ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris


Jésus le charpentier





Du fils naturel au fils de Dieu :
Qui est ma mère ? Qui sont mes frères ?


Sommaire

Du fils naturel au fils de Dieu
Fils d’une adultère
La famille de Jésus
Délire ou extase ?
La solitude de Jésus
Qui est ma mère ?
- À Capharnaüm
- La source de Marc
- La question de Jésus
- La nouvelle famille
- La nouvelle réalité
- Le sens des mots
- La souffrance de Marie

La Métanoïa

Le défi et la crise

La bonne nouvelle




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La source de Marc


   D’où Marc a-t-il pris cette information sur la vie de Jésus ? Sans doute de la même source qui l’avait renseigné au sujet de sa naissance naturelle. Il s’agit en effet d’une information du même genre, c’est-à-dire de celles que les évangélistes ont dû soumettre à une censure stricte puisqu’elles étaient compromettantes et scandaleuses. On comprend ainsi pourquoi Matthieu et Luc l’ont omise et pourquoi Marc cherche à en atténuer le choc.

   Pour que la mère et les frères de Jésus soient venus à Capharnaüm dans le but de s’emparer de lui, ils ont dû vraiment croire qu’il était fou. Le mot employé par Marc, « exeste » peut signifier aussi bien qu’il était affecté par une exaltation que par une aliénation religieuse, mais en ce temps l’aliénation religieuse n’était comprise que dans le cadre d’une possession démoniaque. La conviction qu’il était aliéné confirme donc l’autre information que nous avons examinée plus haut (1), selon laquelle il s’était rendu dans le désert poussé par l’esprit mauvais.
   Marc, d’ailleurs, le fait comprendre par le contexte où il inscrit sa séquence. En effet, il fait venir à Capharnaüm la famille de Jésus en même temps que les pharisiens, qui l’accusaient d’être possédé par le prince des démons. Dans la disposition structurale du récit, l’affirmation qu’il était aliéné est parallèle à celle selon laquelle il était possédé par les démons. Ainsi les deux affirmations sont-elles associées pour signifier le même phénomène, qu’elles saisissent à partir de deux points de vue différents : les pharisiens voulaient sa perte, alors que ses parents cherchaient à le sauver, c’est pourquoi ils voulaient s’emparer de lui pour le reconduire dans leur maison.

   Mais étaient-ils en droit de le faire ? Certes, si Jésus avait été un homme libre jouant par surcroît le rôle d’aîné, le comportement de ses frères serait apparu comme téméraire. Il devient compréhensible, en revanche, si on considère que Jésus, en tant que fils illégitime, était dans une situation juridique de mineur, soumis à l’autorité de ses frères. Cette soumission était d’autant plus obligatoire qu’il vivait dans la famille de la sœur de sa mère, astreint par un contrat de travail. Mais ses frères s’ap­puyaient surtout sur la conviction que Jésus n’était qu’un malade.
   Sûrs de leur bon droit, ils vinrent donc à Caphar­naüm en force, cautionnés par la présence de la mère. Cependant, une fois arrivés, ils rencontrèrent des obstacles qu’ils n’avaient pas prévus.
   La maison où Jésus se trouvait était constamment pleine de monde, ce qui rendait difficile l’exécution de leur plan. Restant hors de la maison et loin des gens qui l’entouraient, ils firent avertir Jésus qu’ils le demandaient. Ici, les récits des synoptiques se compliquent de nuances. Luc affirme qu’ils ne purent pas entrer dans la maison à cause de la foule, mais si on s’en tient au texte de Marc, ils l’auraient pu puisqu’ils envoyèrent quelqu’un pour avertir Jésus. Ils restèrent donc dehors délibérément, car ils pensaient que Jésus, à cette annonce, aurait quitté la salle pour les rencontrer tout seul. Leur comporte­ment donne à penser qu’ils avaient ourdi un plan unissant la force à la ruse, car une fois que Jésus, attiré surtout par la présence de sa mère, se serait trouvé au milieu d’eux ils l’auraient saisi et entrainé avec eux.
   Mais Jésus, les connaissant mieux qu’ils ne le croyaient, déjoua leur intrigue : il ne bougea pas. Homme de méditation plus que d’action, il comprit l’importance de ce moment et prononça l’inter­rogation qui transformait le fait épisodique en événement d’histoire : « Qui est ma mère et qui sont mes frères ? »

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(1) Voir.   Retour au texte




c 1976




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tk152000 : 20/06/2020