ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris


L’écriture  des  évangiles




Les évangiles et la structure de leur discours :

Les figures de l’articulation du sens




Sommaire

Introduction

La foi en Jésus-Christ

Mort et résurrection

Refoulement et sublimation de Jésus

Tournant historique de l’Église

Naissance de l’anti évangile

De l’Évangile aux évangiles

Structure de l’anti évangile

Structure des évangiles
- Déstructuration de
   l’anti évangile
- Espace référentiel de
   Marc
- L’image de Jésus-
   Christ
- Les informations
   traitées comme des
   signes
- Les figures rhétoriques
   . Marc : l’analogie
   . Matthieu : la
     métaphore
   . Luc : la parabole
   . Jean : l’allégorie
- La censure

Le Jésus de l’histoire

Genre littéraire et genre référentiel



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L’allégorie, chez Jean


   Le problème que l’auteur du quatrième évangile devait résoudre était de situer dans un contexte géographique, historique et psychologique la vie d’une personne dont la nature était transcendante et métaphysique. Les formes rhétoriques employées par les autres évangélistes – l’analogie, la métaphore et la parabole – étaient à cet égard tout à fait insuffisantes, dans la mesure où elles n’étaient opérationnelles qu’au niveau de l’expérience. La parabole elle-même n’était pas ordonnée à manifester l’essence transcendante du Christ ou du royaume des cieux, mais la connaissance qu’on pouvait en avoir dans une expérience de foi. C’est pourquoi Jean fit appel à l’allégorie.
   Selon l’acception commune, celle-ci est un discours à plusieurs sens, car par-delà le sens lexical (littéral) les mots posséderaient un sens caché et spirituel. Pour nous cette pluralité de sens, hormis le cas de polysémie, semble étrange, mais pour les anciens le champ de significations comprenait non seulement la totalité des signifiés lexicaux, mais aussi les rapports de connotation et la gamme de significations du processus de la genèse du mot (philologie). Cet ensemble complexe de significations représentait ainsi pour eux l’univers des essences des choses. Ainsi le mot précédait-il la chose, et pour connaître celle-ci il fallait analyser le mot jusqu’à ce qu’on eut trouvé le rapport fondamental – la racine du sens – où le créateur en avait fixé l’essence. Dès lors l’allégorie était une fonction moins linguistique qu’épistémologique, signe d’une culture où la parole avait pris le dessus non seulement sur l’acte, mais aussi sur la pensée et où la logique avait cédé la place à la rhétorique.

   Jean s’inscrit dans cette culture, et se rattache à la philosophie herméneutique de Philo, qui peut être considéré comme le père de l’allégorie. Pour lui, l’allégorie est non seulement une forme d’expression, mais aussi un mode d’approche aussi bien des Écritures que du réel. En effet il lit les Écritures en les parcourant au niveau du sens spirituel et caché, dans le but d’extraire l’essence transcendante du Christ et de son évangile, et lorsqu’il s’apprête à déterminer les situations de base que lui offrent l’anti évangile et la mémoire rouverte de l’Église, il fait usage d’actions et d’intrigues qu’il coordonne en récits en raison de leur sens spirituel. Tout acte, tout mot, tout fragment d’événement, sont pour lui des morphèmes correspondants à des sémèmes rigoureusement codifiés.
   Les six amphores du récit des noces de Cana ou les bandelettes de celui du tombeau vide, le sang et l’eau qui coulent de la poitrine de Jésus ou les gros poissons pêchés par les disciples, tout devient signifiant au niveau du deuxième sens. La réalité est transmuée en signe, cependant que les mots ne sont signifiants que par-delà leur propre lexique.
   L’agencement de ces morphèmes aboutit dans des récits qui échappent à toute classification, puisqu’ils résistent à être inscrits dans le genre de la narration ou du conte, ou même de la parabole. En effet ils constituent un genre littéraire à part, l’allégorème, dont l’articulation s’établit selon la possibilité opératoire des codes d’allégorie.



c 1980




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tg08540 : 22/03/2021