L’écriture  des  évangiles

   Les apôtres et Paul avaient cherché à définir le Christ dans le but de connaître Jésus. En effet leur christologie leur offrait une grille qui permettait de comprendre la vie de celui-ci à la lumière d’une essence qui en révélait l’être en profondeur. La vie de Jésus coïncidait avec la vie terrestre du Christ, elle était pour les premiers l’accomplissement du Christ des Écritures, et pour le second celui de la Kénose du fils de Dieu.
   Il est donc légitime de penser que, pour déterminer concrètement cette connaissance, il ne leur restait qu’à se remémorer les faits dont ils avaient été eux-mêmes témoins pour les inscrire dans le cadre du schéma christique.

   Dans cette opération, ils durent cependant se heurter à une contradiction qui venait de leur propre démarche : comme nous l’avons vu dans le premier chapitre, ils étaient parvenus à affirmer que Jésus était le Christ non pas à partir de la connaissance des faits mais de celle des oracles messianiques. Ainsi leur définition du Christ n’était-elle pas tirée de leur expérience mais de l’interprétation des Écritures.
   Cette essence était donc a priori et, qui plus est, elle ne pouvait pas être conforme à l’image que Jésus avait donnée de lui-même par ses propres actes, puisqu’elle fut recherchée justement pour effacer cette image. Les informations qui surgissaient de la mémoire n’allaient-elles pas reproduire le portrait historique de Jésus et l’opposer à l’image christique ? Comment ces deux représentations ont-elles pu s’unir et prétendre toutes deux à la réalité de Jésus ?