Si nous ôtons ce rêve de Joseph, que reste-t-il de celui-ci ? En effet, si on récuse ce rêve, il faut aussi rejeter les deux autres qui se trouvent dans le récit de la persécution d’Hérode et, avec ces rêves, toutes les actions à caractère théologique qu’il exerce dans le récit. Joseph, en effet, n’est pas décrit comme un homme de l’histoire mais comme un personnage, jouant le rôle de l’époux de la « vierge enceinte » de l’oracle interprété. Son rôle est d’être l’époux d’une femme fécondée par le Saint Esprit, d’insérer sa conception dans le cadre de la généalogie légitime des fils d’Abraham et des rois davidiques, enfin de protéger la vierge-mère afin de sauver l’enfant et de la servir.
   Joseph doit jouer le rôle de l’homme qui, tout en étant époux, n’est pas mari, qui est père selon la légalité sans avoir engendré l’enfant. Joseph est donc un personnage et non une personne.

   Son nom nous autorise à croire qu’il a été tiré du personnage biblique de Joseph. En effet, il est rêveur, comme l’ancêtre des Écritures, il est mis comme lui devant un problème de femme, il sauve l’enfant en l’emmenant en Égypte comme l’ancêtre a sauvé son peuple en le conduisant dans le même pays. Ainsi il insère la naissance de Jésus dans la généalogie des fils de Jacob et accomplit cette génération dans celle de Jésus.

   On peut légitimement penser que Joseph n’est qu’un personnage théologique, et que Marie n’était ni son épouse ni sa promise.