RÉCIT VÉRIDIQUE :
LE SENS ET LES FAITS
Vérité et liberté
Puis-je encore appeler cela « vérité », autrement que par naïveté ou par ruse comme l’a peut-être fait
Galilée, pour ne pas apparaître d’emblée « hérétique » ?
En effet, quand
Galilée – et après lui
Ennio Floris – sépare radicalement le langage scientifique (celui des recherches rigoureuses) et le langage commun (celui de la vie quotidienne, de l’éthique morale et religieuse, de la Bible), cette distinction est, selon
Geymonat, «
tellement simple – peut-être même simpliste – qu’elle ne peut manquer de nous laisser perplexes » (
Galilée, Seuil, coll. "Points Sciences", 1992, p. 96). Son argumentation vaut d’être détaillée :
Certes,
Galilée «
semblait attribuer une valeur égale aux deux langages en question » mais, pour lui, «
le langage scientifique possédait une incontestable supériorité ». En effet, «
le fond de sa pensée était le suivant : Aux vérités scientifiques, le langage commun (aussi bien les propositions qu’énoncent les hommes dans la vie quotidienne que celles dictées par l’Esprit-Saint dans la Bible) n’a absolument plus rien à opposer... Le raisonnement scientifique possède une valeur en soi qui est incontestable... le langage commun, par contre, a une valeur limitée... Les théologiens à l’esprit trop étroit qui se fondent sur la Bible pour imposer des limites à la science ne font que jeter le discrédit sur la Bible elle-même ». Par conséquent, «
l’autonomie que Galilée revendiquait pour la science était en réalité très large : il exigeait... qu’on la tint pour seule, parmi toutes les formes de connaissance, à détenir l’unique et définitif critère de vérité ». Et
Galilée lui-même affirmait que, devant l’avancée de la science, les hommes «
s’ils sont épris de vérité, ne devront pas s’irriter, mais, reconnaissant qu’ils se sont trompés, devront remercier celui qui leur montre la vérité » (ibid. pp. 98-100).
Pour
Floris, il n’est plus nécessaire de masquer cet état de fait. Ainsi, «
appeler la conscience à se situer autrement dans le système de la foi » implique cet impératif : «
Restons responsables de l’acte même de croire avec une conscience éclairée et libre, ne transformons pas notre foi en vérité ». Sinon, par naïveté, nous risquons sans cesse le glissement de sens vers « la Vérité » (Savoir supérieur, certitude absolue), au nom de laquelle tant d’« hérétiques » ont été exécutés, et les « blasphémateurs » et autres « apostats » sont encore stigmatisés.
Car si ces « vérités » débordent du cadre qui est le leur, en particulier si elles se déclarent « plus Vraies que l’Histoire », alors elles deviennent «
falsification », rupture délibérée avec la visée de l’Histoire, elles vont effectivement contre la recherche de la «
vérité historique », contre la diffusion de ses méthodes et de ses résultats. De même qu’en se prétendant « discours de Vérité sur la forme du
Cosmos », la doctrine catholique a freiné les recherches sur les mouvements de la
Terre (en condamnant tous les textes à ce sujet, de 1616 à 1822), fait obstacle à la diffusion des travaux de
Galilée, rompu avec la visée de l’Astronomie (en condamnant aussi l’œuvre de
Kepler), pour finalement être contrainte à reconnaître que c’était elle qui était dans l’erreur.
De même ceux qui ont pourfendu
Sous le Christ, Jésus en 1987, ceux qui voulaient qu’on en parle le moins possible, ceux qui ont caché son existence à
Mordillat et
Prieur aujourd’hui reconnaissent sa valeur, ou au moins son existence. Simplement parce que
Floris a parlé 2 minutes 35 dans la cinquième partie de
Corpus Christi ? Ou bien parce qu’ils savaient ce que pourrait représenter
ce livre pour la culture chrétienne ?