le dit du texte... Le problème du Jésus de l’histoire est référentiel, et non pas sémantique ou philologique. » ( ibid. pp. 34-38).
« Une des questions qui restent conditionnées par la théologie est précisément la recherche historique sur Jésus... Elle est restée dans une impasse, moins parce que les chercheurs manquaient d’érudition et de savoir, que parce qu’ils demeuraient, dans le fond de leur conscience, conditionnés par la foi... Jésus a été refoulé à cause de son interprétation comme Christ, on lui a dénié le droit d’entrer dans l’histoire... Il faut donc lui rendre justice. » ( ibid. pp. 116-117).
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(1) La « référence du récit » chez Floris ne doit surtout pas être confondue avec le « référent du signe » dans la linguistique saussurienne. Elle renvoie à une « linguistique de la parole » (au sens de Hjelmslev).
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