ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Pierre Curie


Au risque de croire





Itinérance, une quête du sens :
Dieu contesté par Job


Sommaire

Préface
Quittez un monde bon
Vivre la foi dans le siècle

Présence de l’Église au monde

Église en dialogue avec le monde

Itinérance : une quête du sens
- Servitude et libération
- Dieu contesté par Job
  . Introduction
  . Le "Pourquoi ?" de Job
  . Le Dieu des "amis"
  . Job et la "mort de Dieu"
    - Seule la douleur
    - Quel Dieu ?
    - Job, croyant areligieux
    - Le Goël vivant
    - Dieu est mort
  . Dieu... au-delà de Dieu

Croire au-delà des perplexités

En écoutant l’Alléluiah d’Hændel




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Job et la « mort de Dieu » :
un croyant areligieux


   Dira-t-on que Job est un croyant areligieux, puisqu’il se présente devant ses faux-amis comme un homme qui « sait réfléchir » (Jb 12:3) ?

   Revendiquant la réflexion critique, qui le pose en face de l’Autre, des autres et de lui-même, il refuse de s’aliéner dans cet « Autre » mystérieux qu’est Dieu, ou dans les autres qui se déclarent les porte-paroles de la « sagesse ». Dans sa réflexion critique, il parvient à analyser la situation réelle. « Un homme devient la risée de son ami quand il crie vers Dieu pour avoir une réponse. On se moque du juste intègre. À l’infortune, le mépris ! Opinent les gens heureux : un coup de plus à qui chancelle ! Cependant, les tentes des pillards sont en paix… » (Jb 12:4-6). Alors, Job devient un théologien libre : il met en crise cette notion du Dieu omnipotent. « Interroge… le bétail pour t’instruire, les oiseaux du ciel pour t’informer ; les reptiles du sol te donneront des leçons… » (Jb 12:7-8). L’interro­gation de tous les êtres vivants signifie-t-elle que Dieu est le créateur ? Et bien, c’est à lui qu’il convient de faire remonter la cause de l’injustice.

   Job veut encore davantage : parler à Shaddaï, plaider sa cause lui-même, faire à Dieu des remontrances (Jb 13:3). Au-delà des affirmations religieuses sur le Dieu tout-puissant, il dénonce la prétention des clercs, détenteurs du pouvoir religieux qu’ils exercent, comme une usurpation sur les consciences malheureuses pour les maintenir esclaves d’un destin aveugle. « Vous, vous n’êtes que des charlatans, des médecins du néant » (Jb 13:4). En dénonçant l’autorité abusive et la fausse sagesse des clercs, Job espère parvenir à Shaddaï pour contester avec lui. « Je prends ma chair entre mes dents, je place ma vie dans mes mains. Il peut me tuer : je n’ai d’autre espoir que de justifier devant lui ma conduite » (Jb 13:14-16).
   La forme poétique devient celle d’un débat juridique, dans lequel le plaideur lance un défi à son adversaire en justice. « Voici, je vais procéder en justice, conscient d’être dans mon droit. Qui veut plaider avec moi ? » (Jb 13:18-19). Job ne consentira à se taire que s’il est convaincu d’erreur ou de culpabilité. « Alors, j’accepte d’être réduit au silence et de périr » (Jb 13:19). Mais auparavant, les rôles seront inversés : la parole ne sera pas donnée, d’abord, à Dieu comme juge souverain. Job se dresse, le premier, comme l’avocat de sa propre défense. Que cesse le « terrorisme » de Dieu ! « Écarte ta main qui pèse sur moi, et ne m’épouvante plus par ta terreur » (Jb 13:21). Job rejette toute crainte religieuse, il affronte de sujet à sujet, à égalité et dans la liberté, celui qui est devenu son adversaire.

   C’est sur la terre que se joue toute la vie de l’homme. Certes, comme la fleur bientôt fanée, la vie de l’homme est brève (Jb 14:2) (1) ! S’il est né ainsi, l’homme n’y est pour rien, pourquoi l’accabler davantage et lui rappeler sans cesse sa culpabilité et le terroriser sous un jugement moral ou religieux ? Au contraire, qu’on le laisse jouir en paix de cette durée éphémère, comme le mercenaire est lié à son temps de service ! « Puisque ses jours sont comptés… détourne de lui tes yeux, et laisse-le » (Jb 14:5-6). Moins heureux que l’arbre qui, une fois coupé, conserve un espoir, l’homme attend toute de sa vie terrestre. « L’homme, s’il meurt, reste inerte ; quand un humain expire, où donc est-il ? » (Jb 14:10). Le poète semble-t-il, n’espère pas de résurrection après la mort (2). Maintenant et ici se joue le destin de l’homme : « Une fois mort, peut-on revivre ? » (Jb 14:14).

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(1) Voir Is 40:6-8 ; Ps 37:2.   Retour au texte

(2) Voir Jb 7:9 ; 10:21 ; 14:7-22 ; Jb 16:12.   Retour au texte


juin 1971




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