Le récit comprend quatre épisodes : le recensement et le voyage de Joseph et Marie enceinte à Bethléem ; l’accouchement de Marie et l’exposition de son enfant dans une crèche ; l’annonce de la naissance du Sauveur à des bergers par des anges ; la découverte de l’enfant par les bergers et la reconnaissance de son messianisme.

   Pris comme un conte, le récit ne pose pas de problème : les épisodes s’enchaînent avec cohérence, aboutissant à la reconnaissance du Sauveur dans l’enfant exposé dans la crèche. Le problème surgit si on se dit que ce conte est destiné à manifester la naissance de Jésus comme Christ : il s’agit de la naissance du Sauveur parce que les anges l’ont manifesté aux bergers.
   Or c’est à cet endroit que le récit offre une clé de lecture. En effet, les anges ne se contentent pas de révéler que le Sauveur est né, mais ils indiquent aussi le signe de sa reconnaissance : « vous trouverez un nouveau-né enveloppé dans des langes et couché dans une crèche ».
   Le récit indique donc le processus d’une reconnaissance par le langage des « signes », et il faut noter que ce processus joue sur un double registre : dans le fait raconté et dans la compréhension du fait par celui qui le raconte.

   Il est donc nécessaire de séparer le signe du signifié, c’est-à-dire la naissance de Jésus de celle du Christ, qui est censé être son signifié. Évidemment, cela suppose aussi l’existence d’un code qui permette de comprendre le signe par rapport à son signifié. Le code n’est pas présent de façon explicite dans le récit, il y est remplacé par la révélation des anges. Il faut aussi conclure que la manifestation des anges n’est que la personnification symbolique et religieuse de la lecture du signe au moyen de son propre code. Je chercherai donc à réfléchir sur le signe et sur le code.