ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris



Le  centurion


Matthieu 8: 5-13




1- Le récit de Matthieu



12- Le genre littéraire du récit de
       base : le récit est-il historique ?



Magnum Dictionarium latinum et gallicum, de P. Danet, MDCXCI





Introduction
Sommaire


Le récit de Matthieu

Le sens théologique

Le genre littéraire
- Récit historique ?
- Récit romanesque ?
- Récit d'interprétation

Du récit au document
- Première aporie
- Deuxième aporie
- Troisième aporie

Du document à la tradition populaire
- Les apories
- Le récit populaire
- Trois tableaux d'un même
  fait

La gnoséologie du récit
- La gnoséologie des
  Évangiles
- Jésus est le Christ
- Narrateurs de Jésus-
  Christ

Information sur Jésus, foi en Jésus-Christ
- La confession de foi du
  centurion
- Jésus loue cette foi
- Interdit sur le peuple juif
- La guérison par la foi


Les récits parallèles

Le texte de Luc
Le texte de Jean
Les trois textes et la foi au Christ


Regard à partir des principes de l'analyse référentielle


our qu’un récit soit historique, il faut que son intrigue s’inscrive dans un contexte réel et que les actants soient historiques, sujets d’actions datées et logique­ment liées à ce contexte. En outre, il doit s’appuyer sur des références qui garantissent leur historicité.


On notera tout d’abord que ce chapitre n’a pas de contexte historique, son but étant de relater la conver­sation entre Jésus et le centurion, conversation qui peut être placée n’importe où et n’importe quand, tout en restant, comme on le verra par la suite, liée au cor­pus des faits concernant Jésus. Cela conforte l’hypo­thèse que le récit entend moins relater des faits qu’ex­poser une parole à travers des faits.
   Le centurion est un militaire, citoyen Romain, qui a de Jésus une image de guérisseur « sous le pouvoir de Dieu », sinon Dieu lui-même. Ses affirmations n’au­raient pu être prononcées ni par un Juif, qui n’aurait pu tolérer qu’un homme ait pu détenir un pouvoir di­vin sans en donner des signes, ni par un païen, parce qu’elles font référence à la « théologie biblique », qu’il aurait ignorée. Personne, du vivant de Jésus, n’aurait pu avoir de lui une telle image, qui suppose un déve­loppement théologique approfondi de la foi au Christ, ce qui ne fut possible que postérieurement, sous l’in­fluence paulinienne.

   Quant à Jésus, il n’aurait pas pu, lui non plus, ac­cepter une confession de foi à son égard qui le faisait Dieu. Une telle confession est bien postérieure à sa mort. Le récit ne peut donc s’expliquer que par une catéchèse qui veut faire croire que Jésus, de son vi­vant, a été reconnu comme le Christ par un gentil, alors qu’aucun des fils d’Israël n’avait cru en lui. Cela explique la condamnation que Jésus prononce contre le judaïsme, après l’éloge de la foi du centurion.

   À l’appui de son historicité, nous n’avons d’autre référence que les textes parallèles de Luc et de Jean. Le premier modifie son atmosphère, mais pas le con­texte. Il s’agit toujours du centurion, mais il est devenu l’ami des Juifs et leur bienfaiteur, car il a bâti leur synagogue. Aussi ce sont les Juifs qui le présentent à Jésus en lui assurant qu’il mérite d’être écouté. Dès lors, l’anathème de Jésus contre les Juifs n’a plus de raison d’être. Chez Jean, le contexte change. Il ne s’agit plus d’un centurion, mais d’un officier du roi, et donc d’un Juif. Aussi, la guérison ne s’appuie plus sur la thèse de la foi de l’officier, mais sur l’acte créateur du Christ.

   Ces considérations nous autorisent à affirmer que le récit ne réunit pas les conditions nécessaires à une narration historique. Son intrigue ne correspond pas à son sens, car la confession de foi du centurion sur la divinité de Jésus ne s’insère pas dans le contexte his­torique de Jésus : elle est bien postérieure. Ainsi ce ne sont pas les faits qui donnent sens au récit, mais le sens du récit qui vient donner existence aux faits.




Le 17 juin 2003




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t461210 : 13/03/2017