ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris


Les récits de la naissance de Jésus





Lecture du récit de Luc :

Il y avait un homme appelé Syméon


Sommaire

GENÈSE ET MÉTHODE D’APPROCHE DES RÉCITS

LECTURE DU RÉCIT DE MATTHIEU

LECTURE DU RÉCIT DE LUC
L’annonce faite à Marie
La visite à Élisabeth
Le recensement
Couché dans une crèche
Les bergers
Le nom de Jésus
La purification
Un homme appelé Syméon
- Introduction
- L’errance de Marie
- Syméon sans contexte
- Marie, Judith et Dina
- Syméon peut mourir
Le signe de la contradiction
L’épée
Anne la prophétesse
Marie gardait ces paroles

CONCLUSION



. . . . . . . . - o 0 o - . . . . . . . .

L’errance de la jeune mère



   Chez Luc, Marie suit l’errance de la jeune mère du mythe dans toutes les étapes de sa souffrance. Nous l’avons laissée au moment où les bergers découvrent l’enfant qu’elle a exposé dans la crèche, et selon le modèle, les bergers auraient dû recueillir l’enfant et le porter chez leur patron pour en être adopté. Ce patron est quelque fois un roi, d’autres fois un homme qui en devient gardien par prémonition divine. Or, chez Luc, les bergers n’emmènent pas avec eux l’enfant, qui reste confié à sa mère.
   Il convient de penser que Luc n’a pas pu plier aux exigences du modèle une matière d’information qui lui résistait, autrement dit Jésus, quoiqu’exposé, ne fut pas adopté. S’il a pu échapper à la mort, s’il a vécu, c’est grâce à sa mère qui lui a aussi servi de nourrice. Elle ne pouvait cependant pas lui donner un nom et le légitimer, d’où le problème rencontré par Luc, tiraillé entre une structure qui se révélait jusqu’à ce moment opératoire et une réalité qui ne se soumettait pas à l’interprétation. Il ne s’agissait pas seulement d’un problème d’écriture, car l’opposition entre les niveaux du texte se reflétait sur son âme de croyant : il ne pouvait transposer dans l’écrit une réalité de fait aussi cruelle qu’honteuse pour le Sauveur. Tout en restant dans les limites formelles de la structure, il s’abandonne donc à une sublimation créatrice – rêve poétique – où Jésus est adopté. Mais par qui et comment ? Pour le savoir, il faut pénétrer dans le jeu complexe des références bibliques et symboliques qui constituent l’infrastructure de la psychologie de Luc.

   Revenons à la crèche. Ce symbole met en évidence que Jésus n’a pas été reconnu ni reçu par les siens. L’exposition de l’enfant prend le sens d’une accusation de Marie contre le judaïsme, qui n’a pas « reconnu » le Seigneur, en même temps qu’il marque l’accomplissement d’un signe prophétique. Il y a dans ce signe le reflet d’une contradiction existant dans la conscience historique du peuple juif car, si celui-ci avait reconnu d’avance la venue du Christ, il le méconnaissait lorsqu’il venait.
   La déception de Luc face à cette méconnaissance et à ce rejet trouvait ainsi dans le même symbole la possibilité d’une catharsis, puisqu’il lui offrait à côté du peuple infidèle, comme le soutenant dans sa propre existence, le peuple prophète qui l’avait « connu ». Il ne lui restait que de refouler le peuple mécréant pour faire approcher de l’enfant Jésus le peuple croyant, le faisant surgir de l’espace imaginaire. Ainsi réussit-il à ôter la contradiction dans la conscience juive en lui substituant une autre conscience historique.

   Pour construire ce personnage, Luc a dû se rapporter au processus herméneutique poursuivi par l’Église dans la construction de la christologie, en vue de retrouver les patriarches et les prophètes, la figure messianique et les symboles, qui avaient servi à l’Église pour façonner le personnage christique de Jésus.
   L’analyse de l’œuvre de Luc nous permet de penser à Abraham et à Moïse, Samuel et David, Élie et les prophètes, sans parler des autres personnages et des autres figures qui parsèment l’itinéraire messianique biblique. Quoique différents par leur rôle et leur importance, tous ces personnages s’étaient rencontrés au niveau de l’interprétation biblique de l’Église, puisqu’ils avaient en commun la tâche d’annoncer le Christ. Tous furent des hommes qui avaient vu, dès lors Luc put les réunir en un personnage riche de sens et chargé d’âge, quoique simple dans son caractère : Syméon.



1982




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tj22081 : 08/12/2018