ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Pierre Curie


Le roman inachevé d’un utopiste





Tourcoing (1960-1967) :
expériences nouvelles


Sommaire

Prologue

Introduction

Clermont-l’Hérault

Saint-Quentin

Bruay-en-Artois

Tourcoing
- Introduction
- Le protestantisme à
  Tourcoing
- Communauté vivante
- Sensibilisations
- Parole d’utopie
- L’impasse
- Recherche de structures
   nouvelles
- Expériences nouvelles
  . Tournant théologique
  . Tournant œcuménique
  . Le groupe œcuménique
  . Le groupe pour la paix
  . Le groupe de recherche
    biblique
- Vers la crise

La crise

Épilogue




. . . . . . . . - o 0 o - . . . . . . . .

Le groupe œcuménique


   Invité après le colloque (1) par l’abbé Degandt, vicaire du chanoine Clarisse, à réfléchir ensemble à la suite qui s’imposait, je le rencontrai dans les jours qui suivirent au presbytère catholique de Tourcoing. Le souci premier, pour l’un et pour l’autre, fut d’éviter de se faire déborder rapidement par le succès de l’événement qui venait de se produire.

   Il fut alors convenu, d’un commun accord, de constituer un groupe mixte, équilibré dans sa composition, pour réaliser dans ce contexte inédit un « mini-laboratoire œcuménique » qui permettrait d’avancer prudemment dans l’approfondissement des convictions de chacun et la découverte de ce qui pouvait leur être commun.
   Il fut entendu que chaque Église désignerait dix de ses membres, que les rencontres conserveraient un caractère privé et se tiendraient à tour de rôle, chaque cinq à six semaines, chez une famille catholique, puis protestante, ou bien dans l’un ou l’autre des presbytères ; que ces rencontres, alternativement, aborderaient une information sur un aspect du catholicisme, puis du protestantisme, et engagerait un partage sur un texte biblique choisi de concert ; qu’enfin, à l’occasion de la semaine annuelle de l’unité des chrétiens, en janvier, le groupe s’ouvrirait à quelques autres membres des deux communautés, sans excéder la trentaine de personnes, pour un service commun comportant une méditation donnée une année par le prêtre, l’autre par le pasteur, et toujours accueilli dans la demeure de l’une ou l’autre des familles du groupe.
   Ainsi, durant presque quatre années, entre 1964 et le début de 1968, les hôtes de ces rencontres œcuméniques, qui eurent le privilège de créer des liens d’amitié et de respect réciproque, furent du côté catholique trois jeunes ménages, les Mondon, Playoust et Flipo, ainsi qu’une famille de militants du Mouvement « Vie nouvelle », les Réquillart, et du côté protestant deux familles de la paroisse, les Loutzenko et les Huet.

   L’information permit une meilleure approche des deux Églises pour chacun des membres du groupe, abordant l’organisation et les structures de l’Église réformée, la signification et les œuvres de l’Action catholique, le décret sur l’œcuménisme du concile Vatican II. Les échanges s’aventurèrent également sur des questions plus engagées : comment être présent au monde ? peut-on concilier les pratiques évangéliques et la pratique du pouvoir ?
   Les partages bibliques eurent entre autres thèmes : l’alliance de paix avec la terre (Gn 8 et 9), les chrétiens, ministres d’une nouvelle alliance (2 Co 3:3-14). Le dialogue porta parfois sur des questions plus délicates : quelle est la raison d’être de l’Église, de la foi, de l’athéisme ? Ce ne fut pas sans provoquer, en certaines occasions, l’embarras ou l’émotion du prêtre présent à ces échanges !
   En effet, dans la troisième année de cette expérience, un certain malaise devint perceptible, plus chez l’abbé Degandt que chez la plupart des participants catholiques. Plusieurs fois il apparut dépassé par « l’audace » des questions soulevées ou des réponses avancées, parfois par la partie catho­lique elle-même. Des clivages se firent jour, qui ne recoupaient pas nécessairement les comportements traditionnels et qui révélèrent même des con­nivences inattendues. Dès lors, les autorités catho­liques locales manifestèrent une certaine appré­hension sur l’avenir de ces contacts qui suscitaient, sans doute, un climat de véritable amitié, mais risquaient désormais de déborder les « frontières reconnues » pour dévoiler une « unité » imprévisible pour la « prudence » dont on avait convenu au départ ! L’entretien qui avait eu lieu sur le thème de la sainte cène et de l’eucharistie avait provoqué une certaine émotion…

   Alors l’abbé Degandt, au nom de sa hiérarchie locale, proposa pour la suite des rencontres en 1967-68, de ramener le rythme à une rencontre trimestrielle, et d’en aménager la forme, par trop « spontanée » jusqu’alors ; il suggérait (mais c’était plutôt une condition) qu’à l’avenir le dialogue, dont les thèmes auraient été préalablement préparés séparément, laisserait les laïcs des deux Églises s’exprimer seuls au cours de la rencontre, le prêtre et le pasteur, présents (mais muets) à titre de témoins n’intervenant qu’en fin d’entretien pour proposer, chacun, sa « synthèse ». Il était annoncé, de plus, qu’un père jésuite serait appelé à remplacer l’abbé Degandt !
   Pour officialiser la proposition, un échange de lettres eut lieu, à l’automne 1967, entre M. Réquillart et le pasteur de Tourcoing. Malheureuse­ment, l’incertitude qui pesait, à cette date, sur la continuité de mon ministère à Tourcoing et la crise ouverte avec les autorités régionales protestantes mirent un terme prématuré à cette modeste expérience œcuménique (je garde encore en mémoire les regrets de certains jeunes ménages catholiques).
   Parce qu’elle abordait alors les difficultés véritables et inévitables, elle allait entrer dans sa « maturité »…

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(1) Voir le compte-rendu du colloque de Tourcoing du 21/01/1964.   Retour au texte



1992




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