Le récit de Matthieu :
Première décision de Joseph : répudier sans bruit
«
Joseph, son mari, qui était un homme juste et ne voulait pas la dénoncer publiquement, résolut de la répudier sans bruit » (
Mt 1:19)
Joseph s’aperçut
qu’elle était enceinte.
Elle se liait par mariage avec lui, alors qu’elle s’était unie sexuellement avec un autre ! Cela ne pouvait que le conduire à rompre toute relation avec
elle, au point qu’il pensait
la dénoncer publiquement.
Il ne pouvait en effet pas ignorer qu’il était obligé de
la dénoncer, pour savoir avec certitude si
elle était ou non coupable.
Elle pouvait sortir indemne du jugement si
elle déclarait sous serment, n’avoir pas consenti au coït : agressée, elle avait appelé au secours. Mais la loi était très intransigeante et expéditive pour la femme à ce propos. Son témoignage était accepté si elle avait appelé au secours la nuit, mais pas le jour. Dans le premier cas, l’accusée n’était pas obligée d’apporter le témoignage de quelqu’un qui avait entendu ses cris, parce que la nuit oblige à supposer qu’il n’y avait personne au dehors. Mais pas dans le deuxième cas, car on devait présumer alors que quelqu’un l’avait entendue. Et si personne ne se présentait pour témoigner ? C’était la preuve qu’elle n’avait pas imploré de secours ! Présumée coupable, elle était condamnée à la lapidation, son enfant dans son sein.
C’est pourquoi
Joseph, en doutant que
Marie ait appelé et que personne ne soit venu à son secours, avait craint
qu’elle n’échappe pas à la lapidation.
Il avait donc décidé de ne pas
la dénoncer et de la quitter, sans déclarer cependant que l’enfant n’était pas de lui.
Marie aurait pu ainsi échapper à la condamnation en évitant le jugement.
Mais pourquoi alors l’abandonnait-il ?
Joseph était sûr de l’innocence de
Marie, mais ses raisons se fondaient sur des convictions personnelles fondées sur la loi. Devant celle-ci son mariage aurait été illégitime, parce
qu’il aurait été père légalement reconnu d’un enfant dont il n’était pas réellement le père, et
qu’il avait soustrait à la mort due pour le péché qui l’avait mis au monde. Pour un
Juif, la loi mosaïque n’était pas extérieure à la conscience morale parce qu’elle en était le fondement. Homme martyr dans la tension entre le droit de l’homme à son existence et la revendication de la loi de sa légitimité.
Il rentra chez lui et se jeta sur le lit, afin d’échapper à toute peine par le sommeil.