ANALYSE RÉFÉRENTIELLE |
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Ennio FlorisDe la naissance de Jésus-Christ
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Marie |
La mère de Jésus : |
Sommaire Avertissement Introduction La naissance chez Paul L’évangile de Marc Matthieu : naissance du roi des juifs Luc : naissance du fils de Dieu La naissance du héros Jean : le samaritain Marie - La mère de Jésus . La conception virginale . La mère de Jésus chez Jean - Approche théologique - Approche mythologique - Qui est ma mère ? Joseph Les noms de Jésus L’évangile de Thomas Témoignages des juifs Jésus . . . . . . . . - o 0 o - . . . . . . . . |
Approche théologiqueDans le récit des noces de Cana, je retiens les paroles que Jésus adresse à sa mère, qui lui fait remarquer qu’il n’y a plus de vin : « Femme, qu’y a-t-il entre toi et moi ? » (Jn 2:4). L’expression est typiquement sémitique. Elle est employée par une personne chaque fois qu’une autre se mêle de ses affaires, soit en sa faveur, soit à son encontre. Il s’agit d’une expression par laquelle on revendique sa propre liberté d’initiative et d’action : que s’est-il passé entre toi et moi pour que tu deviennes mon ennemi (Jg 11:12), pour que tu te venges à ma place (2 S 16:10), pour que tu interviennes dans ma vie au point de faire mourir mon enfant (1 R 17:18), pour que tu exerces sur nous un pouvoir d’exorciste (Mc 1:24 ; 5:7 ; Lc 4:34 ; 8:28). Cette expression employée par Jésus à l’égard de sa mère ne peut avoir une autre signification. La traduction de la Bible de Jérusalem « Que veux-tu, femme ? » est fausse et motivée par une idéologie théologique. Marie dit à son fils « ils n’ont plus de vin » avec l’intention inavouée de le pousser à faire un miracle. Elle prend l’initiative sur le choix du moment où Jésus commencera son activité. Jésus lui répond alors « qu’est-ce qui s’est passé de nouveau entre toi et moi, pour que tu t’occupes de mes affaires ? ». C’est une réponse semblable à celle que Luc rapporte dans la bouche de Jésus enfant, quand « ses parents » (Lc 2:41) lui reprochent de s’être éloigné d’eux : « Ne saviez-vous pas que je me dois aux affaires de mon père ? » (Lc 2:49). Si le Jésus du quatrième évangile avait parlé en français contemporain, il aurait dit à sa mère « occupe-toi de tes oignons » ! La réponse de Jésus suppose que sa mère dépasse les limites de sa relation maternelle pour s’ingérer dans les affaires qui lui sont propres en tant que fils de Dieu. L’évangéliste fait jouer ce rôle à la mère avec l’intention de réfuter, par la bouche de Jésus lui-même, un courant théologique déjà catholicisant selon lequel Marie aurait été mère par rapport au fils de Dieu. Jésus remet sa mère à sa place : le fait d’être sa mère par la chair ne lui donne aucun droit sur sa personne de fils de Dieu. Cette attitude de Jésus envers sa mère apparaît de façon encore plus claire dans le récit de la crucifixion : « Auprès de la croix se tenaient la mère de Jésus et la sœur de sa mère… Jésus voyant sa mère et auprès d’elle le disciple qu’il aimait, dit à la mère : femme voilà ton fils. Puis il dit au disciple : voilà ta mère. Et de ce moment, le disciple la prit chez lui » (Jn 19:25-27). La dernière phrase nous induirait à interpréter le récit de façon réaliste, ce serait oublier qu’il est allégorique. Or, dans l’allégorie, le fait ne sert que de trame littéraire destinée à supporter le sens idéal, théologique ou philosophique. La trame n’a pas valeur de signifié mais de signifiant. Pour comprendre cette valeur, il faut d’abord cerner ce sens. Dans le quatrième évangile, il faut distinguer le fils de Dieu (le logos) de son incarnation. Le logos s’est incarné non pour devenir fils de Dieu – puisqu’il l’était déjà – mais pour se manifester comme tel au monde. Dans la chair, le fils de Dieu est comme un signifié dans son signe. Étant charnel, ce signe est appelé à disparaître, et il disparaît précisément à la suite de la mort de Jésus. C’est pourquoi l’élévation de Jésus sur la croix est aussi le signe de sa divinité. Selon cette théologie, la mère de Jésus n’est pas la mère du fils de Dieu, mais de l’incarnation du fils de Dieu : elle est le lieu où le fils de Dieu a pris la chair de sa manifestation. Elle est mère au sens de matrice plus que de maternité. La mère de Jésus apparaît auprès de la croix pour jouer, en l’accomplissant, le même rôle littéraire qu’aux noces de Cana. S’il est vrai qu’elle ne parle pas, il est vrai aussi que sa présence muette devant Jésus qui meurt comme fils de Dieu devient parole. En tant que mère, elle prétend être la mère du fils de Dieu, comme elle avait prétendu choisir le moment de son action dans le monde. Jésus parle pour la remettre à sa place : « Femme, voilà ton fils » : le fils que tu cherches à t’approprier, ce n’est pas moi mais un autre. Jésus présente cet autre dans la personne du disciple qu’il aime ; ce disciple ne symbolise pas le Jésus fils de Dieu, mais le Jésus de sa manifestation dans la chair, la femme n’est mère que par rapport à ce dernier. Nous sommes bien loin de l’Église catholique – déjà présente en Matthieu et Luc –, qui fait Marie mère du fils de Dieu et donc de Dieu, comme des Églises protestantes qui banalisent la mère de Jésus. |
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t771210 : 22/12/2017