Dans la controverse entre les apôtres et les Juifs nous avons mis en évidence leurs disputes. Les apôtres ont accusé les Juifs d’avoir tué celui que Dieu a ressuscité et déclaré Christ et Seigneur, les Juifs leur ont objecté qu’ils n’ont pas tué le Christ mais accusé auprès de l’autorité compétente un homme qu’ils ont seulement livré afin qu’il soit jugé. À leur tour, les apôtres ont rétorqué en précisant qu’ils n’ont pas, eux-mêmes, livré Jésus, mais qu’il l’a été par Judas, l’un des leurs.

   Ces disputes n’auraient été que rhétorique et idéologie, si elles n’avaient pas eu pour objet « le Christ », dont tous attendaient la venue pour le « rétablissement de toutes choses ».
   L’accusation des apôtres remettait en question le procès de Jésus devant le peuple, dont les responsables de la Loi ne pouvaient pas ne pas tenir compte. Mais pour qu’elle fût recevable, leur accusation aurait dû être formulée en termes juridiques, sinon laïques, dénonçant l’erreur judiciaire ou la corruption qui aurait vicié le jugement. En outre, il aurait fallu pouvoir apporter des preuves qui auraient innocenté le condamné. Sans doute les apôtres l’ont-ils voulu, en se présentant eux-mêmes en qualité de témoins. Mais en ont-ils pour autant apporté les preuves ? Et d’où ont-ils tiré ces informations ? Ce ne fut pas de l’expérience que chacun aurait pu avoir de Jésus, mais des Écritures qui annonçaient le Christ. De ce fait, leur témoignage ne portait pas sur le Jésus de l’histoire, mais sur le « Jésus-Christ » de leur foi.
   Quel fut alors le critère qui aurait permis aux apôtres de reconnaître le Christ, puisque Jésus pouvait être jugé et condamné comme un brigand ? La controverse relève donc d’un conflit profond à l’intérieur de la foi en Jésus-Christ.

   C’est pourquoi nous devons prêter à nouveau notre attention au processus de foi qui a conduit les apôtres de Jésus à Jésus-Christ, et préciser les raisons de la genèse de cette controverse.