ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris


Judas




I- Regard critique sur les évangiles




3- À Jérusalem, pendant les fêtes de la Pâque



PROLOGUE

INTRODUCTION

REGARD CRITIQUE SUR LES ÉVANGILES
- L’annonce de la trahison
- Le contexte historique
- Les fêtes de la Pâque
  - Résurrection de Lazare
  - L’onction de Marie
  - L’annonce du départ
  - Rencontre avec des Grecs
  - La cène de la Pâque
- Gethsémani
- Le récit de la trahison
- La trahison simulée
- L’arrestation de Jésus
- Troisième rencontre
- Jésus, entre prophétie et
   politique

- La mort de Judas

DU JUDAS DE L’HIS­TOIRE AU JUDAS DES RÉCITS

ÉPILOGUE

ANNEXES


. . . . . . . - o 0 o - . . . . . . .

La Pâque


   Jésus prit la cène, de nuit, la veille de Pâque et le repas fut imprégné de l’esprit de la fête et d’une tristesse teintée d’angoisse. Deux événements incitèrent les disciples à la préparer : le mandat d’arrêt du Sanhédrin contre Jésus et l’obligation faite à tout individu de le dénoncer. C’est pourquoi les synoptiques placent le mandat d’arrêt trois jours avant la Pâque, lorsque Jésus se trouvait à Béthanie (Mc 14:1).

   Que cette célébration de la cène pascale soit celle d’un fugitif ressort de sa préparation. Marc écrit à ce sujet : « Les disciples de Jésus lui dirent : Où veux-tu que nous allions te préparer la Pâque ? Et il envoya deux de ses disciples et leur dit : allez à la ville, vous trouverez un homme portant une cruche d’eau, suivez-le. Où qu'il entre, dites au maître de la maison : le maître dit : où est le lieu où je mangerai la Pâque avec mes disciples ? Et il vous montrera une grande chambre meublée toute prête : c’est là que vous préparerez la Pâque » (Mc 14:12-15).
   Ceci est un discours codé : la rencontre a déjà été préparée avec méticulosité afin que personne ne connaisse le lieu de la cène et de la présence de Jésus On peut supposer que ce plan avait déjà été établi après la première venue de Jésus à Béthanie.
   Cette préparation nous permet de penser que la cène a été célébrée selon le rite, avec le pain sans levain, l’agneau et le vin. Selon les récits des synoptiques, elle n’aurait été consommée qu’avec le pain et le vin, sans l’agneau. Mais, même si elle n’a pas été tout à fait conforme à la tradition, elle est dominée par un sentiment de peur et d’angoisse comme la Pâque des origines. En effet, celle-ci aussi avait été célébrée après l’interdiction du Pharaon aux hébreux de quitter le pays et la volonté des ceux-ci de s’en aller. On mangeait du pain sans levain pour signifier la situation d’esclavage du peuple, et on consommait l’agneau, comme symbole des « premiers nés » tués par le Monarque. Elle rappelait une situation de poursuite et de fuite, de mort et de libération, de peur et d’espérance (Ex 12).

   Venons-en aux deux informations que l’annonce de la trahison de Judas avait refoulées et qui sont apparues par la critique du récit : l’offre du pain trempé faite à Judas par Jésus et l’engagement que cette offre exigeait de lui qu’il ouvrit à Jésus le chemin vers la terre des Grecs, sous le signe de Jonas.
   Quant au pain trempé, Jean est le seul parmi les évangélistes à le rapporter, tout en en refoulant le véritable sens inscrit dans la signification pascale. Dans le rite pascal originel de l’Exode, non seulement on mangeait le pain azyme et l’agneau, mais on trempait l’hysope dans le sang pour en asperger le linteau des portes (Ex 12:7). Par la suite, le sang fut symbolisé par le vin de la coupe.
   En trempant le pain dans la coupe, Jésus l’aspergeait du sang du rite, dans la mesure où la coupe était à la fois celle du rite concernant le peuple poursuivi jusqu'à la mort, et la sienne : il trempait aussi le pain dans son sang. Jésus se liait donc à Judas et le liait à lui par son sang, selon le rite de la Pâque. Le maître et le disciple se liaient l’un à l’autre en une seule âme. Marqué du sceau de la Pâque, l’acte était celui d’une alliance qui ne pouvait être rompue que par la mort.

   Que Jésus se soit lié à Judas par le sang du rite pascal et par le sien impliquait qu’il confiait à Judas une tâche qui serait accomplie au risque de leur vie. Cet engagement total ne pouvait souffrir d’autre limite que la mort.
   C’est pourquoi, aussitôt reçu le pain trempé, Judas s’en alla. Les disciples ignoraient pourquoi et où il s’en allait, ils pensaient qu’il allait préparer la Pâque. On peut supposer que l’action que Judas devait accomplir était intime et secrète. Mais nous, qui connaissons le contexte et le danger qui pesait sur Jésus et sur son œuvre, ne pouvons pas douter qu’il s’agissait d’une action en vue du départ de Jésus à l’étranger. La Pâque signifiait un passage pour le peuple lors de sa première célébration, comme pour Jésus. Le peuple devait aller vers la terre promise, et Jésus devait aller vers la terre des Gentils, afin de prêcher l’Évangile. Le voyage de Jésus est lié au premier, dans la mesure où il s’inscrit dans sa signification.

   Nous ignorons encore ce que Judas avait l’intention de faire dans la nuit. Devait-il préparer la Pâque, ou le départ du maître ? Selon les paroles de Jésus : « Ce que tu fais, fais-le vite », cette dernière hypothèse semble évidente. Ces paroles seraient incompréhensibles si elles s’adressaient à un traître, comme le suppose Jean. Elles prennent, au contraire, tout leur sens si Jésus exhortait Judas à partir le plus rapidement possible. La police veillait. Déjà avertie par des traîtres, elle avait pu fixer l’exécution du mandat d’arrêt au cours de cette nuit même, Judas devait donc se presser pour que son action aboutisse. C’était la nuit, qui favorise la fuite comme les pièges.



juillet 1987




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