ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Michel Bruston

Corpus Christi







UN  ÉVÉNEMENT CULTUREL



Un événement culturel

- Un pari un peu fou
- Le succès au rendez-    vous
- Triomphe de la
   raison ?
- Incertitudes
- «Introduction»
- «Suite»
- Sciences et littéra-
   ture
- Événements
- Renaissance
  . Incompréhension
  . Exégèse et système
    de Ptolémée
  . «Copernic» ou
    «Galilée» ?
  . Foi et intelligence
- Politique du silence
- Pourquoi mainte-
   nant ?

Effet analyseur de Corpus Christi


Stratégies de Corpus Christi



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RENAISSANCE

Foi et intelligence




    Il est intéressant de faire le parallèle entre les recherches de Floris, la série Corpus Christi et l’ambi­tieux « programme de politique culturelle » de Galilée, dont j’ai parlé plus haut. (1)
    Des propos de Mordillat et Prieur sur leur docu­mentaire, je retiens ces quelques passages: « La forme peut paraître sévère et nécessite un effort de concen­tra­tion, mais tant mieux... Face à des chercheurs qui réfléchissent à voix haute, le spectateur peut faire sa propre analyse... La mise en doute des textes... peut dérouter... Notre propos peut paraître radical, comme un manifeste, mais il n’est pas démagogique » (Le Monde, 23-24/3/97). Ils évoquent pour moi ces propos tenus par Galilée vers la fin de sa vie, dans une lettre à son ami Benedetto Castelli : « Il est manifeste... que le doute en philosophie [par là il faut entendre : "en sciences"] est père de l’invention et qu’il ouvre la voie à la découverte du vrai » (lettre citée par Geymonat, Galilée, p. 260).
    De même, mes rencontres avec Floris me font penser aux discussions du jeune Vicenzio Viviani avec le grand savant, telles que celui-ci les évoque dans la suite de la lettre que je viens de citer : « Des objections m’avaient été faites par ce jeune homme... Elles m’obligèrent à tellement approfondir la question, dans un désir de le convaincre... qu’il m’arriva finalement, pour notre plus grand plaisir à tous deux, de découvrir, me semble-t-il, la démonstration concluante que j’enseigne désormais ».

    Comme Galilée autrefois, Corpus Christi et la méthode de Floris visent tous deux, et contrairement à l’exégèse traditionnelle, à donner à leurs arguments « une clarté perceptible à un grand nombre, là où, jusqu’ici, leur présentation en rendait la compréhension très difficile » (Galilée, cité par Geymonat, ibid. p. 100). Et il semblerait que Mordillat et Prieur y soient parve­nus : « En quelques jours, l’exégèse des Évangiles, qui restait un exercice confiné à quelques milliers de person­nes, est devenue une démarche très claire pour plus d’un million de français. Elle leur permet de comprendre en quoi les interprétations littérales et intégristes de ces textes n’ont aucun fondement ». (Écran total, 3/4/97). Ainsi que le commente Geymonat « il s’agit de ne pas circonscrire la fonction libératrice de la raison au cercle étroit des spécialistes, mais de l’étendre à tous les hommes » (ibid. p. 100). Un tel résultat serait magnifique en soi.

    Mais combien ont suivi la démarche de Corpus Christi assez loin pour saisir le véritable thème du documen­taire, c’est à dire la thèse de Mordillat et Prieur concernant « l’écriture et la mémoire » et « la puissance de l’écriture » (mis à part, bien sûr, ceux qui ne sont pas entrés du tout dans la problématique de la série...) ? La suite sera sans doute plus explicite sur ce point, et notamment la dernière partie prévue, dénommée Corpus (ou Écriture).

    L’appréciation d’Écran Total est d’ailleurs exagérée, comme le montre un commentaire de Télé Poche sur la partie Christos : « La fin de cette série est toujours aussi peu accessible. Ces débats étymologiques passionneront les spécialistes » (24/3/97).
    Pour conclure ce paragraphe sur un chant de victoire modeste mais réel, je citerai un exégète catholique : « Tout en sachant que la foi chrétienne ne découle pas d’une reconstitution, si honnête soit-elle, de la vie de Jésus, il [le croyant, le catholique] apprécie qu’on ait pu montrer que cette foi ne requiert pas la mise en veilleuse d’une certaine forme d’intelligence » (Simon Legasse, La Croix, 12/4/97).

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(1) Voir « Aboutissement ». Selon Geymonat, Galilée a écrit son fameux Dialogue des deux grands systèmes du monde – où il exposait pour la première fois ses arguments en faveur du système de Copernic – en toute conscience du risque d’inter­diction encouru par le livre, même s’il ne se doutait pas de ce qu’il allait subir dans sa personne. Il espérait par une discussion ouverte gagner l’Église catholique à la « cause » des sciences nouvelles. « Mais l’Église [catholique] ne voulut pas être éclairée et préféra maintenir tels quels ses propres décrets, sans se préoccuper... de savoir de quel côté penchait la vérité scientifique » (ibid. p. 198). A mon avis, Galilée voulait aussi que son pays, l’Italie, ne reste pas à la traîne des boulever­sements scientifiques et techniques qui s’amorçaient ; d’où son attitude très ambivalente vis à vis des savants allemands (tel Kepler qui l’a pourtant toujours soutenu).
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Paris, le 21 juin 1997




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tb011094 : 28/12/2017