ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris


Les poèmes d’amour
de  Dante  Alighieri




La dame gentille :

invitation à l’amour




Rime LVII

  Madonna, quel signor che voi portate
ne gli occhi, tal che vince ogni possanza,
mi dona sicuranza
che voi sarete amica di pietate ;
però che là dov’ei fa dimoranza,
ed ha in compagnia molta beltate,
tragge tutta bontate
a sé,come principioc’ha possanza.
Ond’io conforto sempre mia speranza,
la qual è stata tanto combattuta,
che sarebbe perduta,
se non fosse che Amore
contro ogni avversità le dà valore
con la sua vista e con la rimembranza
del dolce loco e del soave fiore
che di novo colore
cerchiò la mente mia,
merzé di vostra grande cortesia.

  Madame, le seigneur que vous portez
Dans les yeux et qui vainc toute puissance
Me donne l’assurance
Que vous serez bien amie de pitié.
Et là où il fait sa résidence
Et vit en compagnie de la beauté
Tire toute bonté
À soi, comme principe de puissance.
Je me conforte encor dans l’espérance
Qui a toujours été très combattue
Et qui serait perdue
Si Amour par faveur
Contre le mal ne lui donnait valeur
Par sa vue et la chère souvenance
Du lieu très doux et la suave fleur
Qui, de belle couleur,
Ceignit ma fantaisie
Par la grâce de votre courtoisie.


Sommaire
Avertissement au lecteur
Capoversi
Premiers vers

Introduction

Aux fidèles d’Amour

Les soixante belles de Florence

Béatrice, dame du secret d’Amour

La dame gentille
- Invitation à l’amour
- Le nouvel amour
- Le refus de la dame
   gentille
- L’espoir de Dante
- Vers un autre amour

Béatrice refuse de saluer Dante

De l’amour à la louange

Lamentations sur la maladie de Béatrice

Mort et glorification

La dame gentille

La Pargoletta

Le refus de la dame gentille

La dame-pierre



. . . . . . . - o 0 o - . . . . . . .

   Ce poème n’est composé que d’une stance, qui aurait dû être suivie par d’autres dans le cadre d’une chanson d’invitation à l’amour. Il est dommage qu’il en soit resté à la première strophe, car nous ne pouvons pas connaître ce que la dame aurait pu répondre.
   Le style est ancien, mais le discours très fluide, manifestant une pensée subtile, faite de tours et de détours avec une finesse toute courtoise. Musicalement, on pourrait dire qu’il s’agit d’un andante. Cette invitation est conforme à celles que nous trouvons dans les textes de dialogues des traités d’amour, où l’amant cherche toujours à s’introduire en commentant la beauté et l’honnêteté de la dame désirée, voyant en celles-ci le signe que c’est Amour lui-même qui a voulu cette rencontre.

   Une image a attiré l’attention des commentateurs : « suave fleur ». Contini pense qu’on peut lier ce poème à la ballade de Fleurette, et que la femme à laquelle le poète s’adresse est précisément Fleurette. Mais nous avons vu que Fleurette est un personnage de la lyrique plutôt qu’une personne réelle. Il n’avait pas échappé à cette dame qu’elle n’avait qu’un rôle subalterne dans la ballade, dans la mesure où elle n’était pas la dame aimée mais seulement l’occasion de faire venir celle-ci pour que son amoureux célèbre ses louanges. On peut alors penser qu’à la fin de la danse elle prend une fleur de sa guirlande et l’offre au poète, se présentant elle-même comme la dame que le poète appelle.
   Cette supposition explique le souvenir que Dante a du lieu et de la « fleur suave », mais elle nous oblige à en faire une autre. Dante avait composé cette ballade dans le but de favoriser une relation avec des femmes permettant de détourner les regards de son amour avec Béatrice. Il voulait donc se livrer à un jeu poétique qui l’aurait apaisé sans pour autant porter atteinte à son amour pour Béatrice. C’est cette hypothèse qui me pousse à penser que cette femme est la dame gentille, à laquelle il avait pensé pour trouver un écran à son amour… mais il n’avait pas pensé que la femme est toujours capable de dénouer les intrigues et d’en créer de plus compliquées et dangereuses. Ayant compris que Dante a un autre amour, elle lui offre une fleur de sa guirlande, se présentant elle-même comme une dame possible ; elle offre et elle s’en va, elle blesse et elle attend que, frappé, le poète vienne à elle.



c 1977




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