ANALYSE RÉFÉRENTIELLE |
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Ennio FlorisJudas |
Introduction |
3- Le processus phénoménologique de la foi en Jésus-Christ |
PROLOGUE INTRODUCTION - La narration des évangiles - Documents d’histoire ? - Processus phénoméno- logique de la foi - Le Christ - Jésus - Jésus est le Christ - Jésus comme Christ - Les évangiles entre raison et foi - Les évangiles comme anti-histoire - Fois - Approche historique de Jésus - Recherche historique sur Judas REGARD CRITIQUE SUR LES ÉVANGILES DU JUDAS DE L’HISTOIRE AU JUDAS DES RÉCITS ÉPILOGUE ANNEXES . . . . . . . - o 0 o - . . . . . . . |
Jésus est le ChristÀ travers les évangiles de Jean et de Luc, venons-en aux raisons qui ont conduit les disciples à croire que Jésus était le Christ, en dépit de la conviction qu’il avait été coupable des crimes dont on l’avait accusé. Selon Jean, Marie de Magdala, s’étant rendue au sépulcre, le trouva vide. Supposant que le corps de Jésus avait été volé, elle alla l’annoncer aux disciples Pierre et Jean, qui se rendirent à leur tour au sépulcre. Pierre entra et « vit que les bandes étaient à terre, mais que le linge qu’on avait mis sur la tête de Jésus était plié à part. Alors l’autre disciple entra aussi : il vit et il crut » (Jn 20:6-8). Qu’ont-ils cru ? Assurément, que Jésus était ressuscité, bien qu’ignorant encore que, selon les Écritures, il devait ressusciter. Mais ils ne virent pas le ressuscité, seulement que le tombeau était vide et que le linge était plié et mis à part. Ces signes furent pour eux les seuls indices de la résurrection de Jésus. Luc raconte que deux disciples, ayant appris que le tombeau de Jésus avait été trouvé vide, quittèrent Jérusalem pour se rendre à Emmaüs, tout tristes de ce qui s’était passé. En chemin, ils rencontrèrent un voyageur qui, les voyant ainsi, leur demanda la raison de leur chagrin. « Ce qui est arrivé au sujet de Jésus de Nazareth, répondirent-ils, qui était prophète... comme les principaux sacrificateurs et nos magistrats l’ont livré pour le faire condamner à mort et l’ont crucifié » (Lc 24:19-20). Alors l’homme leur dit : « Ô hommes sans intelligence et dont le cœur est lent à croire tout ce qu’ont dit les prophètes. Ne fallait-il-pas que le Christ souffre ces choses et qu’il entre dans sa gloire ? Et, commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur interpréta dans toutes les Écritures ce qui le concernait » (Lc 24:25-26) L’étranger était Jésus, qui fut aussitôt reconnu par eux. Dans ce récit, Luc ne relate pas une rencontre réelle des disciples avec le ressuscité sur le chemin d’Emmaüs, mais le processus intérieur de leur foi, par lequel ils parvinrent à reconnaître, par l’interprétation des Écritures, que Jésus était le Christ. Ce récit s’inspire de la forme littéraire du « retour du héros », utilisée par Homère et les tragiques grecs, mais aussi par la Bible, à propos de Joseph (Gn 45). Le héros, tel Ulysse de retour dans sa patrie après une longue absence, n’est reconnu par les siens qu’à travers des « signes » qu’il donne lui-même. De même le Christ, qu’on croit exister incognito en Jésus, n’est reconnu que par des « signes ». Les Juifs, n’ayant pas su les reconnaître, ne l’ont pas accueilli (Jn 1:11). Jusqu’à sa mort, Jésus fut une énigme pour ses disciples. Prophète, il s’était montré aussi compatissant envers les humbles que sévère et dur envers les pharisiens, les scribes interprètes de la Loi, et les sacrificateurs. Il s’était attaqué à eux, les dénigrant et les accusant de trahir la Loi, alors qu’eux l’accusaient de l’avoir transgressée et reniée. Il fut condamné comme faux prophète et criminel, abandonné par Dieu, même ses disciples trouvèrent sa mission scandaleuse. Mais il demeura pour eux une énigme, par un surplus de sens qui échappait à leur entendement. C’est pourquoi ils empruntèrent le chemin des Écritures. La vue de Jésus souffrant et agonisant sur la croix suscita en eux l’image du serviteur de l’Éternel, « figure du Christ » : le Fils de Dieu condamné à mort pour des fautes qu’il n’avait pas commises. Jésus mourait en portant sur lui les péchés des hommes et, dans sa chair, le signe du Christ qui devait venir. Paul a raconté à plusieurs reprises l’histoire de sa conversion. Juif issu d’une des sectes parmi les plus