ANALYSE RÉFÉRENTIELLE |
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Ennio FlorisDe la naissance de Jésus-Christ
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L’évangile de Luc : la naissance du fils de Dieu |
La présentation : |
Sommaire Avertissement Introduction La naissance chez Paul L’évangile de Marc Matthieu : naissance du roi des juifs Luc : naissance du fils de Dieu - L’annonciation - La visitation - La naissance - La présentation . Les apories . Siméon La naissance du héros Jean : le samaritain Marie Joseph Les noms de Jésus L’évangile de Thomas Témoignages des juifs Jésus . . . . . . . . - o 0 o - . . . . . . . . |
Une question fondamentale surgit au sujet de la nature de ce rite. Selon le texte, les deux époux accomplissent le rite à la fin de leur purification, trente-trois jours donc après la circoncision de l’enfant. Mais selon la loi, ce rite n’a pas pour objet la « présentation » (paratstenai) de l’enfant au Seigneur, mais la purification de la mère de la souillure qu’elle a contractée en ayant conçu et engendré un enfant. Si elle était aisée, la femme devait offrir un agneau d’un an pour l’holocauste et un pigeon ou une tourterelle pour l’expiation de ses péchés ; si elle était pauvre, l’offrande de deux colombes ou de deux tourterelles suffisait. Luc reprend cette cérémonie et la situe à la fin du temps de purification voulu par la loi, mais en la transformant en rite de « sanctification » de l’enfant. En effet, selon la loi, le premier né devait être offert au Seigneur, en souvenir de la libération de son peuple que Dieu avait réalisée en le faisant sortir d’Égypte. Luc a ainsi confondu les rites de la purification et de la consécration des premiers nés, créant ainsi un rite nouveau. Mais si l’auteur a créé un nouveau rite à partir de deux rites bibliques, on doit conclure qu’il a dû les modifier profondément, et que son but n’était pas de raconter un fait réel, mais de l’interpréter ou de l’inventer de toutes pièces. Pour ce qui est du rite de purification, il est vidé de sa fonction spécifique. En effet, il était destiné à purifier la femme qui, par sa conception et son enfantement, était devenue « impure ». Le sacrifice n’avait d’autre but que de laver la femme du péché. Dans le récit de Luc, la purification est considérée comme une chose déjà passée, et elle ne concerne pas que Marie mais l’ensemble du couple. Ainsi le rite dont il parle n’est pas celui de la purification, Marie n’a pas été purifiée mais l’enfant présenté. L’offrande n’a plus la valeur d’un sacrifice mais d’une action de grâce. Quant au second rite, il change lui aussi de sens. Selon la loi, on devait apporter un sacrifice pour le premier né, aussi bien des enfants que des animaux. Ce sacrifice avait valeur de rachat, car le premier né était propriété de Dieu depuis que Dieu avait fait mourir tous les premiers nés d’Égypte en réponse à la même condamnation que Pharaon avait portée contre les premiers nés d’Israël. Luc rapporte la loi en ces termes : « Tout mâle qui ouvre le premier le sein sera appelé saint de Dieu » (Lc 2:23), mais cette formulation est une interprétation de la loi et non une citation. En effet, la loi dit « sépare tout mâle qui ouvre le premier le sein pour le Seigneur » (Ex 13:12). Ainsi l’enfant n’est pas saint du fait qu’il est le premier né, mais il doit le devenir par sa mise à part pour Dieu, par sa consécration. Il est une « propriété » de Dieu, reconnue comme telle par le rite du rachat. Luc interprète les paroles du texte par un changement aussi bien grammatical que sémantique. Pour lui, le premier né n’est pas un enfant qui doit être sanctifié, mais il est « saint ». De plus Luc interprète cette sainteté dans un sens messianique plus que biblique : il est saint dans la mesure où il est signe du « premier né » messianique, le Christ, qui est saint parce qu’il est né d’une mère vierge et de l’esprit de Dieu. Ce sens est perceptible du fait que Luc change « sanctifier » en « saint » et qu’il donne à la phrase la forme d’un oracle : « sera appelé saint ». Luc construit son récit en prenant pour modèle deux rites de la loi, mais en les modifiant au point qu’ils perdent leur identité. Or cette modification n’était pas nécessaire, puisque Marie devait se présenter au temple sous son identité connue, celle de femme de Joseph, de même que Jésus fils de Joseph. Le rite aurait donc dû être accompli sans aucune modification. Mais pour Luc, ce rite ne pouvait être qu’une révélation de Jésus comme Christ. En effet, pour lui, ce rite, comme tout récit des Écritures, est une parole allégorique par laquelle Dieu a annoncé son fils. Le rite éclate alors comme une cérémonie destinée à proclamer la parole de Dieu. Ce qui lui était propre (la purification de la femme et le rachat de l’enfant) s’efface pour laisser place à la représentation de l’enfant de Dieu premier né de la vierge. Il s’agit alors d’un autre rite, qui n’est plus juif mais événement révélateur du Christ, acte dans lequel s’accomplit le rituel de l’Ancien Testament. Le rite raconté par Luc est théologique et n’existe que dans le récit : il s’agit d’un rite qui ne peut être accompli que par la vierge-mère et le Christ. On est en droit de penser qu’en dehors du récit et de la foi au Christ il n’y a rien, et que Luc a bâti son récit sur la base d’informations d’après lesquelles Marie ne pouvait pas se faire purifier ni accomplir le rachat de son premier né : Marie était considérée comme trop impure pour qu’on lui accorde la grâce de la purification, et Jésus trop illégitime pour être reconnu propriété de Dieu. Luc a interprété l’absence du rite comme l’éclatement du rite juif devant une réalité – la conception virginale et la sainteté de l’enfant – qu’il ne pouvait plus contenir. |
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t744100 : 21/12/2017