Les récits de la naissance de Jésus

   Le départ des bergers laisse les protagonistes du récit dans une impasse. Au niveau de l’énoncé, en effet, Marie et Joseph sont des personnes en marge de la société. L’image de crèche manifeste aussi dans leur enfant le fils de Dieu méconnu et rejeté par son peuple. Dans l’infrastructure du texte, la situation est encore plus précaire, puisque Marie apparaît toute seule avec son enfant, mère persécutée et en fuite. Il fallait donc chercher à donner une issue à l’histoire.

   La catégorie de la vierge du mythe offrait à Luc la possibilité de résoudre le problème par le thème de l’adoption, mais ce thème était en contradiction avec les données de l’information, selon lesquelles Marie aurait gardé l’enfant. Luc l’exploite tout de même, dans la mesure où l’adoption implique aussi l’accueil et la reconnaissance de l’enfant. Le problème qui se pose à Luc n’est pas de faire adopter l’enfant, mais de le faire accueillir et reconnaître comme fils de Dieu.
   Mais qui pouvait l’accueillir, alors que la cité où il devait naître et qui l’attendait ne le reconnaissait pas ? C’est alors que Luc recourt au témoignage de ceux qui avaient prévu et attendu cette naissance, les prophètes, représentants authentiques du peuple témoin. C’est dans ce but que deux personnages apparaîtront, Syméon et Anne. Pour donner à cette rencontre le contexte le plus adapté, Luc imagine que Joseph et Marie accomplissent toutes les prescriptions de la loi concernant la naissance de l’enfant, le lieu de cette rencontre étant donc le temple. Ainsi, au niveau du texte, Marie et Joseph ne sont-ils plus en marge de la société, mais deviennent un couple reconnu et pieux, tout à fait inscrit dans la légalité et la tradition, tandis qu’au niveau référentiel la jeune mère répudiée et fugitive retrouve sa dignité et son honneur dans le personnage de la mère du Christ.

   Dans ce chapitre, nous chercherons donc à lire le texte concernant la participation de Marie au rite de la purification.