Sommaire
GENÈSE ET MÉTHODE D’APPROCHE DES RÉCITS
LECTURE DU RÉCIT DE MATTHIEU
LECTURE DU RÉCIT DE LUC
L’annonce faite à Marie
La visite à Élisabeth
Le recensement
Couché dans une crèche
Les bergers
Le nom de Jésus
La purification
Un homme appelé Syméon
Le signe de la contradiction
L’épée
- Introduction
- Jésus, la contradiction
- Les références bibliques
- Syméon le vengeur
Anne la prophétesse
Marie gardait ces paroles
CONCLUSION
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L’annonce du « signe de contradiction »
Syméon parle de Marie au moment où il annonce que son enfant deviendra « signe de contradiction » parmi le peuple (Lc 2:34-35). Il est légitime de penser que l’auteur du récit se référait à la mort de Jésus, qui a marqué la rupture définitive entre les deux discours sur Jésus : la parole messianique proclamée par ses disciples, et la contradiction, l’anti-discours, des juifs, négateurs de son messianisme.
La mort est la conséquence de la puissance de l’anti-discours, qui réussit à réduire le discours au silence. Autour de la croix, ceux qui parlent autour de lui sont ceux qui lui lancent des défis et se moquent de lui : « si tu es le roi des juifs, sauve-toi toi-même » (Lc 23:37). Il n’y a personne parmi ses disciples qui surgisse pour proclamer encore la parole, puisqu’ils se sont dispersés dans le silence et la peur. Les femmes qui regardent de loin demeurent muettes. L’importance théologique de ce dernier chapitre de l’évangile est moins la mort physique de Jésus que la mort de la parole qui le faisait Christ. La croix elle-même devient un signe de cette mort, puisqu’elle le désigne non comme un sauveur mais comme un condamné, non comme homme libre mais comme esclave. Le discours cède la place à l’anti-discours, pour entrer dans le silence et la souffrance de la parole.
Marie n’aurait pas pu échapper à la puissance meurtrière de l’anti-discours, puisqu’elle était au commencement du discours sur Jésus. Elle avait été le lieu où ce discours avait pris naissance, le personnage qui avait incarné le devenir de cette parole sur Jésus. Elle était, en tant que personne, ce discours même.
Il n’est donc pas étonnant que l’anti-discours – la parole est une épée – la blesse à mort : Marie est blessée dans son âme, et elle meurt avec le discours. Son absence du Golgotha chez Luc est signifiée par cette mort : si elle avait été là, elle aurait témoigné de lui par sa seule présence.
Jésus meurt donc seul, sans ses disciples et sans sa mère, puisqu’il meurt dans le silence de la parole qui le rend Christ. Sa mère était morte, en tant que personnage, avant lui, pour lui permettre justement de mourir dans l’obscurcissement de la parole.
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