ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Michel Bruston

Corpus Christi







UN  ÉVÉNEMENT CULTUREL



Un événement culturel

- Un pari un peu fou
- Le succès au rendez-    vous
- Triomphe de la
   raison ?
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- «Introduction»
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   ture
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  . Incompréhension
  . Exégèse et système
    de Ptolémée

  . «Copernic» ou
    «Galilée»
  . Foi et intelligence
- Politique du silence
- Pourquoi mainte-
   nant ?

Effet analyseur de Corpus Christi


Stratégies de Corpus Christi



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RENAISSANCE

Exégèse et système de Ptolémée




    Devenu adulte, ma gêne est devenue perplexité. Certes, les exégètes ne nient pas l’existence des « dif­ficultés » du texte évangélique. Bien au contraire, chaque fois qu’ils en admettent une, ils l’analysent avec une attention et une érudition fantastique (cela se voit bien dans Corpus Christi) (1). Mais ils les étudient une par une, et non pas comme un problème général. Ainsi, ils répondent au coup par coup à chacune par quelque argument ad hoc, sans vraiment se soucier de rendre cohérentes entre elles ces « solutions ». Et cela aussi, hélas, se vérifie à plusieurs reprises dans Corpus Christi.
    Par exemple, dans la troisième partie Lemonon affirme : « Le génie du recueil néotestamentaire, c’est de rassembler des textes qui, à lecture première se contre­disent ». Et pourquoi est-ce qu’ils ne se contredisent plus « à lecture seconde » aux yeux de Lemonon ? Parce que « ce n’est pas sur la date de la Pâque qu’il y a débat dans la première communauté chrétienne, c’est sur le sens à donner, c’est sur l’accent théologique à mettre sur la mort de Jésus ». À mes yeux de scientifique (ingé­nieur passionné d’astronomie, d’histoire des sciences et de logique mathématique) l’édifice de plus en plus complexe, formé par ces « explications exégétiques », ressemblait à l’accumulation des « excentriques » et des « épicycles » dans le système de Ptolémée (selon lequel le Soleil et les planètes tournaient autour de la Terre) : cela permettait tout au plus de « sauver les apparences » au prix d’acrobaties et de subtilités indéfiniment crois­santes. Je cherchais un « Copernic » ou un « Ke­pler » pour rendre le système plus simple, et surtout moins arbitraire.

    Si la réponse de Lemonon éclaire l’existence d’une « petite » contradiction sur la date de la mort de Jésus, elle soulève par contrecoup des questions autrement plus redoutables. Comment se fait-il que la date réelle ne se soit pas imposée à la première communauté chrétienne comme une donnée incontestable, excluant d’office certaines interprétations, tout en en permettant d’autres – entre lesquelles il pouvait alors (et alors seulement) y avoir débat ? Le dernier repas du Seigneur avec ses disciples (repas de la Pâque, ou non ?) et le jour de la crucifixion du Messie, mort pour nos péchés, ce ne sont quand même pas des « détails » (sur lesquels on sait que même des témoins oculaires peuvent se contredire). Cela ne s’oublie pas facilement, même si l’on n’a pas pour objectif « l’exactitude d’un procès-verbal » selon l’expression de Thibaud. Comment et pourquoi de tels événements de la vie de Jésus ont-ils pu être oubliés ?

    « Comment montrer que cette histoire, tellement in­vestie au cours des siècles par les interprétations reli­gieuses, risque de disparaître sous elles ? » s’interrogent Mordillat et Prieur dans l’Introduction aux 5 livrets. Il y a pourtant une autre question : comment se fait-il qu’une quasi disparition de l’homme Jésus sous les interpréta­tions religieuses ait été possible ? J’aimerais savoir ce que leur a appris à ce sujet leur travail sur Antonin Arthaud.
    Certes « les chrétiens n’ont dissimulé ni la honte de la croix, ni la fuite des apôtres » (Cothenet, La Croix, 24/4/97). Cependant, il faut bien reconnaître que ces deux faits ne pouvaient que très difficilement être dis­simulés, d’autant que le second est cause du premier. Et sauf sur ces deux faits, c’est l’interprétation qui déter­mine le récit des événements. Une tare pire encore qu’une mort infamante et abandonnée de tous, a-t-elle pu être à l’origine de l’oubli de l’homme réel Jésus ?

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(1) « Leur capacité d’analyse des contradictions, des impasses, des différences est d’ailleurs ravageuse » reconnaît Mordillat quand il s’adresse à... L’Humanité (25/3/97). À Libération (25/3/97), il tient un discours assez différent (voir la note 2).
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Paris, le 21 juin 1997




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tb011092 : 28/12/2017