orthodoxes et les plus fondamentalistes, il s’était offert aux sacrificateurs comme agent de la persécution de l’Église naissante. Il dénonçait les croyants, les mettant en prison et les soumettant à la torture afin qu’ils s’avouent coupables (Ga 1:13). Muni de lettres de créances octroyées par les sacrificateurs, il se rendait à Damas pour y rechercher des adeptes de la nouvelle secte, quand un éclat de lumière le jeta par terre et qu’une voix s’adressa à lui : « Saül, Saül, pourquoi me persécutes-tu ? » À la demande : « Qui es-tu ? » la voix répondit : « Je suis Jésus, que tu persécutes » (Ac 26:12-15). Ce récit ne s’éloigne qu’en apparence de la forme littéraire du retour du héros. Selon Aristote, le héros donne pour signe le rappel d’un souvenir, mais aussi l’affirmation solennelle de sa propre identité : « Je suis ». Rappelons que Paul fut ébloui par une lumière, dont les compagnons de route furent aussi les témoins, mais qu’il ne vit pas Jésus. Seul, toutefois, il entendit la voix. Ce fait est donc survenu à l’intérieur de lui-même : l’apparition de Jésus ne fut qu’un phénomène de sublimation de sa crise de conscience. Lié aux sacrificateurs, Paul ne pouvait connaître Jésus que par leurs accusations, sans doute contenues dans les actes du procès. D’où sa conviction qu’annoncer Jésus comme le Christ était une abomination qui ne pouvait pas échapper aux rigueurs de la Loi. En effet, Jésus était coupable, entre autres, d’avoir combattu le Judaïsme dans ses traditions et aussi dans sa Loi. Paul persécutait donc les chrétiens afin de condamner Jésus à une seconde mort, beaucoup plus définitive que celle subie sur la croix : l’ôter de la mémoire des hommes. Mais, en homme juste, il voulut se renseigner sur sa doctrine afin de connaître les raisons de son antijudaïsme. Mais combattre Jésus qui était tenu pour le Christ, acculait Paul à le juger à la lumière du « Christ des Écritures ». Il se trouva donc engagé dans une critique de la Loi, en relation au Christ. Il découvrit que la Loi punissait le pécheur sans le rendre juste pour autant. Sa malédiction pesait sur lui comme une menace existentielle : « Maudit est quiconque n’observe pas tout ce qui est écrit dans le livre de la Loi et ne le met pas en pratique » (Dt 27:26 ; Ga 3:10). Il attendait la venue du Christ qui libérerait les hommes du péché, mais il dut s’apercevoir que sa critique de la Loi rejoignait celle de Jésus. En pensant au Christ, l’image du « serviteur de l’Éternel », « frappé pour les péchés du peuple » (Is 53:8), pécheur pour les pécheurs, vint à son esprit. Puisque Jésus était mort sur la croix, comme un homme maudit, il était donc le Christ. « Christ nous a rachetés de la malédiction de la Loi, étant devenu malédiction pour nous, car il est écrit : maudit quiconque est pendu au bois » (Dt 21:23 ; Ga 3:13). Cette conviction se manifesta par une voix, celle de Jésus qui déclarait lui-même être le Christ : « Je suis ce Jésus que tu persécutes ». Voix qui était l’expression de la rencontre dans son esprit du Jésus mort sur la croix et du serviteur de l’Éternel. En résumé, je dirai que les apôtres crurent que Jésus était le Christ non de son vivant mais après sa mort, en interprétant les Écritures auxquelles ils s’adressèrent pour résoudre l’énigme qu’était pour eux Jésus qui, parlant et agissant en prophète, s’opposait aux hommes responsables de la Loi, comme à la Loi elle-même. Mais incapable de donner un signe « venant du ciel » pour attester de son prophétisme, Jésus fut poursuivi en justice et condamné à mort comme faux prophète. Les Écritures concernant le Christ et, particulièrement, les oracles du « serviteur de l’Éternel », firent comprendre aux disciples que les raisons qui les avaient poussés à abandonner et à renier leur maître, étaient celles par lesquelles les Écritures désignaient les signes du Christ. Jésus avait été condamné à mort non pour avoir commis des crimes, mais pour être volontairement devenu pécheur afin de racheter les hommes du péché. Le tombeau vide fut le signe qu’il était ressuscité, mais il montrait aussi qu’il était le Christ, ayant reçu de Dieu la « glorification », que les Écritures annonçaient au « serviteur de l’Éternel » (Is 53:11-12). |
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t602330 : 05/11/2017