Analyse du récit :
Le réveil et la fin de l’attente
Deux premières fois;
Jésus s’approcha des
disciples endormis pour les exhorter à veiller et à prier. Une troisième, il les réveilla, car l’événement pour lequel ils auraient dû veiller s’accomplissait : «
vous dormez – réveillez-vous » (
Mt 26:46 ;
Mc 14:42).
Cependant le sens de ces paroles de
Jésus est ambivalent, selon que le verbe « dormir » est à l’indicatif ou à l’impératif. À l’indicatif,
Jésus dit : «
Vous dormez encore et vous reposez. Il suffit. L’heure est venue. Voici le fils de l’homme est livré aux mains des pécheurs. Réveillez-vous, allons. Voici, celui qui le livre est proche. » À l’impératif, il s’est exprimé ainsi : «
Vous pouvez dormir, maintenant et vous reposer, mais il suffit. L’heure est venue... »
Le premier sens suppose une opposition entre « dormir » et l’accomplissement de l’événement, le second, au contraire, implique leur correspondance, parce qu’il s’agit d’événements opposés : la trahison par
Judas, et la libération de
Jésus par la venue des
Grecs.
On peut aussi paraphraser la première version : «
Vous dormez encore et vous vous reposez, alors que le Fils de l’homme est livré aux mains de pécheurs. Il suffit. Réveillez-vous, allons, car voici celui qui me livre. » Les paroles par lesquelles
Jésus a réveillé ses
disciples sont accordées au sens christologique du récit. Les
disciples devaient veiller et prier pour n’être pas tentés de s’opposer à l’événement ou de s’enfuir. Ils n’ont pas veillé, par fatigue, et le sommeil a empêché la tentation. «
Allons ! » Mais où
Jésus voulait-il les amener ? À la rencontre du traître qui le livrait aux mains des pécheurs. Pourquoi ? Pour qu’ils en soient les témoins.
La seconde version donne un tout autre sens : «
Vous pouvez bien dormir maintenant et vous reposer jusqu’au bout. Cependant il suffit, l’heure est venue ». Mais laquelle ? Celle de la trahison ? Non ! Comment pourraient-ils dormir et se reposer, si
Judas vient pour le trahir et donc les mettre eux aussi en danger ? S’ils peuvent dormir ainsi jusqu’«
au bout du sommeil qui leur reste encore » c’est que s’est accompli l’événement qu’ils attendaient : l’arrivée de ceux qui doivent l’amener auprès des
Gentils, les
Grecs.
Rien n’a donc été fait pour empêcher leur venue. «
Réveillez-vous et allons à leur rencontre ». Cette seconde version est conforme au récit à caractère informatif que nous venons de reconstituer grâce à l’analyse référentielle, il en constitue la conclusion. Les deux lectures ne peuvent se faire ensemble.
Mais
Jésus a-t-il vraiment vu venir les
Grecs, ou bien n’a-t-il qu’entendu des bruits, suffisants cependant, étant donné l’heure et le secret de la rencontre, pour laisser croire à leur venue ?