ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris


Judas




I- Regard critique sur les évangiles




10- La mort de Judas



PROLOGUE

INTRODUCTION

REGARD CRITIQUE SUR LES ÉVANGILES
- L’annonce de la trahison
- Le contexte historique
- Les fêtes de la Pâque
- Gethsémani
- Le récit de la trahison
- La trahison simulée
- L’arrestation de Jésus
- Troisième rencontre
- Jésus, entre prophétie et
   politique

- La mort de Judas
  - La rédaction de Matthieu
  - La rédaction des Actes
  - Le non-dit des textes
  - Le suicide

DU JUDAS DE L’HIS­TOIRE AU JUDAS DES RÉCITS

ÉPILOGUE

ANNEXES


. . . . . . . - o 0 o - . . . . . . .

La rédaction de Matthieu


   Judas « jeta les pièces d’argent dans le Temple, se retira et alla se pendre », ainsi s’exprime Matthieu sans ménagement (Mt 27:5), comme si le suicide était l’issue logique de sa rencontre avec les sacrificateurs, qui marquait l’échec de toute sa vie.
   Quelle que soit l’interprétation théologique ou historique que nous lui donnions, elle le fut vraiment. Rejeté par les sacrificateurs, Judas ne pouvait connaître qu’une fin tragique.

   Pour Matthieu Judas, repenti, chercha à réparer sa faute en restituant aux sacrificateurs l’argent reçu pour la trahison. Mais c’était insuffisant. Selon la Loi, le crime d’homicide ne pouvait être réparé que par la mort (Dt 21:9 ; Nb 35:30). Judas ne pouvait donc espérer le pardon qu’en expiant sa peine. Dieu aurait pu, à tout moment, susciter contre lui un « vengeur » (Nb 35:21), auquel il n’aurait pu échapper. Pour l’heure, sa traîtrise écartait ce danger, puisqu’il était protégé par ceux qui avaient condamné Jésus et auxquels il s’était associé pour le trahir. Il était donc un pécheur en sursis, qui pouvait encore échapper à la vengeance du « tueur ». Repenti, il profita de ce délai pour accomplir de ses propres mains la justice de Dieu, effectuant lui-même la mission du « vengeur ». C’est pourquoi, une fois l’offrande de son péché refusée, il alla se pendre.
   Pourquoi Matthieu laisse-t-il Judas sous la justice de la Loi, au lieu de l’engager sur le chemin de la grâce du Christ ? Faisant de lui un repentant, pourquoi ne le conduit-il pas au seuil du salut, en larmes, comme Pierre (Mt 26:75) après son reniement ? Sans doute ne présume-t-il pas en lui, comme en Pierre, la foi au Christ ! Il est un disciple parvenu au seuil d’une foi qu’il ne peut pas franchir, demeurant ainsi en-deçà du salut, étroitement lié au judaïsme par la Loi.
   Dès lors s’explique la relation de l’argent de la trahison avec le passage de Zacharie concernant le « champ du potier » (Za 11:12-13). Le peuple donne à Zacharie trente sicles d’argent comme salaire de son travail de berger, et avec cette somme le prophète achète un champ de potier. Pour Matthieu, il s’agit de la prophétie de la trahison de Judas, les Juifs donnant à Judas trente sicles d’argent pour prix de la trahison de Jésus.

   Mais lorsque ce même Judas leur restitue l’argent en offrande pour son péché, les sacrificateurs le refusent, parce qu’il est le prix du sang. Ils achètent ainsi par cet argent le « champ du potier », terre à glaise où rien ne peut pousser et qui ne sert que pour ensevelir les étrangers. « Hakeldama », le « champ du sang », lieu destiné à ces réalités impures que sont les étrangers et les morts.
   Mais pour Matthieu, le « champ du sang » est le symbole de la terre d’Israël, le lieu de la sépulture du peuple élu, devenu étranger aux promesses et désormais destiné à la mort : terre que Dieu a rendue désertique, parce que le peuple l’a souillée avec le sang du Christ, accomplissement des paraboles prophétiques de Jésus annonçant le rejet du peuple juif comme peuple élu. Judas est le lieu de convergence entre la parole de l’Écriture et son accomplissement, celui qui actualise les trente sicles d’argent, prix du sang, dans le drame du salut, afin que le « sang innocent » retombe sur le peuple.



juillet 1987




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t619100 : 06/12/2017