Sommaire
GENÈSE ET MÉTHODE D’APPROCHE DES RÉCITS
LECTURE DU RÉCIT DE MATTHIEU
LECTURE DU RÉCIT DE LUC
L’annonce faite à Marie
La visite à Élisabeth
Le recensement
Couché dans une crèche
Les bergers
Le nom de Jésus
La purification
Un homme appelé Syméon
Le signe de la contradiction
L’épée
- Introduction
- Jésus, la contradiction
- Les référencesbibliques
- Syméon le vengeur
Anne la prophétesse
Marie gardait ces paroles
CONCLUSION
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Chez Luc, la vierge Marie parcourt toutes les étapes de l’héroïne mythique, sans pour autant en assumer l’angoisse. Elle apparaît toujours joyeuse, quoiqu’elle marche sur un feu de braises, car même lorsque, contrainte à accoucher l’enfant dans une crèche, elle aurait dû être assaillie par le désespoir, elle ne fait au contraire qu’accomplir l’espérance des hommes. Elle n’a pas peur de la nuit des temps qui l’enveloppe, puisqu’elle se place comme l’aube du jour naissant.
La souffrance cependant lui arrive, mais prophétiquement, par les paroles de Syméon : « et à toi-même une épée te transpercera l’âme » (Lc 2:35). Si l’auteur de ce récit avait été aussi l’écrivain de l’évangile, on aurait dû retrouver Marie au pied de la croix, son âme de mère transpercée par la douleur, mais dans le texte de Luc Marie est absente de la passion, et nous ne pouvons voir cette finale de Marie qu’au niveau de la prophétie, en à peine une ligne. Quoique bref, ce morceau théâtral est très étonnant, car il rompt l’allure idyllique du récit, transformant la figure bucolique de Marie en héroïne tragique.
Comment cette vierge, à laquelle on a ôté tout sentiment concret d’humanité peut-elle souffrir jusqu’à la mort ? Comment peut-elle tomber dans le tragique, alors que son personnage marquait le dépassement et la sublimation de sa condition de femme ? Ces interrogations seraient restées sans réponse si nous n’avions pas découvert en-deçà du niveau intentionnel du récit la présence de deux figurations de Marie : la vierge-mère et la femme « trouvée enceinte » (Mt 1:18). L’image tragique de l’épée viendrait donc de la situation de conflit entre les deux images, qui jouent dans le silence du texte le drame intérieur de l’écrivain. Mais qu’est ce drame ?
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