ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris


Les poèmes d’amour
de  Dante  Alighieri




De la poésie d’amour à la poésie de louange :

printemps et Amour : Jeanne et Béatrice




Vita nuova XXIV

  Io mi senti’ svegliar dentro al core
un spirito amoroso che dormia :
e poi vidi venir da lungi Amore
allegro sì, che appena il conoscia,

  dicendo : « Or pensa pur di farmi
onore » ;      
e ’n ciascuna parola sua ridia.
E poco stando meco il mio segnore,
guardando in quella parte onde venia,

  io vidi monna Vanna e monna Bice
venire inver lo loco là ’v’io era,
l’una appresso de l’altra maraviglia ;

  e sì come la mente mi ridice,
Amor mi disse : « Quell’è Primavera,
E quell’ha nome Amor, sì mi somiglia ».

  Je sentis en éveil dans mon coeur
Un amoureux esprit qui y dormait.
Aussi je vis venir Amour d’humeur
Si gaie que juste on le reconnaissait.

  Il me disait : « Pense à me faire
honneur »,          
Et à chacun de ses mots il riait.
Et ne pouvant retenir mon seigneur,
Je regardai le lieu dont il venait.

  Et je vis dame Jeanne et dame Bice
Qui venaient vers moi en même temps
L’une à côté de l’autre : une merveille.

  Et tel que je compris par les indices,
Amour me dit : « Celle-là est Printemps,
Celle-ci est Amour, à moi pareille ».


Sommaire
Avertissement au lecteur
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Premiers vers

Introduction

Aux fidèles d’Amour

Les soixante belles de Florence

Béatrice, dame du secret d’Amour

La dame gentille

Béatrice refuse de saluer Dante

De l’amour à la louange
- L’intelligence d’amour
- Entre printemps et
   Amour

- Douceur et amour
- Béatrice et Amour
- Béatrice et les femmes
- Le portrait de Béatrice

Lamentations sur la maladie de Béatrice

Mort et glorification

La dame gentille

La Pargoletta

Le refus de la dame gentille

La dame-pierre



. . . . . . . - o 0 o - . . . . . . .

   Ayant vogué ensemble, avec leurs dames respectives, sur le vaisseau de l’amour, Dante et Guido Cavalcanti se trouvaient maintenant seuls sur la rive, abandonnés par elles. Car de même que Béatrice avait refusé de suivre Dante, Jeanne avait quitté Guido. Peut-être que les deux poètes n’étaient pas restés sans la consolation d’une femme, mais ils n’avaient plus la dame inspiratrice de leur poésie. Période d’attente, semblable à un hiver où rien n’éclot à la surface de la terre.
   Mais la poésie dormait dans le cœur de Dante comme son amour, car il aimait toujours Béatrice, même après le jugement de la cour poétique des femmes. D’ailleurs, vivant à Florence, il la voyait souvent, même s’il ne pouvait pas la saluer ni en recevoir un salut, ce qui suffisait pour que l’amour reste comme une braise dans son cœur.

   Un jour, cependant, il rencontre Béatrice en compagnie de Jeanne. Victimes et actrices de la séparation d’avec leur amant, elles pouvaient maintenant se dire ces choses qui avaient constitué auparavant un grand secret : elles pouvaient parler de leur amour courtois, et elles s’amusaient en parlant, Béatrice riait comme le jour du gab. Dante revoyait sur ses lèvres ce rire qui lui donnait le frisson, mais il en éprouvait maintenant une autre sensation : en les voyant libres de leur amour et aussi libérées intérieurement de toute culpabilité, il s’est senti soulagé. Leur rire lui est apparu libérateur aussi pour lui, le purifiant de sa propre culpabilité : une purification par l’humour, rare chez Dante, mais qui venait des femmes.
   Dante sent alors de nouveau Amour dans son cœur, et interprète cette rencontre comme une vision qu’Amour lui offre pour leur redonner, à lui et à Guido, leurs dames inspiratrices, même si elles les ont abandonnés : oui, Béatrice et Jeanne ont disparu, mais Amour vient à leur rencontre avec Printemps et Amour. La personne des femmes disparaît, mais leur image reste pour que la poésie ne quitte pas leur esprit comme l’amour avait quitté leur cœur. Par la poésie de Cavalcanti, Jeanne était apparue à Dante comme le retour du printemps dans le monde, après le long hiver du manque de poésie, et après Jeanne, Béatrice est venue pour apporter directement l’apparition d’Amour. Même si Jeanne et Béatrice ont préféré n’être que deux jeunes-filles charmantes et belles, leur beauté reste toujours inspiratrice des deux courants de poésie : ainsi le poète reste, même si l’amoureux souffre le martyre.



c 1977




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