ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris



Le  centurion


Matthieu 8: 5-13




2- Les récits parallèles
de Luc et Jean



Magnum Dictionarium, de P. Danet, 1691





Introduction
Sommaire


Le récit de Matthieu

Le sens théologique

Le genre littéraire
- Récit historique ?
- Récit romanesque ?
- Récit d'interprétation

Du récit au document
- Première aporie
- Deuxième aporie
- Troisième aporie

Du document à la tradition populaire
- Les apories
- Le récit populaire
- Trois tableaux d'un même
  fait

La gnoséologie du récit
- La gnoséologie des
  Évangiles
- Jésus est le Christ
- Narrateurs de Jésus-
  Christ

Information sur Jésus, foi en Jésus-Christ
- La confession de foi du
  centurion
- Jésus loue cette foi
- Interdit sur le peuple juif
- La guérison par la foi


Les récits parallèles

Le texte de Luc
Le texte de Jean
Les trois textes et la foi au Christ


Regard à partir des principes de l'analyse référentielle


’exposerai successivement dans ce chapitre les textes parallèles de Luc (7: 1-10) et de Jean (4: 46-54), en les comparant au texte de Matthieu, afin de mettre en lumière les emprunts et les modifications apportées à celui-ci.


21- Le texte de Luc 7:1-10

2- « Or un centurion avait, malade et sur le point de mourir, un esclave qui lui était cher.
3- Ayant entendu parler de Jésus, il en­voya vers lui quelques-uns des anciens des Juifs pour le prier de venir sauver son esclave.
4- Arrivés auprès de Jésus, ils le sup­pliaient instamment : « Il est digne, di­saient-ils, que tu lui accordes cela ;
5- il aime en effet notre nation, et c'est lui qui nous a bâti la synagogue. »

6- Jésus faisait route avec eux, et déjà il n'était plus loin de la maison, quand le centurion envoya des amis pour lui dire : « Seigneur, ne te dérange pas davantage, car je ne mérite pas que tu entres sous mon toit ;
7- aussi bien ne me suis-je pas jugé digne de venir te trouver. Mais dis un mot et que mon enfant soit guéri.
8- Car moi, qui n'ai rang que de subal­terne, j'ai sous moi des soldats, et je dis à l'un : ‘Va !’ et il va, et à un autre : ‘Viens !’ et il vient, et à mon esclave : ‘Fais ceci !’ et il le fait. »

9- En entendant ces paroles, Jésus l'ad­mira et, se retournant, il dit à la foule qui le suivait : « Je vous le dis : pas même en Israël je n'ai trouvé une telle foi. »
10- Et, de retour à la maison, les en­voyés trouvèrent l'esclave en parfaite santé.


   Les deux récits de Matthieu et de Luc, se fondent sur les mêmes données : les paroles du centurion, se­lon lesquelles Jésus est un « homme sous le pouvoir de Dieu », de même que lui-même l’est sous celui des armées. Ces paroles ont frappé l’imagination populaire et ouvert l’intelligence des païens à la foi au Christ. Il y a aussi accord entre eux sur la construction du récit sur le modèle d’une guérison par la foi au Christ, ou par le Christ de la foi. Mais l’intrigue et la structure formelle ne sont pas identiques, du fait que la foi est, chez Luc, devenue conquérante, fixée conceptuelle­ment et plus développée culturellement.

   Chez Matthieu, Jésus et le centurion se rencontrent aux portes de la ville, et le dialogue s’engage à partir de la maladie du serviteur, jusqu’à ce que Jésus pro­pose de se rendre chez le centurion, ce que celui-ci, par humilité, refuse. La première aporie surgit de cette divergence, car l’humilité ne suffit pas à justifier le refus du centurion, qui est si insistant et intransigeant qu’on peut supposer que cela masque un défi refoulé.

   Luc échappe à cette aporie : il met en relation les deux personnages par la médiation d’amis, que le cen­turion charge de contacter Jésus pour qu’il se rende chez lui au chevet de son serviteur.

   Pas trace d’une opposition dans le récit, même si l’on apprend que le centurion ne s’est pas dérangé personnellement, par humilité. Et puisque cela est re­foulé dans le silence du texte, la première aporie est évitée.


Jésus s’est donc rendu chez lui avec les anciens. Lorsqu’il se trouve non loin de la maison, le centurion envoie des amis pour lui dire qu’il n’est pas digne de le recevoir, et qu’agissant sous le pouvoir de Dieu, il peut guérir par sa seule parole. Pourquoi n’en a-t-il pas chargé les anciens ? Sans doute parce qu’il avait de Jésus une image commune à chacun : un guérisseur sous le pouvoir de Dieu. Mais, à la réflexion, il prit conscience de s’être comporté avec Jésus comme un chef militaire à l’égard de ses subordonnés, alors que Jésus seul pouvait ordonner aux esprits du malade. Son humilité était donc sincère, et lui imposait de changer de comportement.

   Ici encore, aucun désaccord : Jésus a fait l’éloge de sa foi et est reparti en silence. Et cependant, il a dû prononcer la parole de guérison demandée par le cen­turion, puisque les amis de celui-ci, en retournant chez lui, trouvèrent le malade en parfaite santé.


Par cette tournure de l’intrigue, Luc a évité aussi les deux autres apories : l’invective contre les Juifs et le doute sur l’accomplissement de la guérison par la pa­role de Jésus. La première n’a pas eu lieu d’être, car Luc a présenté les Juifs comme des amis du centurion et ses intercesseurs auprès de Jésus. Quant à la gué­ri­son, elle n’a été que la conséquence de l’intervention de Jésus, puisque les amis du centurion l’ont constatée dès que celui-ci a cru qu’elle s’opèrerait sur la parole de Jésus.




Le 17 juin 2003




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